Boy in a boxing ring during a break of the fight © Sandra Hoyn / laif
Sandra Hoyn est une photographe allemande, née en 1976 à Wolfenbüttel. Elle a étudié la photographie à l'université des Sciences appliquées d'Hambourg, en est sortie diplômée en 2005.
Elle développe son intérêt pour la photographie il y a 10 ans, lorsqu'elle commence à voyager. En sillonnant le monde, elle cherche à se rapprocher des populations locales et de vivre avec eux. Elle s'intéresse aux gens, leurs sentiments, leur vie quotidienne.
Son reportage « Die Kampfkinder » (les enfants boxeurs) présente des photographies exclusivement en noir et blanc, d'enfants thaïlandais initiés très tôt à la boxe, dans le but de devenir champions et de faire la fortune de leurs parents. Des photographies esthétiquement prodigieuses, dont le sujet laisse muet.
Entretien avec Sandra Hoyn, une jeune photographe qui n'a pas fini de surprendre.
Boy in a boxing ring during a break of the fight © Sandra Hoyn / laif
A boy has lost the boxing match and is lying unconscious on the ground © Sandra Hoyn / laif
Pourquoi la photographie ?
Je travaille principalement sur des reportages concentrés sur des problèmes sociaux et les droits humains. Mes photographies documentent les conditions des gens et les montrent dans leur environnement. Je sais que la photographie ne peut pas complètement changer le monde, mais je veux informer le public avec mes images, montrer ce qu'il se passe dans le monde.
Pouvez-vous expliquer le sujet de « Die Kampfkinder » ? Comment avez-vous entendu parler du sujet, et pourquoi avez-vous décidé de le traiter ?
En 2011, j'étais en vacances en Thailande et observais par hasard une compétition de Muay Thai dans une arène près de Bangkok. Le Muay Thai est l'un des arts martiaux les plus durs du monde. Les boxeurs souffrent fréquemment de fractures, de chocs et de blessures permanentes dues aux combats. J'ai vu des petits garçons de 6 ans se battre et j'ai été stupéfaite par leur jeune âge. Cela n'avait pas été montré dans les médias avant, donc j'ai décidé de faire un photoreportage sur le sujet.
Boy with a trophy after he has won the boxing match © Sandra Hoyn / laif
Family members watching a boxing match © Sandra Hoyn / laif
Comment avez-vous organisé votre reportage ? Combien de temps et où avez-vous pris ces images ?
J'ai tout organisé seule. D'habitude, je travaille sur mes propres projets et ne dépends pas des magazines. Donc je peux choisir les sujets photographiques qui m'intéressent et prendre le temps d'entrer en profondeur dans une histoire. Puis je présente ces sujets aux magazines.
Après avoir vu la compétition de Muay Thai, j'ai essayé d'établir des contacts avec les coachs et les enfants, ce qui a été difficile à faire au début, car très peu parlaient anglais. Pendant 4 semaines, j'ai suivi les enfants chez eux, pendant les entraînements et les compétitions.
Qu'est-ce qui a été le plus difficile à réaliser ?
La plupart du temps, j'ai un contact facile avec les locaux. Mais parfois, il est difficile de garder la distance journalistique. Avec beaucoup de protagonistes de mes histoires, je développe une amitié. Donc d'un côté c'est une bonne chose pour l'histoire d'être proche des gens, d'un autre côté il est difficile de rester neutre et de rappeler aux gens et à moi-même que je ne suis pas juste une amie, mais aussi une photojournaliste.
Girl, 6 years, in a boxing ring © Sandra Hoyn / laif
Girl, 6 years, after she has won a boxing match © Sandra Hoyn / laif
Qu'est-ce qui vous a le plus surpris ?
J'ai été surprise par le jeune âge des enfants. Mais en Thailande ces enfants boxeurs ne sont pas inhabituels. C'est commun pour des enfants de commencer la boxe à l'âge de 6 ou 7 ans. Ils appartiennent à des familles pauvres, beaucoup de boxeurs espèrent que la boxe thaï sera un moyen de sortir de la pauvreté. Pour cela les parents envoient leurs enfants réaliser des entraînements professionnels dès leur plus jeune âge. Chacun de ces enfants boxeurs cherchera à être récompensé par la gloire ou l'argent. Le moindre boxeur idéalisera le fait d'être champion de boxe et de gagner beaucoup d'argent en tant que boxeur professionnel. D'habitude, vers le milieu de leurs vingts ans, leur carrière s'achève et les boxeurs de Muay Thai se retirent.
Pourquoi avez-vous décidé de faire ce reportage exclusivement en noir et blanc ?
Normalement, je préfère les photos en couleurs, elles sont plus faciles à réaliser. Prises séparément, les images de la série sont plus réussies en couleur, mais le noir et blanc donne une homogénéité à la série, car l'environnement coloré distrait des expressions faciales des enfants.
The coach binds a boy the boxing gloves © Sandra Hoyn / laif
A boy is making exercise. In the front the trainer is drinking whiskey with his friends and the father of the boy © Sandra Hoyn / laif
Avez-vous des projets à venir ?
Je suis allée de décembre 2012 à janvier 2013 en Thaïlande et Cambodge. Là-bas, j'ai travaillé sur un photoreportage sur le trafic d'êtres humains. Lors de mes voyages en Asie j'ai rencontré beaucoup de gens qui vivaient dans ces conditions, c'est pourquoi j'ai commencé ce documentaire. La prochaine étape sera de montrer que le trafic d'êtres humains n'est pas un problème du continent asiatique, mais un problème global. L'achat et la vente d'êtres humains est un business criminel qui s'accroît dans le monde. Je vais continuer ce sujet en Europe.
Le travail de Sandra Hoyn est à retrouver ici : http://www.sandrahoyn.de/">http://www.sandrahoyn.de/
Propos recueillis par Claire Mayer