ORAGES ! © Xavier Delorme
ORAGES ! © Xavier Delorme
Comment s’organise-t-on pour aller chasser l’orage ?
Cela se passe en trois temps. Tout d'abord, il y a une partie prévision météo qui permet de prévoir une tendance orageuse 10 à 15 jours en avance. Une fois un risque orageux identifié, je le suis avec d'autres modèles météo jusqu'au jour J pour planifier un plan de chasse. Je fais une juxtaposition des passages orageux avec mes milliers de points de vue préalablement identifiés depuis des années sur une carte Google.
Puis, c'est la traque. Je m'arrange pour être sur place 2 heures avant les premiers orages prévus car il peut y toujours y avoir des surprises. La traque commence quand les premiers orages se manifestent sur les radars, satellites et cartes météo en temps réel. Il faut savoir appréhender le temps de déplacement et la trajectoire des orages. Cela permet de bien se placer et de ne pas se faire de frayeurs.
Comment êtes-vous techniquement arrivé à capturer les éclairs ? Y a-t-il un matériel spécial ?
Ce n’est pas très compliqué. Il suffit d’appliquer l’exposition longue pour la photo de nuit. Je me mets habituellement à ouverture 6.3 pour commencer et ensuite j’ajuste si l’orage se rapproche, s’éloigne, ou si les impacts de foudre sont dans le rideau de pluie. J’applique une sensibilité de 100 iso et une exposition de 30 secondes renouvelée pendant la durée de l’orage.
Pour la photo de jour, j'utilise un détecteur d'éclair qui va déclencher l'appareil au moment de l'impact par cellule photo sensible. Il faut avoir un reflex ayant très peu de lag time (temps de latence).
Vous avez parcouru la France pendant 11 ans pour cette série. Saviez-vous dès le départ que ce projet allait durer si longtemps ?
La durée je m'en doutais, mais c'est surtout l'ampleur que ça a pris dans ma vie à laquelle je ne m’attendais pas. C'est une passion dévorante depuis que je l'ai transformée en métier. Depuis 2013, je suis missionné par Météorage, filiale de Météo France, pour faire des relevés scientifiques sur la foudre. J'y ai mis fin en 2017 pour des raisons économiques et de santé. Cette passion restera encore présente mais certainement moins qu'auparavant.
En raison des risques évidents liés à votre activité, avez-vous suivi des stages ou des formations préalables ?
Non, j'ai appris en tant autodidacte dans le domaine de la météo. En revanche, j’ai fait deux stages à Météo France pour me perfectionner. Mais c'est surtout d'être sur le terrain qui forme.
ORAGES ! © Xavier Delorme
Ne vous est-il jamais rien arrivé ?
Il ne m'est jamais rien arrivé de grave, mais j’ai quand même eu quelques frayeurs. En 2014 par exemple, par 5 ou 6 fois la foudre est venue à moins de 50 mètres de mon véhicule...
Le mieux, c'est de se placer à 10 km de l'orage, déjà vous êtes un peu plus en sécurité même si le risque zéro n'existe pas, et en plus vous êtes en dehors des précipitations.
La photo ou la météo : quelle passion vous a le plus motivé au départ pour réaliser cette série ?
C'est la photo maintenant, désormais je cherche toujours à composer l'image plus que le phénomène en lui-même.
Qu’est-ce que la subligraphie ? Et pourquoi avoir choisi des tirages Chromalux pour cette série ?
C'est un procédé d'impression sur plaque aluminium que j'ai utilisé pour mes tirages. Cela apporte une grande qualité à l'image et surtout une résistance aux agressions extérieures. J'ai choisi ce procédé car Sublipix a été partenaire de mon exposition « L'Homme face à l'orage » et m'a proposé des tirages de grand format assez inédits (150cm x 100cm) pour la photo d'orage ! Tout le monde est émerveillé face à ces images spectaculaires, mais cela reste difficile de trouver acquéreur.
Avez-vous un/des conseil(s) à donner à tous les chasseurs d’orages en herbe ?
Il faut d’abord photographier de chez soi ou les alentours pour d'abord maîtriser la technique de prise de vue. La foudre peut se montrer à différentes intensités et donc jouer sur le résultat de la photo. Une fois que l’on a bien compris les réglages, le plus difficile est de prévoir l’orage. Attention, la foudre est imprévisible et peut frapper n’importe où. Quand ça commence à être proche, mettez-vous à l’abri dans votre voiture ou chez vous !