© Guillaume Chauvin
Jeune artiste français, c'est en photographe curieux et avide de découvertes que Guillaume Chauvin a entamé ses pérégrinations russes. Loin de chercher les clichés de vents froids et de vodkas avalées à la va-vite, il a à l'inverse côtoyé de près une vie qui est devenue sienne. « Après avoir fait un Erasmus en Lettonie, j'ai eu un premier contact avec la culture russe, bien particulière dans cette zone balte... J'y fus néanmoins perméable. Après être ensuite allé en Russie et m'y être senti à l'aise, j'ai donc voulu en rapporter, dans la mesure du possible, une vision différente de celle que nous proposaient habituellement les médias occidentaux – misère, alcoolisme, neige, pétasses ou grosses grands-mères... Même si bon, ces caricatures existent aussi... J'ai donc proposé ce projet à différentes bourses et concours, en vain ; seuls le Ceaac et ma banque m'ont encouragé et soutenus. J'ai pu partir une année en Russie, d'abord entre Tioumen et Irkoutsk, puis à Moscou et sa région. »
© Guillaume Chauvin
© Guillaume Chauvin
Un an lui a été nécessaire pour réaliser des photographies esthétiquement brillantes, mais surtout abouties d'un point de vue documentaire. Ainsi, les images de Guillaume Chauvin creusent un mode de vie, une culture, tâchant, avant tout, de comprendre. Ici, le froid, certes, mais la vie surtout. Lorsqu'on lui demande pourquoi la Russie, le photographe répond sans hésiter : « Parce qu'il n'est pas partagé ! L'Afrique aurait aussi pu être une destination exotique, mais impossible d'y passer inaperçu... La Russie était aussi une terre de fantasme depuis mon enfance, à feuilleter des livres de contes ou sur Stalingrad... De ce pays venait les films ou les musiques qui me bouleversaient le plus, et la plupart des russes que j'avais rencontré jusqu'ici m'avaient tous positivement marqué et intrigué. Sans oublier que c'était aussi le pays dont les méchants venaient dans James Bond, et mon rêve à une époque était de parler anglais avec l'accent russe... Enfin, ce pays et la vie qui semblait s'y dérouler me faisait un peu peur. Il fallait donc aller vérifier tout cela « en vrai ». »
© Guillaume Chauvin
© Guillaume Chauvin
Le vie Russe expose le regard objectif d'un photographe humble et passionné. La Russie lui a montré ses multiples facettes, des plus évidentes au plus délicates. Mais elle l'a aussi fasciné « Ce qui me fascine en général, ce que je ne comprends pas ou ce dont on cherche à me dissuader : les lieux de pouvoir, de science, les institutions militaires et civiles, les filles, etc... En Russie, c'était l'incroyable capacité des gens à vivre dans certaines conditions que nous jugeons intolérables, et le fossé entre nos conceptions et la réalité. La compatibilité des paradoxes aussi. Rien que notre culture ne puisse appréhender ! Et enfin, la grande confiance dont j'ai toujours pu bénéficier sur place, ce qui n'est pas le cas en France, où le quotidien ne peut se défaire de la crainte des autres, l'abolition de l'enthousiasme, et d'entraves administratives sans fin... » Mais ce qui l'a le plus marqué, c'est la facilité avec laquelle il a pu échangé avec les personnes rencontrées, « cette confiance que me faisaient les russes rencontrés, inconnus et amis. Il y avait certes cette « exceptionnalité » réciproque qui oriente nos regards respectifs, mais bon. Ça m'a beaucoup marqué. Ce n'est certes pas propre qu'à cette zone du monde, mais à ce moment de ma vie, ça m'a ému. Le plus marquant en fait, ce fut le retour en France. Les premiers mètres dans le RER... »
© Guillaume Chauvin
© Guillaume Chauvin
Le vie Russe est une véritable déclaration d'amour à un pays adopté par Guillaume Chauvin, un coup de foudre difficile à expliciter, mais que les images retranscrivent avec force et authenticité. Son image la plus marquante ? Celle du picnic hivernal des jeunes filles dans la neige. « Elle est marquante parce que je ne comprends pas cette image, je suis le premier surpris par le résultat.. Et aussi pour les avis qu'elle a pu susciter. Presque tout mon entourage « occidental » y a vu une scène glauque, froide, frôlant l'absurde, alors que ce moment fut pour moi l'un des plus heureux, un casse-croûte improvisé en fin de ballade avec des amies, un soir avant de rentrer en train. Un plaisir spontané. Une scène d'été en hiver. Pour nous inconcevable, et pour des russes, banal ! Ce sentiment se retrouve sur d'autres images, considérées comme glauques, alors que non. Quand on y est, dans le moment, avec les gens, ça ne l'est pas du tout. Je ne sais d'ailleurs pas comment exprimer cette joie par l'image. Le contenu visuel prend toujours le dessus... »
© Guillaume Chauvin
Guillaume Chauvin a concentré ses images dans un ouvrage de qualité (http://actuphoto.com/27861--le-vie-russe-une-chronique-siberienne-mordante-par-guillaume-chauvin.html") Une couverture « rose , parce que ça ne ressemblait pas, à première vue, à la Sibérie... » à découvrir sans plus tarder, en attendant la suite avec impatience....
http://actuphoto.com/27861--le-vie-russe-une-chronique-siberienne-mordante-par-guillaume-chauvin.html"
Claire Mayer