© Dean Chalkley
Qu'est-ce qui a inspiré ce dernier projet « Never Turn Back » ?
L'exposition est une ode à l'amitié. J'avais cette idée de photographier un groupe de personnes dans le comté de Norfolk. Cette région, avec ses paysages plats, son atmosphère brumeuse et venteuse, m'a toujours inspiré. J'ai rencontré un galeriste de là-bas, Conor O'Brian, avec lequel j'ai un ami commun. Je leur ai demandé s'ils connaissaient des gens intéressants à Norfolk. Et c'est comme ça que j'ai entendu parler de Chris, que j'ai rencontré, et qui m'a présenté ses amis. A Norfolk, on s'est promené en voiture, je les suivais pour les prendre en photo, sans forcément savoir où j'allais. Ce sont ces gens que l'on voit sur les photographies de mon exposition.
J'aimerais préciser qu'il n'y a eu aucun stylisme, ni maquillage, à part ceux que les personnes photographiées se sont fait elles-mêmes. Je voulais présenter ces personnes telles qu'elles sont.
D'où vient le titre de l'exposition « Never Turn Back » ( Ne Recule Jamais ) ?
J'ai demandé à une des filles de la bande, Aimée, d'écrire un poème. Elle est de la même famille qu'un écrivain plutôt connu des sixties, Alexander Trocchi. Ce qu'elle a écrit était tellement bien que j'ai nommé mon exposition d'après le titre d'un de ces poèmes.
© Dean Chalkley
Pourquoi avoir décidé de ne suivre qu'un seul groupe d'amis ?
J'ai choisi ces gens car ce groupe de personnes représente tout le monde. Quand vous regardez les photos, c'est comme si vous sentiez le vent souffler sur votre visage. On ressent ce sentiment universel d'amitié. Ce n'était donc pas la peine de photographier plusieurs groupe d'amis. Tout est dit dans ces photos.
Comment en êtes-vous arrivé à la photographie ?
A l'origine, je voulais être un créateur de mode. J'ai donc quitté l'école et déposé ma candidature dans une école d'art et j'ai été accepté. J'ai découvert la photographie à cette période et j'ai donc dû faire des choix. Cela a été celui de la photographie. Elle a pris le pas sur tout le reste. Cétait plutôt risqué, mais j'étais passionné et je le suis toujours à l'idée de créer des images, que ce soit par la photo ou par les films. Je suis venu à Londres, j'ai assisté plusieurs photographes, et puis je me suis mis à mon compte.
Vous êtes photographe, réalisateur, styliste, et également DJ, n'est-ce-pas difficile de passer de l'un à l'autre tout en gardant votre créativité ?
Je pense que de nos jours, le mieux, c'est d'avoir plusieurs casquettes. Je n'aime pas être cantonné à une seule activité. Il y a tellement de choses à explorer et il y a tellement de choses que j'aime faire. Si l'on est photographe ou réalisateur, on doit être créatif jusqu'à la fin de sa vie. On doit être fier de ce que l'on a réalisé pour pouvoir continuer à travailler. C'est très sain de pouvoir multiplier les supports dans le but de refléter ses différents centres d'intérêt.
© Dean Chalkley
Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui commence dans le milieu de la création ?
Je lui dirais que cela ne sera jamais facile. Certains jours, des gens vous demanderont si cela vaut le coup. Et la réponse est oui, cela vaut vraiment le coup. C'est tellement bien de créer des choses. Vous amenez la vie quelque part, vous montrez aux gens quelque chose de nouveau. Je pense que c'est quelque chose de merveilleux. Ce sentiment de création est tellement fort et a tellement de valeur. Quand on commence, cela peut être très dur, mais il faut s'accrocher et aussi écouter son coeur. Si vous voulez avoir une longue carrière, vous devez maintenir l'intérêt que vous portez à vos sujets. Autrement, si vous le faites juste pour l'argent, il vous sera difficile de rester passionné par ce que vous faites et c'est vraiment dommage.
Quelle est l'image que vous préferez parmi toutes celles que vous avez prises ? Y en a-t-il une ?
Ooooh, c'est une question difficile ! Il n'y en a pas vraiment une. J'ai fait beaucoup de photos dans l'univers de la musique, car c'est vraiment ma passion. J'adore cela et j'aime ce qu'elle apporte. Ce n'est pas juste des gens qui jouent des instruments, c'est bien plus que cela. La musique capture l'essence des émotions. On peut penser que certaines photos sont plus importantes que d'autres, ou qu'elles ont plus de significations quand on les voit en tant que simple spectateur. Mais en tant que personne qui prend les photos, quand je les vois, je ressens quelque chose de différent car je me souviens du moment où je les ai prises. Et c'est un sentiment bizarre, j'ai tellement de souvenirs qui vont avec mes photos. Mais si je devais dire quelle est ma photo préférée, je dirais que c'est la prochaine, celle que je n'ai pas encore prise.
© Dean Chalkley
Y a-t-il quelque chose ou quelqu'un que vous adoreriez photographier ?
Il y a une personne que j'aurais adoré photographier, mais malheureusement, il est mort. C'est Steeve Marriott, le leader du groupe The Small Faces, une sorte de héros pour moi. J'aurais aimé photographié David Bowie bien sûr.
Mais regardez, cette semaine, j'ai photographié cet homme, Billy Childish, un artiste brillant, un musicien et un écrivain. Il n'est pas très connu, il n'est pas populaire mais il a une énorme influence. Et rien que le fait de l'avoir rencontré a été quelque chose de génial. Je ne recherche pas forcément à photographier des gens célèbres. Je vois la beauté et la grandeur chez n'importe qui. On n'a pas à être connu pour être profondément intéressant. J'ai photographié plusieurs personnalités comme Justin Bieber, Paul McCartney, Liam et Noel Gallagher, Grace Jones. Mais quand je photographie les gens, je pense à eux en tant qu'individu, célèbre ou pas. Je veux apprendre à les connaître et à les montrer d'une manière nouvelle, grâce à la photo.
© Dean Chalkley
Qu'est-ce qui vous inspire ?
La culture Mod *a été très importante pour moi. Mais je pourrais aussi parler de ma mère et de mon père. Ils m'ont beaucoup inspiré car ils m'ont inculqué l'importance du travail. Ils m'ont appris à me dépasser, à ne jamais abandonner mes rêves et à prendre des risques. Beaucoup de photographes m'ont également influencé : Diane Airbus, Richard Avedon, David Sims ou Corinne Day. De nombreuses choses m'inspirent. Mes yeux sont toujours ouverts. J'accueille des influences de partout. Certaines rencontres m'inspirent aussi. En fait, tout m'inspire !
*La culture Mod est un phénomène quasi-strictement anglais apparu à la fin des années 50. Les mods étaient généralement de jeunes actifs urbains se caractérisant par un mode de vie festif et hédoniste, le souci de leur apparence vestimentaire et leur goût pour la musique et la danse.
http://superette.tv/" jusqu'au 30 septembre.
104 rue du Faubourg Poissonnière 75010 Paris