©Pascal Baril PlaneteBleueImages
L'art a une grande importance dans la vie de la photographe Alexandra Laffitte. D'abord adepte du dessin, elle a finalement choisi la photographie... pour notre plus grand bonheur. Tout juste diplômée de l'école l'EFET (École Française d'Enseignement Technique), cette jeune photographe, spécialisée dans le portrait, est la troisième lauréate du concours « Canson® Art School Awards ».
Êtes-vous heureuse d'être lauréate « Canson® Art School Awards » ?
Pour être honnête, je suis sur un petit nuage ! C'est une concrétisation de trois ans de travail à l'EFET. Cela me fait très plaisir et j’essaie d'en profiter un maximum.
Quels bénéfices en attendez-vous ?
Forcément pour le CV, cela rajoute une case en plus. Ce prix apporte aussi de la notoriété et plus de visibilité, chez des gens qui ont pu découvrir mon travail en dehors de l'école ou des publications que j'ai eues.
Vous avez fait partie des finalistes du concours Picto avec la série Ombrage, qu'est-ce que vous pouvez nous dire sur le maquillage de vos modèles et le temps de préparation ?
Cette série a été réalisée sur un mois et demi à raison de 4 à 5 heures de studio par semaine. Le maquillage noir est du fard, qui s'enlève sans problème à l'eau et aux lingettes. Il y a eu quand même deux heures de maquillage minimum pour arriver à cette qualité-là. Cela a été un travail technique et minutieux car j'ai adapté le maquillage en fonction de la morphologie des modèles.
Ombrage
©Alexandra Laffitte
Ombrage
©Alexandra Laffitte
Vous dites que vos photographies « révèlent la nature ambiguë de l'homme entre le bien et le mal à différents degrés », quels sont-ils ?
Les différents degrés sont en fonction des expérience que l'on a. Le noir représente la quantité de souffrance et d'échecs que nous avons tous eus à travers notre vie professionnelle, familiale, sentimentale, etc.
Lorsque l'on regarde vos photographies, on se rend compte qu'elles sont toutes prises en studio, qu'est-ce que cela vous apporte ?
J'adore la mise en scène et aboutir à ce genre de projet qui me ressemble beaucoup. Je suis tout simplement tombée amoureuse du studio !
Pour Ombrage, les postures de vos modèles ne sont pas du tout naturelles, tordues, sûrement inconfortables pour le modèle, pourquoi une telle tension ?
C'est vrai que j'ai mis le corps de mes modèles dans des positions qui ne sont pas naturelles pour avoir justement ce rapport sensible et percutant. Bon, les modèles n'ont pas souffert, ne vous inquiétez pas ! Ils ont pu respirer, on a fait des pauses. J'ai besoin de changer la vision du corps de tous les jours. Je joue avec la gestuelle, les mains, les bras, car je ne photographie que le haut du corps.
Pourquoi cette fascination pour le haut du corps ?
Il y a une mise en scène que l'on peut faire juste avec les mains et les bras, le dos, la tête, le cou... des choses que l'on peut seulement faire avec ces outils-là. On peut avoir un résultat complètement différent. C'est ce que j'aime faire : jouer avec cette esthétique, ce graphisme en faisant quelque chose d'assez épuré.
Ombrage
©Alexandra Laffitte
Ombrage
©Alexandra Laffitte
La quasi intégralité de vos modèles sont maquillés ou tatoués, pourquoi ?
La tatouage fait partie de mon univers. Je suis moi-même tatouée et beaucoup de mes amis sont tatoueurs. C'est de la faute du dessin car j'en faisais beaucoup étant petite, et le tatouage, l'impression sur le corps, la gravure me plaît énormément. Pour cette série, j'ai essayé d'avoir des gens tatoués comme des gens non tatoués, et d'aborder ce noir qui est lié au tatouage et aussi à cette forme graphique.
Le blanc a peu de place dans vos photographies, est-ce que vous préférez le noir ?
Oui (rire). En fait, je suis blanc ou noir et mon caractère est pareil, je ne fais pas les choses avec demi-mesure ! Même chose pour la photographie : soit je fais des photos en noir et blanc, soit je fais des photos désaturées.
Vos modèles ne regardent jamais l'objectif, sauf dans la série Atypique, pourquoi ce choix ?
J'accentue l'anormalité en déplaçant le regard dans la gestuelle. Je change, là encore, les habitudes. Dans Atypiques, composée en dyptique, il était essentiel que la personne me regarde une fois sur deux : il y a une photo ou le modèle me regarde et l'autre non.
Atypique
©Alexandra Laffitte
Dans une autre série, Anonymat, vous inversez encore une fois les normes en laissant le corps nu tandis que vous habillez le visage. Qu'est-ce que cet acte représente ?
Pour cette série, j'ai travaillé avec de jeunes étudiants de l'Atelier Chardon Savard et une styliste, Anastasia Bianca. Je voulais faire des mises en scène avec des pièces de tête, donc j'ai choisi celles qui sont représentées sur mon site, dont une ressemble un peu à Alien et d'autres plutôt à une madone avec des cornes. J'ai adapté la posture du modèle en fonction de la morphologie de la pièce de tête et de ce qu'elle pouvait représenter.
Anonymat
©Alexandra Laffitte
Pour revenir sur votre parcours, vous avez travaillé dans l'artisanat et notamment dans la décoration sur céramique.
Après avoir fait un cursus basique jusqu'en 3ème, je n'étais pas du tout douée pour les cours généraux donc je me suis dirigée vers la céramique. Quand j'ai eu mon bac pro, je me suis rendu compte que j'étais très loin d'être prête pour ouvrir un atelier donc je suis partie étudier les arts plastiques à Toulouse.
Est-ce que vous pensez que ce parcours vous a permis d'avoir un certain recul sur la photographie ?
Par rapport aux très jeunes photographes qui sortent de l'école, j'ai un bagage. J'ai travaillé dix ans dans un labo photo qui m'a permis de développer un contact commercial et d'avoir aussi une relation différente avec les adultes. Quand vous faites une reconversion dans une école photo, avec vos professeurs, ça aide !
Quel est votre prochain projet, maintenant que vous êtes sortie de l'école ?
Je fais toujours autant de démarches pour des magasines et des concours. Le « Canson® Art School Award » va me permettre de continuer d'exposer et de me faire de nouveaux contacts. C'est une chance énorme que je saisis avec les bras grands ouverts !