Affiche De bruit et de fureur © Musée Bourdelle
Le budget conféré à l'artiste pour la construction de cette sculpture est de 13 000 francs, celui-ci atteindra finalement 50 000 francs. Antoine Bourdelle s'engagera toutefois à financer lui même les 37 000 francs restants.
C'est sur cet épisode en particulier que le musée Bourdelle de Paris expose, en partenariat avec le musée Ingres de Montauban, « De bruit et de fureur – Bourdelle sculpteur et photographe. » L'exposition se déconstruit en six sections retraçant la chronologie des évènements. La première relate les travaux, les croquis, les phases de préparation et d'élaboration du projet. Les tâches se répartissent entre l'atelier parisien de Bourdelle et la fonderie de Bruxelles. Le sculpteur aura beau faire de son mieux, il ignore qu'il y consacrera 7 longues années de travail.
Le voyage commence par une part d'érotisme s'accompagnant de dessins, de clichés et de moulures. La note romantique qui avait déplu aux membres du comité chargé du projet s'illustre par des corps qui se déstructurent, à travers la roche et l'image. Mais après l'amour vient le drame funéraire. Le socle du monument entend rappeler à ses détracteurs son dessein. Entremêlant le nom des disparus à celui du monument, cette oeuvre leur est dédiée.
Attribué à Antoine Bourdelle (1861-1929) - Bas-relief du socle du Monument des Combattants dans l’atelier de Bourdelle Vers 1902, Positif d’après négatif sur plaque de verre, 8,2 × 10,7 cm Paris, musée Bourdelle, MBPV.1099 © Musée Bourdelle / Roger Viollet
Vient alors la rage, celle qui peut rendre les hommes cruels, barbares. Des visages pétrifiés aux postures dramatiques des guerriers, le sculpteur joue avec la gestuelle difforme de ces hommes qui cherchent à s'accrocher à la vie.
Antoine Bourdelle (1861-1929)- Grand Guerrier, Étude avec jambe pour le Monument des Combattants 1898-1900, Bronze, épreuve d’artiste numéro 1 exécutée par Coubertin en 1990, 211 × 154 × 60 cm Paris, musée Bourdelle, MBBR.1593 © Musée Bourdelle / Roger Viollet / Stéphane Piera
En ce qui concerne son jeu de photographie, Bourdelle est changeant. Difficile de chercher une constance parmi les clichés, plus d'une centaine y sont exposés par le musée qui en répertorie pas moins de 15 000. Reste que deux corpus ressortent de ce travail photographique. D'abord son atelier parisien où le photographe se plait à mettre en scène ses pièces. À Bruxelles c'est un autre sujet qui s'incarne : la lumière naturelle se matérialise et les structures en plâtre se retrouvent marginalisées, ne servant que de support à la luminosité. Enfin, il y a ces portraits de Bourdelle où il se dresse aux côtés de son travail. N'y a-t-il pas pour l'époque une surreprésentation d'un artiste jusqu'alors inconnu ? Non, n'y voyez ici qu'un homme qui veut se rendre présent auprès de sa femme, enceinte et se trouvant loin de lui.
Attribué à Antoine Bourdelle (1861-1929) - Vue frontale du plâtre du Monument des Combattants, à Bruxelles,1901 Positif d’après négatif en nitrate de cellulose, 180 × 126 cm Paris, musée Bourdelle, MBPV.2068 © Musée Bourdelle / Roger Viollet
Attribué à Sacerdole - Bourdelle juché dans le plâtre du Monument des Combattant, 1901, Positif d’après négatif en nitrate de cellulose, 126 × 180 cm Paris, musée Bourdelle, MBPV.2009 © Musée Bourdelle/Roger Viollet
La réalisation de l'ouvrage s'achève par sa présentation publique. Paradoxalement, il ne reste pas grand chose de cet évènement : peu de photographies demeurent et Bourdelle s'est vu éclipsé, la faute sans doute aux membres du comité qui ne lui ont pas pardonné la complexité de son travail. Trop long, trop coûteux, un choix artistique ne faisant pas l'unanimité, ce n'est que grâce à la diffusion du monument que Bourdelle a connu une notoriété mais moindre que celle d'aujourd'hui.
L'exposition s'accompagne d'un court métrage réalisé par Olivier Dollinger. Baptisé « Les combattants », l'oeuvre vidéo offre une approche tragique du monument en prenant le temps de capturer chaque visage, chaque partie du corps humain de cette oeuvre si polymorphe.
Olivier Dollinger Les Combattants, 2016 Vidéo couleur HD, 11 minutes Paris, Musée Bourdelle © Olivier Dollinger
Pour en savoir plus, visitez le http://www.bourdelle.paris.fr/"