With my son, Jakob Hugo, Natures Valley, 2014 © Pieter Hugo
C'est la couverture de l'ouvrage de Pieter Hugo, le premier livre sur son œuvre complète. Publié cette année, le livre reprend ses 14 séries abouties, entre le sud de l'Afrique, la Chine et les Etats-Unis. Son travail est principalement tourné vers le portrait mais son esthétique particulière rend artistique des objets aussi anodins que des coins de meuble.
Le photographe est né en 1976 en Afrique du Sud et y vit depuis, à Cape Town. Il a parcouru l'Afrique en s'intéressant à des groupes de personnages et modes de vie particuliers. Ses travaux se concentrent sur plusieurs aspects du continent, des décharges électroniques aux aveugles d'Afrique du Sud. Il a obtenu le Prix Découverte aux Rencontres d’Arles 2008.
Pieter Hugo © Pieter Hugo
Un regard vert sauvage et le plongeon commence. À travers son travail, Pieter Hugo part à la recherche de problématiques originales autour des traces des histoires nationales dans un contexte post-colonial. Très diversifiée, son œuvre est sociologique autant qu'esthétique. Le portrait est son format préféré, avec la volonté sous-jacente de captiver le spectateur au point qu'il ne puisse s'en décrocher. Fils de l'Afrique du Sud, il est conscient des séquelles du colonialisme et de l'apartheid ; c'est d'ailleurs ce qui rend son regard si particulier, aboutissant à des photos chargées de sens et d'émotions.
Abdullahi Mohammed with Mainasara, Lagos, Nigeria, 2007 © Pieter Hugo
Pieter Hugo reconnaît être influencé par August Sander et Diane Arbus, dans sa recherche et son format. Des Blancs sud-africains aux familles chinoises en passant par les sans-abris de Los Angeles et de San Francisco, ses sujets sont souvent des marginaux, des cas particuliers. Rejetant « l'art pour l'art », chacune de ses séries se construit autour d'une problématique unique, tout en gardant un héritage d'histoire de l'art via des poses classiques, des dégradés de couleurs ou encore l'utilisation d'allégories dans ses natures mortes d'objets disparates. Certaines séries, plus longues que les autres, marquent le parcours de l'artiste.
Mr and Mrs Guo, Beijing © Pieter Hugo
Parmi ces séries:
1994
Du nom d'une année clé dans l'histoire, Pieter Hugo s'est concentré pour ce projet sur les enfants du Rwanda, immortalisés au cœur de la nature. En effet, 1994 au Rwanda correspond au génocide des Tutsis par le pouvoir Hutu ; mais c'est aussi l'élection de Nelson Mandela en Afrique du Sud et enfin, la date où Pieter Hugo, à l'âge de 18 ans, a quitté ses parents pour se lancer à travers l'Afrique avec son appareil photo. Des années après, il est retourné sur la terre du massacre et a cherché les traces de l'évènement dans la nouvelle génération. De toutes les couleurs, les enfants posent en pleine nature et livrent ainsi des clichés magnifiques et impressionnants par leur regard dur et adulte. Effet de scène ou réalité ?
Kin
Familles, couples ou solitaires, tous sont passés sous le regard de l'artiste. Ce sont chez les sud-africains que Pieter Hugo a cherché à faire ressortir une conception du « Home », de l'appartenance. Dans ce pays longtemps ségrégé, encore schizophrène de son passé, les portraits, très nets et détaillés, expriment la diversité du pays. Blancs ou Noirs, riches ou pauvres, les fonds colorés ou symétriques leur font tous dire quelque chose. Comme une preuve de l'existence, quelques natures mortes d'objets anodins et décalés à la foi, trouvés chez les habitants, complètent le panel.
In Sipho Ntsibane's home, Soweto, 2013 © Pieter Hugo
There's a Place in Hell for Me and My friends
A l'image du nom de cette série, le projet est atypique et le résultat détonant. Pieter Hugo a réalisé des portraits initialement très classiques de ses proches en Afrique du Sud. Après les prises de vues, il a utilisé les possibilités du numérique pour transformer les couleurs de ses photos et les reproduire en nuances de gris. Le résultat, ce sont des figures extrêmement sombres où percent des yeux palis, les reflets de lumières apparaissent nettement et dessinent les images. La proximité de l'artiste avec ses sujets permet une franchise d'expression précieuse.
Annebelle Schreuders © Pieter Hugo
Pieter Hugo ou ces portraits poignant. L'artiste a réussi son pari de tenir l'observateur en admiration, d'un bout à l'autre de l'ouvrage. Parfois documentaires, d'autres fois abstraites, ou simplement esthétiques, ses images reflètent une fine maitrise de la photographie. Reliée dans une belle édition en grand format, son œuvre apparaît riche d'une diversité étonnante.
Green Point Common II, Cape Town, 2013 © Pieter Hugo
Pieter Hugo
Between the devil and the deep blue sea
Prestel éditions
58€