Lundi 30 Novembre 2015 15:23:47 par Emilie Lemoine dans Carte Blanche

Claire Grumellon est l'heureuse gagnante de notre concours Carte Blanche. Қазақстан, sa série sur le Kazakhstan, a su nous séduire et nous plonger au cœur d'un pays méconnu. Sans folklore ni exotisme, elle a photographié ses jours passés là-bas. On a aimé son œil vif, nouveau, presque naïf.

Tout a commencé par une histoire de peinture à l'huile. Ce sont les premiers tâtonnements artistiques de la jeune Claire qui réalise rapidement que son manque de patience allait être un obstacle à une éventuelle carrière de peintre. Ce sera donc la photographie : « La découverte de l’argentique en première année de BTS a été le point de départ de ma pratique photographique d’aujourd’hui. »

Tant mieux. On n'est pas sûr que sa série Қазақстан nous aurait autant plu si elle avait été faite à la peinture à l'huile. En revanche avec son Rolleiflex 2,8E, Claire Grumellon a fait émerger de son périple kazakhstanais des images au grain brut et à la beauté discrète. « Je prends une photo seulement si je trouve qu’elle en vaut vraiment la peine, je ne me force pas à produire », avoue-t-elle. Ajoutez à cela une postproduction réduite au minimum (étalonnage) et vous pourrez apprécier comme il se doit son travail photographique.

Қазақстан © Claire Grumellon


Қазақстан © Claire Grumellon

L'idée de départ, c'était d'éviter le tourisme et d'aller explorer des lieux encore (un peu) inexplorés. Quoi de mieux que le Kazakhstan ? Quoi de plus méconnues que ces contrées d'Asie centrale dont tout le monde semble se moquer éperdument ? Indépendant depuis 1991, ce gigantesque pays est le fruit d'une histoire complexe, liée à la chute de l'URSS et à la Russie d'aujourd'hui dont il est resté très proche.

« Les représentations que l’on peut se faire de ce pays, à commencer par sa situation géographique, à mi-chemin entre la Russie et la Chine, mais aussi par sa superficie impressionnante (2 717 300 km2), sont très souvent erronées. Cet imaginaire collectif a été particulièrement nourri par le personnage de Sacha Baron Cohen, Borat, qui tourne au ridicule le Kazakhstan et sa population malgré l’attrait comique de cette œuvre », explique Claire Grumellon.
 
La photographe a donc pris les chemins de traverse. Elle a quitté Astana, la « froide et énigmatique » capitale, pour les steppes et les montagnes, plus lumineuses. Un peu plus de nature et moins de béton. Direction Almaty via le lac Balkach, le village de Lepsy, le canyon de Sharyn, les lacs de Kolsaï…

Қазақстан © Claire Grumellon


Қазақстан © Claire Grumellon
 

« L’accueil, comme souvent dans la culture musulmane, a été très chaleureux, je n’ai jamais rencontré plus grande hospitalité et générosité », confie Claire alors même que la communication a été parfois une véritable épreuve. Difficile de se comprendre quand on ne partage pas la même langue. Reste les gestes, les sourires, et les photos aussi : « J’ai d’ailleurs plus été prise en photo moi-même que pris des photos des gens, car, le Kazakhstan ne recevant pas beaucoup de « touristes », chaque rencontre s’est soldée par des photos souvenirs. » Le titre de la série en alphabet cyrillique vient rappeler cette difficulté de communiquer avec la population sur place, « un clin d’oeil aux nombreuses personnes qui ont fait l’effort de dialoguer avec moi malgré l’impossibilité d’utiliser les mots. »

Қазақстан © Claire Grumellon


Қазақстан © Claire Grumellon

 

Et le résultat est là. Sans triche. Des images simples et insolites d'habitants, de Mercedes Benz ou de mouton égaré, le tout baignant dans une douce clarté. Claire Grumellon a montré le Kazakhstan tel qu'elle l'a découvert et tel qu'elle l'a aimé surtout : « La solitude y est paisible, ses âmes peu nombreuses, sincères et accueillantes. » Elle veut d'ailleurs vite y retourner. Il lui reste encore tellement de choses à voir, notamment le centre spatial russe de Baïkonour ou le polygone nucléaire de Semipalatinsk « qui met en danger nombre de la population kazakh sous l’oeil indifférent du gouvernement... »

On a sincèrement hâte de voir là où son Rolleiflex la mènera...