Pirelli, The Cal, 50 years and more, TASCHEN
La famille Pirelli aura traversé le siècle en laissant sa marque dans de nombreux domaines. En 1919, lors des négociations de Versailles qui scellent les conditions de la paix en Europe, Alberto Pirelli est conseiller économique. En 1908, cet amateur d'art et mécène éclairé avait été le premier italien à voyager en avion. Son fils aîné, Giovanni, devient écrivain puis officier partisan (opposé au régime fasciste) pendant la Seconde Guerre Mondiale, et c'est son cadet Leopoldo qui reprend les rênes de la firme en 1965. Le calendrier que la branche marketing décide de faire paraître annuellement sera l'une des contributions les plus marquantes de la famille au « patrimoine culturel » de la seconde moitié du XXe siècle.
Taschen publie aujourd'hui une compilation des meilleures photographies de chaque édition, depuis 1964. Un objet précieux, puisqu'il décrit l'évolution des canons esthétiques sur plus d'un demi siècle. Au fil des pages, les jupes raccourcissent et les maillots de bain deviennent moulants, quand ils ne disparaissent pas tout simplement... De l'avis de l'acteur britannique David Niven, « Pirelli donnait une forme à nos rêves, et une fois que nous avions vu les images, nous savions que les standards avaient été établis pour un bon moment, et peut-être pour toute une vie. »
Le volume relate également de nombreuses anecdotes sur les photographes et séances annuelles de pose pour le calendrier. On y apprend par exemple qu'en 1986, les clichés noir et blanc de Helmut Newton furent jugés trop intemporels, et laissés de côté au profit de ceux d'un Bert Stern beaucoup plus préoccupé d'incarner l'esprit pop et coloré des Eighties. On y retrouve aussi une reproduction de la seule photographie jamais censurée par le comité Pirelli, prise par Brian Duffy en 1973, et qui représente une boule de glace dégoulinant sur la poitrine décolletée d'une jeune-femme.
Inutile de cacher que selon les années et les photographes, les réalisations sont très inégales. Mais on mesure d'autant mieux la qualité exceptionnelle des nus d'un Richard Avedon ou d'une Annie Leibovitz au milieu d'une multitude de photos glamour et bon-enfant, type pub H&M, d'un goût parfois douteux. Voilà donc un livre qui a le double mérite d'être un ouvrage collector pour les amateurs de photo érotique, un document d'archive pour les historiens du corps et un ouvrage de recherche pour les gender studies.
Pirelli, The Cal, 50 years and more
TASCHEN
Edition multilingue
49,99 €