© André CEPEDA Série Anacronia (extrait),1999-2000 (70x70)
Depuis plus de quinze ans, Contretypes organise des résidences pour des photographes internationaux. Chacun d'eux, à sa manière, a réalisé un travail sur Bruxelles, à Bruxelles. Le travail de vingt-neuf de ces photographes est exposé, en ce moment, au Centre Wallonie-Bruxelles. La plupart n'étant représenté par qu'une seule de leurs œuvres. Résultat : de belles découvertes mais qui nous laissent un sentiment d'inachevé.
© Philippe HERBET (Belgique, 2003) Série Bruxelles-Europe (extrait), 2002-2003 (53X53)
En pénétrant dans l'exposition, on oublie le centre Pompidou qui lui fait face, on oublie Paris et les Parisiens. A la place, on est directement transporté à Bruxelles. Mais un Bruxelles aux multiples facettes, aux vingt-neuf facettes à vrai dire. Vingt-neuf, comme le nombre de photographes qui participent à l'exposition. Fracturée sous leurs regards, la ville prend tous les visages : celui de l'errance comme celui de l'intimité, celui d'une nature morte en reconstruction comme celui d'une ville singulière grouillante d'interactions.
D'une image de statues détruites et laissées à l'abandon dans un Bruxelles en chantier (Hayeur), à l'ambiance surréaliste des portraits sans tête de Noé Senda, on cherche en vain une certaine unité. Telle une petite embarcation ballotée, attirée et repoussée par des courants contradictoires, on avance sans savoir si l'on recule ou si l'on fait un pas de côté. A défaut de fil rouge, on peut tout de même admirer les clichés qui explorent Bruxelles sous toutes les coutures.
© J.H. ENGSTRÖM (Suède, 2003) Série Je suis où (La Résidence) (extrait), 2003 (90x120)
Là où Satoru Toma et Daniel Desmedt préfèrent explorer la périphérie de Bruxelles et mettre en valeur ses espaces verts, Alain Paiement utilise la structure architecturale de la ville pour déstructurer ses propres images. Jouant sur la transparence et les ombres, Vincente de Mello fait avec douceur et poésie le lien entre l'intérieur et l'extérieur, le privé et le public. Quant à Marie-Noëlle Boutin et Barbora Pivonkova c'est aux interactions humaines qu'elles s'intéressent : quand la première immortalise l'adolescence belge, la seconde travaille sur le regard que l'on porte sur les SDF. Une petite salle sombre nous entraîne loin de la rue bruyante, au plus près de l'intimité des photographes. Comme si la découverte d'une ville passait avant tout par la découverte de soi-même. On peut y admirer en toute discrétion les autoportraits d'Elina Brotherus et d'Hicham Benohoud, en quête de leur identité. Mais celui qui règne en maître incontestable sur cette exposition, c'est bien évidemment Bernard Plossu, dont les photographies en petits formats apposent un doux visage sur le nom de flânerie.
© Elina BROTHERUS (Finlande, 2001) Série The New Painting. Nu au bull pack, 2002 (80x51) ; La Mangeuse de figues, 2001 (70x82)
Toute la complexité de cette exposition réside justement dans ces singularités parfois contradictoires. Il est à la fois intéressant et frustrant de découvrir – ou redécouvrir – ces artistes dont le regard ne s'exprime que par une seule photo. Hors de leur série, sorties de leur contexte, sans explications autres que le titre, les photographies, devenues filles uniques, semblent désemparées et nous laissent de même. Comme un livre dont on n'aurait lu qu'un chapitre, dédaignant l'incipit et le dénouement.
Conçues aussi comme une manière d'explorer leur art, les résidences de Contretypes sont dédiées à des photographes accomplis. Peu de balbutiements donc dans ces clichés rigoureux et déterminés. La maîtrise de la technique et l'effervescence de l'art se ressentent partout : depuis les photomontages de Sébastien Reuzé et Sébastien Camboulive jusqu'aux tirages couleur selon le procédé Fresson de Plossu. Pour ceux désireux d’explorer un peu plus en profondeur ces histoires, il existe également un livre éponyme, disponible à la galerie.
© Ieva EPNERE (Lettonie, 2013) Série Waiting Room (extrait), 2013 (65x80)
L’exposition :
« Bruxelles à l’infini », Centre Wallonie-Bruxelles, du 29 janvier 2016 au 24 avril 2016
Le livre :
Bruxelles à l’infini
Textes : Michel Poivert, Danielle Leenaerts, Emmanuel d’Autreppe
Design : Dojo design
Edition : CFC Edition et Contretype
Français / Anglais
208 pages
22,5 x 28 cm
ISBN : 978-2-87572-008-5
Prix : 39.00 €