Lucien Clergue (1934-2014), Passion de Réattu, Arles, 2005. Arles, musée Réattu © Lucien Clergue, 2014
Musée Réattu 10 rue du Grand Prieuré 13200 Arles France
Pascale Picard, la directrice du musée et commissaire de l'exposition, rappelle avec enthousiasme que le festival d'Arles et la photographie doivent énormément à Réattu. C'est en 1965 que Jean-Maurice Rouquette, conservateur, et Lucien Clergue, photographe, y ont « osé » un projet original qui devait marquer officiellement le début de l’idylle entre la photo, la France et le reste du monde. La première collection publique de photographies dans un musée des beaux-arts français voyait le jour. Cinq années plus tard, viendrait le tour des premières rencontres.
Edward Weston (1886 -1958), Cabbage Leaf, 1931, tirage Brett Weston 1951, épreuve argentique, don de Jerome Hill, 1970
© Center for Creative Photography, The University of Arizona Foundation/ ADAGP, 2015
Tout est parti de la visite de Clergue au MOMA de New York. Il découvre là-bas que peinture et photographie peuvent parfaitement cohabiter et propose à Rouquette d'en faire autant, sur les principes de la contribution et de la donation. Il va solliciter tous les grands photographes du moment en leur promettant en échange un lieu d’exposition. Les premiers courriers sont envoyés dès 1964, et ce sont les photographes étrangers qui répondent les premiers : Avedon, Strand, Adams, etc. Dès la première année, il reçoit 332 photos et la première exposition a lieu en 1965. Quelques journalistes s'interrogent déjà : Arles, capitale mondiale de la photographie ?
Arnold Newman (1918-2006), Marilyn Monroe, 1962. Arles, musée Réattu, dépôt des Rencontres d’Arles 2002 © Arnold Newman, 2015. DR
50 ans plus tard, Pascale Picard met en avant une collection qui n'est pas encore sanctuarisée : « Elle est toujours vivante ! ». D'où sans doute le choix d'une installation inaugurale d'Olivier Roller. « Le travail de sélection a été difficile, parfois angoissant, car il y a plus de 5000 photos ! Il faut faire des choix et il faut qu’il y ait un propos », explique la commissaire. Voilà pourquoi sans doute ils n'étaient pas trop de deux. Andy Neyrotti lui a prêté main forte. Ce dernier nous confiera d'ailleurs que parmi les trésors de la collection photographique du musée, on trouve les cartes de vœux des plus grands photographes. De quoi faire une exposition un jour ? C'est une autre histoire.
Marc Garanger (né en 1935), Femme algérienne, Algérie, 1960, épreuve argentique, dépôt des Rencontres d'Arles, 2002 © SAIF, Paris
Pour le moment, le plaisir réside non seulement dans la qualité des clichés exposés mais aussi dans le fait qu'ils sont la plupart du temps le choix des photographes qui les ont pris, puis envoyés à Clergue. Les quatre photos d'Avedon sont donc celles d'un choix sur mesure, pas le fruit du hasard ou d'une quelconque vente aux enchères. Rappelons que 95% de la collection est issue de donations. Celles faites aussi lors des rencontres d'Arles. En vrac, on se délecte devant de véritables pépites de la photographie mondiale : Ansel Adams, Willy Ronis, Robert Doisneau, Yves Klein, Paul Strand, Peter Beard, Weston, Mächler, Moon, Brassaï, Alloucherie, Mercadier, etc. Pour l'anecdote, Cartier-Bresson est peu représenté car faisant partie des photographes réticents à lâcher des images. Talent et générosité n'allant pas nécessairement de pair...
Emilie Lemoine