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Joanna Lipper, artiste au service du droit des femmes

Vendredi 05 Février 2016 15:50:45 par Caroline Bertolino dans Interviews

photograph of Joanna Lipper by Juliana Johnston
A la fois vidéaste, auteure et photographe, Joanna Lipper est une touche-à-tout. Sensible à de nombreuses causes sociales, elle s'intéresse plus particulièrement aux femmes. Dans le documentaire http://www.joannalipper.com/filmmaker/growing-fast (2004), Joanna évoquait la vie d'adolescentes enceintes au lycée. Plus récemment, avec http://www.joannalipper.com/filmmaker/growing-fast (2014), elle a retracé le parcours tumultueux de la Nigériane Hafsat Abiola, confrontée au défi de transformer une culture corrompue en une démocratie capable de servir la tranche de la population la plus marginalisée : les femmes. C'est lors de la réalisation de ce documentaire que Lipper a rencontré celle qui lui inspirera sa toute dernière série de photos : l'artiste et chef Nike Davies-Okundaye.

2010, Nigéria. L'idée de Joanna Lipper voit le jour. Alors qu'elle est en train de réaliser son documentaire, The Supreme Price, l'envie de photographier la chef Nike Davies-Okundaye est trop forte pour l'ignorer. Un bref échange d'e-mails, quelques photos présentées afin de convaincre la chef et le tour est joué. La photographe souhaite ajouter des portraits de Nike à son projet multimédia débuté en 2009 : http://www.joannalipper.com/filmmaker/growing-fast. Les deux femmes se rencontrent pour la première fois dans la galerie de la Chef à Lagos. Mais avant de la photographier, Joanna veut créer une vraie relation avec cette femme : « Avant de photographier Nike, j'ai filmé plusieurs entrevues. Au cours de ces entretiens, nous avons établi les bases de confiance et de collaboration. Le contenu de ces interviews a façonné ma façon d'aborder mes photos. »



Determination © Joanna Lipper - Courtesy of Gallery of African Art (GAFRA)
"Je me suis mariée à un homme qui avait quinze femmes et plus de soixante-deux enfants. Je suis parvenue à m'en sortir en faisant de la peinture à la main Adire et du tissage. J’ai travaillé. Personne ne m’a créée. Vous devez avoir de la détermination"
(Nike Davies-Okundaye, interviewée par Joanna Lipper)



 

Joanna Lipper commence alors une série de portraits, dans laquelle elle tente d'évoquer la vie de son modèle à travers les lieux qu'elle a connus. C'est pourquoi photographe et photographiée décident de se rendre dans le village d'Osogbo, là où se trouvent les différents endroits chers au cœur de Nike Davies-Okundaye. Ainsi, la maison de la chef, son centre d'art et le Bosquet sacré d'Osun deviennent les décors des clichés de Lipper : « En photographiant Nike dans ce bois sacré, je voulais éclairer la façon dont ses rêves ce sont réalisés, notamment dans ses multiples rôles d'artiste, d'entrepreneuse social, d'enseignante, de femme d'affaires et de mère. »

A travers cette série de portraits, Joanna Lipper éclaire l'engagement de Nike. C'est à l'âge de 20 ans que jeune femme commence à utiliser l'art comme moyen d'atteindre une certaine autonomie. Aujourd'hui, elle met sa pratique artistique au service des autres, en aidant et en fournissant un moyen d'émancipation financière à toutes les victimes du système patriarcal. Les femmes, mais aussi tous les opprimés, trouvent refuge et soutien au centre d'art de la chef. Ce sont ces changements positifs que Lipper aime mettre en avant dans ses photographies : « Je voulais que mes photos reflètent la façon dont Nike définit son statut. Non par le mariage ou par la lignée dont elle est issue, mais sur la base de ses propres réalisations artistiques, son identité professionnelle et son indépendance. » Pari réussi. Sur les clichés de Joanna, la chef paraît sereine, maître d'elle-même. Une véritable force de la nature.



Independent © Joanna Lipper - Courtesy of Gallery of African Art (GAFRA)
"Mon peuple a besoin de moi pour être un modèle. 
Je partage mes connaissances de l’art traditionnel avec des femmes qui n'ont pas de voix dans la société.
 Je leur transmets les mêmes connaissances qui m’ont rendu indépendante."
(Nike Davies-Okundaye, interviewée par Joanna Lipper)




Privileged © Joanna Lipper - Courtesy of Gallery of African Art (GAFRA)
"Autrefois je formais les femmes. La police m’a arrêtée plus de vingt fois. Ils m’ont enfermée dans une cellule et m’ont accusée de "pratiquer le féminisme américain au Nigeria." Je leur ai dit : « Non, je ne fais que la formation des femmes pour être auto-suffisante au Nigeria ". Ils disaient que je ne peux pas le faire à moins d’inclure les hommes. Je leur ai dit, "Je vais former des hommes qui sont moins privilégiés." Ade est haut de trois pieds. Ses parents voulaient le jeter dans la rivière.
 Donc Ade a couru vers moi et a dit, "Mama Nike, aide-moi." Maintenant il a trente-neuf ans. Il est marié. Il a travaillé dans le centre toutes ces années pour faire de l’art."
(Nike Davies-Okundaye, interviewée par Joanna Lipper)



 

Mais comme toute personne sortant du rang, Nike n'a pas que des amis. Plusieurs fois, les maris et les pères des femmes qu'elle aide sont venus la voir, la provoquer. Elle a été arrêtée plusieurs fois par la police nigériane. « Ces arrestations étaient de l'intimidation, à cause de ses idées progressistes sur l'autonomisation des femmes et de ses efforts en tant que militante des droits humains », explique Joanna Lipper. C'est pourquoi la photographe présente Nike comme une femme extrêmement forte, mais aussi comme une femme que l'on persécute. D'où cette sécurité rapprochée que l'on voit sur certaines photos.

Finalement, lorsqu'on demande à Joanna Lipper ce qu'elle espère transmettre à travers ces clichés, la réponse ne se fait pas attendre : « Je souhaite que mes photos permettent aux spectateurs de mieux appréhender le potentiel des femmes telle que Nike Davies-Okundaye. Elles initient le changement social de l'intérieur, tout en respectant et en intégrant les aspects traditionnels précieux de la culture de leur pays. Elles introduisent également un état d'esprit progressiste qui vient définir l'évolution du rôle des femmes. » Il est vrai que ces portraits questionnent la manière dont les femmes réussissent à identifier et à accéder à leur richesse et à leur force intérieures. Le travail de Lipper montre que chacune est capable de trouver l'inspiration dans sa propre vie. L'art n'est en fin de compte qu'un support pour les aider.


Power © Joanna Lipper - Courtesy of Gallery of African Art (GAFRA)
"Tant de fois les femmes sont trop puissantes pour la famille
, alors ils les accusent de mauvaises choses afin de les supprimer. Lorsque les femmes ont leur propre argent, elles ont une voix. Elles ont le pouvoir."
(Nike Davies-Okundaye, interviewée par Joanna Lipper)



A voir : http://www.joannalipper.com/filmmaker/growing-fast

Caroline Bertolino

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