©Claudio Sabatino, Facade de la cathédrale Notre-Dame vue de la rue Rockefeller , 2016 , tirages jet d ’ encre sur papier fine art, 60 x 90 cm
Depuis quelques temps, deux petits originaires de Reims ont fait leur entrée au patrimoine mondial de l'UNESCO : la cathédrale Notre-Dame et le champagne. Mais, comme le répétaient nos professeurs, il ne faut pas se reposer sur ses lauriers. Il faut persévérer pour continuer à avancer. Amen. Les Rémois, bons élèves, on été attentifs en cours et ont su appliquer ces préceptes. Ils ont donné un devoir audacieux à leurs cinq élus : photographier leurs trésors de manière novatrice, mais sans trahir leur essence. Le club des cinq a su résoudre brillamment cette quête de l'impossible, chacun mettant à profit sa personnalité pour remplir sa part du contrat.
©Jordi Bernadó, Basilique Saint-Remi (chapelle rayonnante), 2016, tirage expo couleur classique sur papier RC, 50 x 60 cm
Ce n'est donc plus un regard neuf que nous propose cette exposition, ce sont cinq visions bien distinctes ! D'abord, celle de Jordi Bernardo, avec son attention du détail. Chez lui, chaque élément a son importance et est mis en exergue avec une ironie, cependant sympathique, qui caractérise le photographe espagnol. Lorsqu'il photographie une chapelle de la basilique Saint-Remy, c'est une plante verte qui en est la star. Au palais du Tau, le portrait de Charles X, pourtant au centre de l'image, se voit volé la vedette par un rayon de soleil peu flatteur et des petites tasses en porcelaine posées sur la table juste devant.
©Arno Gisinger, War Room, de la série Reims - patrimoines revisités, 2016
Arno Gisinger a, quant à lui, choisi de garder son sérieux. Ne dit-on pas, « Sérieux comme un Autrichien » ? Non ? Et bien on devrait ! En tout cas, c'est avec un point de vue d'archéologue que le photographe a décidé d'appréhender cet exercice. Imprimées sur du verre, ses photos deviennent des archives d'un temps oublié. Ici, une image de graffitis réalisés pendant la première guerre mondiale. Là, un cliché de la salle où l'armistice fut négocié, le 7 mai 1945. Là encore, des plaques commémorant les visites conjointes de chefs d'état allemands et français.
©Sophie Zénon, Réserves du palais du Tau, 2016, tirages jet d’encre sur papier fine art, 30 x 40 cm
Ensuite, c'est au tour de Sophie Zénon de nous présenter ses photographies de statues appartenant aux réserves du palais de Tau. L'artiste française a réussi à capturer l'âme de ces hommes de pierre, grâce à une vitesse d'ouverture extrêmement lente. On se croirait dans un château hanté. On en frissonne encore.
©Paolo Verzone, Françoise Guillart, guide bénévole de l’église Saint-Nicaise du Chemin-Vert et membre des Amis de Saint-Nicaise du Chemin-Vert.
Ancienne salle du catéchisme, église Saint-Nicaise du Chemin-Vert, 2016
Paolo Verzone a, lui aussi, choisi d'effectuer des portrait. Il s'agit d'ailleurs de sa spécialité. Mais plus question d'ectoplasmes ici, retour parmi les vivants. L'Italien sait pénétrer dans l'âme de ses sujets comme personne. Leurs portraits les présentent dans leur environnement quotidien. Une vielle dame sympathique dans une ancienne salle de catéchisme de l'église qu'elle fait visiter bénévolement. L'organiste de Saint-Rémy à son instrument. Ces images semblent être de véritables biographies à elles seules.
©Claudio Sabatino, Bâtiments de style néo-Tudor de la maison de champagne Vranken Pommery, 2016, tirages jet d’encre sur papier fine art, 40 x 55 cm
Enfin, Claudio Sabatino nous propose un tour de la ville. Malchanceux, le photographe avait choisi une mauvaise semaine pour venir travailler. La météo, peu clémente, ne lui avait offert qu'un ciel blanc uniforme. Mais qu'importe, il en fallait plus pour arrêter un Italien déterminé ! Celui-ci a décidé de tirer parti de Mère Nature, en proposant une série de photo où ce blanc cotonneux nous enveloppe, comme un doux nuage de lait. On est à l'aise, serein. Pari réussi.
Un exposé des patrimoines réussi donc. La ville de Reims leur a, on l'espère, attribué une bonne note ! Mais un bon professeur doit aussi savoir mettre en valeur le travail de ses élèves. L'oeuvre collective qu'est cette exposition n'était donc pas terminée sans une petite touche finale : la scénographie. Là encore, la ville a sorti les grands moyens. La salle d'exposition ? Le Cellier, construit à la fin du XIXe pour contenir les bouteilles de champagne, désormais utilisé comme un espace culturel. Rien que la devanture du lieu est à couper le souffle. L'exposition est installée dans les anciennes caves du lieu. Chaque artiste a son coin de salle, avec ses propres lumières. Un blanc doux pour souligner le moelleux de Sabatino. Un éclairage qui vient de derrière pour faire ressortir les plaques de Gisinger.
On ne vous en dira pas plus. On a même peur d'en avoir trop dit. Il s'agirait de ne pas vous gâcher toute la surprise de l'exposition. Un dernier mot cependant : pour ceux qui désireraient approfondir la dimension champagne de ce lieu, Paolo Verzone propose une exposition itinérante sur les confraternités, qui produisent ce vin de manière traditionnelle.