Chapitre Henri Cartier-Bresson © Jean-Christophe BECHET
Chapitre Brassaï © Jean-Christophe BECHET
Jean-Christophe Béchet nous propose ici un historique de la photographie revisité ou du moins associé à sa pratique personnelle. Patience, on va vous expliquer. Le concept est simple : Influences est un recueil de 51 photographes parmi lesquels Gary Winogrand, Walker Evans, Brassaï, Henri Cartier-Bresson ou encore Henry Gruyaert et Sebastião Salgado. Le choix de la présentation de ces maîtres-influenceurs n'est pas un secret. Il s'agit d'un classement chronologique selon leurs dates de naissance. Ainsi, l'ouvrage s'ouvre avec Eugène Atget, le spécialiste du théâtre du crime, né en 1857 et se conclut avec l'archéologue urbain Stéphane Couturier né en 1957. La plupart d'entre eux sont des photographes spécialisés dans la photographie noir et blanc et sont des spécialistes de la street photography, du reportage ou encore du portrait.
Chaque influence est associée à deux textes : l'un est une brève biographie du photographe tandis que l'autre explicite comment le photographe a influencé le travail de Jean-Christophe Béchet. Influences recence les photos de Béchet prises entre 1985 et 2015. Si ses influences sont parfois contradictoires, elles sont toujours très bien documentées. En plus d'être bon photographe, Jean-Christophe Béchet est bon écrivain.
Chapitre Eugene Atget © Jean-Christophe BECHET
Chapitre Harry Gruyaert © Jean-Christophe BECHET
Petit tour d'horizons de ses influences juste pour mettre l'eau à la bouche...
Béchet nous explique par exemple que grâce à Cartier-Bresson, il a accepté de jouer le rôle du voyeur. Outre « l'instant T », il retient de lui sa maîtrise de la géométrie. Lorsqu'il a réalisé le « Portrait de l'écrivain », il a essayé de saisir le « silence intérieur » à la façon du maître.
Quant à Winogrand, il lui a « appris » à faire des cadrages spontanés, tel l'écrivain à processus, il photographie et réalise dans un second temps l'objet photographié. Il rappelle avec l'oeuvre de Winogrand que l' « on photographie d'abord avec sa personnalité et sa passion ».
« Je dois à Raymond Depardon une évolution dans mes cadrages. Son œuvre m'a incité à prendre du recul et à cadrer large afin de mieux intégrer la notion d'espace dans le paysage » : vous l'aurez compris, il améliore son cadrage grâce à Depardon.
Il déclare par ailleurs : « Aujourd'hui, si je ne devais revendiquer qu'une seule influence, décisive et globale, ce serait sans doute celle de Lee Friedlander et de ses cadrages exemplaires. »
Chapitre William Eggleston © Jean-Christophe BECHET
Chapitre Robert Frank © Jean-Christophe BECHET
En plus d'expliquer en quoi ces photographes ont influencé son œuvre, Jean-Cristophe Béchet dévoile des anecdotes oubliées. Il rappelle par exemple l'épisode de l'exposition posthume de Cartier-Bresson au MoMA... alors qu'il était pourtant bien vivant.
Au départ, l'ouvrage peut intriguer. On peut penser que son auteur manque de modestie à se comparer aux plus grands. Mais Influences est inévitablement un manuel utile pour le nouveau photographe que vous êtes. Plus qu'un ouvrage, il est un guide éclectique relevant à la fois de l'histoire de la photographie et du dictionnaire des grands concepts photographiques. Comme si cela ne suffisait pas, le livre relève également du récit autobiographie : Jean-Christophe Béchet se dévoile. Il nous révèle par exemple sa fascination pour les poteaux électriques - la tecnhique de Lee Friedlander lui a d'ailleurs été d'une aide précieuse pour les photographier. Ou encore, il partage avec nous le nom de son premier livre de chevet Paris de nuit (1933) de Brassaï : « Lorsque je suis venu habiter à Paris, en 1990, le souvenir de Brassaï m'a incité à explorer l'ambiance nocturne de la capitale. C'est en étudiant ses photographies que j'ai appris à maîtriser le pouvoir poétique des lumières électriques. »
Chapitre André Kertesz © Jean-Christophe BECHET
Chapitre Irving Penn © Jean-Christophe BECHET
Un petit regret tout de même. Peut-être aurait-il pu ajouter une photographie du « mentor » en face de la sienne, pour expliciter encore un peu plus ses influences ?
Enfin, et ce sera le mot de la fin, nous pouvons nous interroger : n'a-t-il donc pas eu d'influence(s) depuis 1957 ou plutôt depuis Stéphane Couturier ?
* Christian Caujolle, Anders Petersen, coll « Juste entre nous », André Frère Editions, 2013.
http://www.editionsdelamartiniere.fr/ouvrage/influences/9782732477367"
de Jean-Christophe Béchet
Editions de La Martinière
29 euros