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Entretien réalisé par Thierry Laugée pour Actuphoto.com laugee@actuphoto.com Changement d'époque, changement de monde, changement de technologie chez Alain Delorme, récent lauréat du Prix Arcimboldo. « Alain Delorme est un jeune artiste français issu d'une génération de photographes qui, à l'instar du couple Aziz+Cucher ou de Inez Van Lamsweerde, utilise l'outil informatique dans une logique de mutation et d'hybridation des corps. Son œuvre est une critique acerbe de l'utilisation de l'image des enfants, en particulier des petites filles, soumises au diktat publicitaire faisant d'elles des objets de consommation utiles aux lois du marché © Alain Delorme - Angèle - Little dolls Inspirée de l'esthétique publicitaire, la série Little Dolls porte un regard à la fois ironique et inquiétant sur l'identification des jeunes filles aux stéréotypes féminins occidentaux, dont la poupée Barbie, depuis plus de soixante ans, est devenue l'icône commerciale. Véritable incarnation des fantasmes de la société de consommation contemporaine, jouet médiatique et planétaire, Barbie est aujourd'hui la poupée la plus vendue au monde et, par conséquent, un des principaux objets de projection identitaire des petites filles. Aux Etats-Unis, les "Miss beauty Children", concours de beauté pour enfants et adolescents, sont à l'image de ce phénomène. Lors de grandes cérémonies médiatiques, soutenues ou contraintes par leurs mères, des jeunes ou très jeunes filles défilent, maquillées, coiffées comme des poupées, devant en adopter les tenues, les robes, les mimiques, les traits. Le "modèle Barbie" devient alors l'avatar d'une société qui, en faisant d'une poupée de plastique le symbole d'une féminité, distingue de moins en moins le faux-semblant de la réalité... Dans les images d'Alain Delorme, le mélange entre jeunesse innocente et objet commercial, dénonce la standardisation et l'assujettissement des corps, des sourires, des regards. Peaux lisses, sourires et attitudes forcées sont contraints par une main toujours présente. À la fois fillettes, femmes et poupées, les Little Dolls ouvrent la voie à un futur possible et inquiétant où l'enfant, au prix de transformations plastiques, risque de devenir un véritable objet, maniable et transformable à souhait. » Jordi Gourbeix