Simon Procter et son assistante Juliette Bates en pleine séance de shooting à Deauville © Claire Mayer
Simon Procter est né en 1968 à Lancashire, dans le nord de l'Angleterre. Après des études d'art dans son pays d'origine, il se lance dans la photographie de mode. Il aime l'effervescence des défilés, le chaos organisé qu'il y règne. Mais ici, en commande de la Mairie de Deauville, Simon Procter est loin des tapis rouges et des podiums. Il s'est plutôt immiscé dans la vie exceptionnelle des champs de courses et de l'univers équestre, pour réaliser des clichés étonnants.
Entretien avec un photographe qui a découvert seul la photographie, et qui y a désormais sa place.
Comment avez-vous débuté la photographie ?
Il y a huit ans, avec de petits appareils, de 2 mégapixels à peu près. J'ai rencontré à cette époque un américain à Paris qui m'a aidé. Il était le fondateur d'un grand magazine américain de mode, et c'est lui qui m'a plongé dans le milieu de la photo de mode.
J'ai commencé à shooter des défilés, et j'ai trouvé ça incroyable, il y a une véritable intensité. Mon regard était à l'époque très innocent car c'était un milieu très obscur pour moi !
Suite à cela, j'a été sollicité pour couvrir beaucoup de défilés...
Y-a-y-t-il un photographe qui vous inspire ?
Avedon, Newton évidemment. Mais il n'y a pas que des photographes qui m'inspirent dans ma carrière : la musique, les films, la peinture sont tout autant de moteurs qui participent à la création chez moi.
J'ai fait les Beaux-Arts, donc j'ai eu une formation pluridisciplinaire qui m'aide beaucoup. Ce qui est intéressant, c'est de créer une image à partir de rien. La photographie est magique, elle offre l'opportunité de construire quelque chose à partir de 0.
Il y a peu avait lieu au grand palais une grande rétrospective sur Helmut Newton. Pensez-vous que la photo de mode soit démodée ? Que les photographes de mode actuels ne prennent plus de risques contrairement à ce que faisait Newton ?
Techniquement, c'est beaucoup plus difficile, avec le numérique. Mais je suis sûr qu'il y a encore des photographes qui font des clichés extraordinaires, mais peut-être que l'on en parle moins qu'à l'époque de Newton ?
Newton faisait du grand art, et des photographes de son acabit n'existent pas toujours mais ça arrive !
A l'heure du numérique, tout va beaucoup plus vite, on voit les images défiler à une vitesse qui nous fait sûrement passer à côté de chefs-d'oeuvre …
Le problème qui est réel actuellement, c'est que les gens ont perdus la manière de comprendre esthétiquement le monde.
Pouvez-vous nous expliquer votre venue à Deauville, au milieu de ces jeunes photographes en résidence ?
Patrick Rémy, directeur artistique du festival, m'a proposé de me joindre au projet. Je suis connu pour être photographe de mode mais aussi de chevaux. En Angleterre, je suis célèbre pour faire des images équestres. J'aime le mélange entre la mode et les chevaux.
Chaque fois c'est une opportunité de lier les deux, et pourquoi pas !
Ici, je cherche à capturer l'essence de l'hippodrome. Deauville représente vraiment l'univers hippique, donc c'est mon regard sur la ville que je porte ici en prenant ces clichés de chevaux.
C'est la première fois que vous venez à Deauville ?
Non, nous sommes venus plusieurs fois avec mon assistante (Juliette Bates qui a remporté dernièrement le concours UPP découverte 2012 et qui expose à la Maison des photographes NDLR) pour repérer les lieux. C'est la quatrième fois que nous venons, il y a beaucoup de préparation, nous parlons avec les gens ect...
D'habitude, sur les défilés, je travaille avec 50 personnes, ici l'équipe est réduite, et c'est vraiment une autre façon de travailler, très intéressante.
Comment s'organise votre projet à Deauville ?
La plupart du projet s'organise aujourd'hui, mais c'est jamais vraiment fini, quand on travaille en extérieur, la lumière change tout le temps, cela n'a rien à voir avec une séance de shooting en studio où tout est minuté, organisé. Ici, à Deauville, c'est une série pour laquelle il faut être prêt tout le temps : peut-être y-a-t-il une nouvelle idée, on discute avec les gens, ce qui envoie vers d'autres choses ect.
Quel est votre rôle auprès des étudiants en résidence ?
Quand je suis venu pour faire mon repérage, je les ai rencontré, et nous avons pu discuter. J'adore mon métier, j'ai étudié aux beaux-arts et j'aime parler d'art, des images. J'adore parler avec les gens, s'ils ont besoin d'aide je les aiderai avec plaisir, mais c'est plus un échange avec eux, sur le métier, sur la photographie en général.
Vous avez d'autres projets en cours ?
Oui, j'arrête pas de bouger tout le temps ! Là je vais quitter la France 6 fois dans les trois semaines à venir ! Je suis entre les demandes des images pour les Beaux-Arts et pour la mode, donc les deux me prennent beaucoup de temps. J'ai la chance d'être en contact avec des agences à Londres, New York, Paris... Cela m'aide beaucoup, me permet de bouger tout le temps, et d'avoir accès à beaucoup de diversité, ce qui est très intéressant.
Que pensez-vous du concours organisé par Planche(s) Contact pour les jeunes photographes en résidence ?
Quand on est jeune, le plus grand problème c'est de penser par les autres. Ce qui compte c'est d'être animé par la passion. Il faut savoir ce que l'on veut vraiment. Quand on est jeune, c'est difficile de savoir ce que l'on veut vraiment, parce que l'on est hésitant, et qu'on a tendance à être guidé par des normes. Il faut oublier cela et se faire guider par sa passion, réellement.
Propos recueillis par Claire Mayer