© Hans Silvester
Grand reporter allemand, Silvester découvre la Camargue avant de s'installer pour de bon dans le village de Lioux (Vaucluse). Connu avant tout pour ses grands voyages documentés en Amérique du Sud ou en Afrique, où il part pour des missions humanitaires et anthropologiques, il revient avec son dernier ouvrage Pétanque et jeu provençal sur son premier amour : le sud-est de la France, avec ces photographies prises en 1976. Enrichi d'un texte d'Yvan Audouard, le livre est pourvu d'un description fouillée et vivante de la noble pétanque et de la ferveur qu'elle suscite.
© Hans Silvester
© Hans Silvester
© Hans Silvester
Agglutinés en cercle, vieux et moins vieux commentent avec passion les exploits de leurs compères. On s'exclame, on lève les mains au ciel en s'écriant « Peuchère ! ». On observe attentivement la trajectoire de la boule qui ne doit surtout pas rouler, mais tomber directement au plus prêt du but, appelé populairement le « cochonnet ». La pétanque est un duel entre deux équipes de deux ou trois personnes qui se joue jusqu'à ce que l'une d'elles atteigne 13 points. L'humiliation suprême revient à celui qui a « baisé Fanny », signifiant qu'il a perdu à 0 contre 13, l'obligeant alors à payer la tournée générale à l'assemblée.
Les clichés de Silvester font poindre l'art de la posture et du mouvement. Le geste est vif, précis et ample. L'oeil est alerte et le tir est prompt. À cet instant donné, le corps leste domine l'esprit en contention. La clope au bec et le béret parfaitement agencé, le joueur tire ou pointe. Le temps s'arrête alors que la boule plane. La latence est aérienne. Le regard plissé anticipe le point de chute.
Et là c'est l'apothéose ! Le délire ! « Il est beau ! Il est fatal ! » crie t-on à celui qui vient de qualifier son équipe aux « Provençales », l'immense concours international de pétanque, attirant chaque année plus de 6 000 participants à Marseille.
© Hans Silvester
Alors que le cours de l'été creuse son lit, on s'autorise des libertés et on laisse jouer les minots. Heureux comme des gardons, fiers de faire comme Papa, les enfants lancent les boules avec le même entrain que ceux qui tapent dans un ballon de football aujourd'hui. On découvre aussi dans ce recueil, au fil de l'Histoire, l'arrivée des pattes d'eph et des premières filles qui, portées par le vent désinvolte des années 1970, bravent l'informel interdit de pointer parmi les hommes.
Chacune de ces photographies, argentiques et monochromes, est un œil ouvert sur un vestige du passé, un éclat de vie, un moment baigné d'une candeur désuète.
© Hans Silvester
© Hans Silvester
Pétanque et jeu provençal
Hans Silvester
préfacé par Yvan Audouard
26 x 26
octobre 2015
144 pages
26,00 €
Éditions le Rouergue