Jeudi 30 Juin 2016 17:17:53 par Annabelle Martella dans Livres Chroniques

«Quelles bizarreries ne trouve-t-on pas dans une grande ville, quand on sait se promener et regarder ?», écrit Baudelaire dans Le Spleen de Paris (Mademoiselle Bistouri). Alberto García-Alix, cet Espagnol considéré comme l'un des plus grands photographes contemporains, a erré tel un naufragé dans Valparaiso (Chili). Invité en résidence, durant l'été 2015, dans la ville portuaire, ce photographe aussi tatoué qu'un marin nous livre un carnet de voyage d'une sobriété touchante : Valparaiso aux éditions André Frère.

© Alberto García-Alix
 

Les maisons multicolores bien connues de la ville resteront en noir et blanc dans le livre d'Alberto García-Alix. Peut-être pour mieux mettre en valeur la brume du port, accentuée par le flou de certains clichés. L'atmosphère qui se dégage de ce journal de bord est très particulière. On y retrouve les commentaires des touristes déçus : «Beaucoup de rues sont mal entretenues et sales, il y a plein de chiens errants, la petite délinquance n'est pas négligeable, des odeurs de poisson pourri remontent souvent des calanques...» Pourtant, l'artiste hispanique reconstitue cette ambiance avec une certaine tendresse.

© Alberto García-Alix

Grâce à la succession des images, on devine la trajectoire d'Alberto García-Alix dans Valparaiso. Il semble simplement guidé par ses émotions et sa curiosité, photographiant les chiens, les oiseaux, les tags, les gens, les rues pentues... Avec son grand-angle, il se rapproche de ses modèles jusqu'à les toucher.

© Alberto García-Alix
 

Toujours fasciné par les marginaux et les blessés de la vie, ce photographe qui se considère comme «un éternel voyou», les saisit avec considération et sans provocation. La multitude des thèmes abordés, aussi différents soient-ils, sont toujours mis sur un même pied d'égalité, «tout cela sans jamais juger quoi que ce soit ou qui que ce soit, en prenant toujours garde à trouver, avec une liberté unique, la distance juste», explique Christian Caujolle.

© Alberto García-Alix

Les clichés d'Alberto García-Alix ont un format particulier : ce sont des carrés. Telles des vignettes, mais sans légendes, les photographies de l'Espagnol tentent d'énoncer quelque chose, comme cette main floue qui semble vouloir attraper un pélican (première photo du livre). Ce récit intime n'est bien sûr pas le même que celui d'Anders Petersen, photographe suédois également invité en résidence à Valparaiso.

© Alberto García-Alix

Les images d'Albert García-Alix ne sont pas que monstration, mais poésie urbaine et c'est cela qu'on aime.

© Alberto García-Alix











 

André Frère Éditions
To be released during the Festival Images Singulières in Sète (France)
€25