Lundi 10 Octobre 2016 17:20:49 par Hugues Garnier dans Expositions Chroniques

MMM. Trois lettres, deux artistes, une rencontre. L'un est photographe, l'autre est musicien. Chacun vient ici explorer l'univers de l'autre, mais les deux ne sont pas si différents. Matthieu Chedid a toujours eu un attrait pour l'image : son personnage -M- qui l'accompagne sur scène depuis près de 20 ans en est la parfaite illustration. La dérision, on la retrouve bien sûr chez Martin Parr. Lui en revanche confie à Chedid n'avoir « jamais rêvé d'être une rockstar ».

Ce n'est pas la première de MMM, les deux artistes avaient déjà présenté leur réalisation dans l'église des Frères Prêcheurs lors des Rencontres d'Arles en 2015. Sam Stourdzé, son directeur, nous assure toutefois être en face d'une toute nouvelle version de l'exposition. L'idée pour lui était de « décloisonner la photographie et créer un dialogue avec la musique », il fallait jouer avec l'univers de Martin Parr en tentant de varier les formes possibles d'exposition de ses photos pour qu'elles s'accordent avec la musique de l'artiste français.

Liverpool, England, 1998 © Martin Parr / Magnum Photos
 

D'un côté il y a une composition d'une vingtaine de minutes environ élaborée par Matthieu Chedid. De l'autre près de 450 photos, dont certaines inédites, dévoilées par Martin Parr. Ajoutez à cela une scénographie maîtrisée et vous voilà face à un panel d'environnements qui associent la musique à l'image. À chaque espace son instrument : guzheng, guitare électrique, percussions, célesta... Chacun reflète une ambiance, une humeur que souhaitent nous faire découvrir et partager les deux exposants. Le synthétiseur « reflète ici le mauvais goût de Martin » d'après Chedid alors que le piano incarne la touche classique du travail du photographe, ses clichés en noir et blanc nous transportant dans une autre époque où la satire n'a pas sa place.

Mayor of Todmorden's inaugural banquet, Todmorden, West Yorkshire, England, 1977 © Martin Parr / Magnum Photos

À chaque instrument sa place au sein de la galerie où plusieurs transats sont installés, comme un rappel pour nous qui sommes en plein voyage vers la dérision. Les percussions viennent frapper le sol et nos pieds avec. Le synthétiseur produit un brouhaha venant s'ajouter aux clichés traitant du tourisme de masse que Parr juge « plein de contradictions ». La guitare sèche accompagne une scène de vie nous semblant des plus joviales tandis que l'électrique vient se mêler aux objets électroniques... Une multitude d'atmosphères prenant ainsi vie grâce à une symphonie magistralement décomposée.

Clare College May Ball, Cambridge, England, 2005 © Martin Parr / Magnum Photos

Le voyage s'achève par une interview de Martin Parr par Matthieu Chedid. Entre goûts et identité, on en apprend plus sur ce personnage si atypique pour qui l'humour est d'une importance capitale. On se gardera toutefois de vous en dire plus au risque de gâcher votre écoute.

Que faut-il retenir de cette collaboration ? Qu'elle fonctionne ! Les deux artistes nous offrent là une une expérience originale, immersive mais surtout détendue. Un voyage assurément fort en émotion.

L'exposition se tient à la Cité de la Musique (Philharmonie de Paris) du 4 octobre 2016 au 29 janvier 2017.