© Kenneth Graves
C'est sur une période de transition, les sixties et les seventies, que ce livre se concentre. Une période de manifestations, d'affrontements, mais aussi de flower power. Les cadrages dynamiques de Kenneth Graves donnent une certaine théâtralité à de nombreuses photos qui semblent parfois tout droit sorties d'une comédie américaine.
© Kenneth Graves
Au travers de ces clichés, c'est la vie au jour le jour qui est montrée et illustrée. Devant l'appareil du photographe se succèdent accidents heureux, épisodes improbables et clins d'oeil amusants. L'irruption de l'inattendu et de l'étrange sont au coeur même de son travail. Le rêve américain n'existe plus, il a disparu dans la quotidienneté de la réalité. Car c'est depuis la marge que Ken Graves regarde la société. Il s'intéresse aux petites gens, à l'étrangeté qui peut apparaître dans leur vie et les montre tel quel, sans artifice.
Le pathos fait aussi partie de son univers. Idéalisme et déclin, rêve américain et dure réalité, toutes ces composantes s'affrontent dans ses photos qui capturent des scènes souvent insolites. Les corps sont souvent coupés, il manque une tête ici, le bas du corps là. Ou bien ils se retrouvent dans des positions parfois étranges, comme cette homme qui se retrouve parallèle au sol, à plusieurs mètres de hauteur sur une scène de spectacle.
© Kenneth Graves
Graves est né à Portland, dans l'Oregon, en pleine guerre mondiale, en 1942. Il a servi dans la Marine de 1962 à 1966. A sa sortie, il sait qu'il deviendra artiste. Il entre alors au San Francisco Art Institute, à une époque où les manifestations, notamment contre la guerre du Vietnam, font rage aux Etats-Unis. La baie de San Francisco accueille alors les membres de la Beat Generation et les hippies de Haight-Ashbury. Kenneth Graves est alors témoin du Free Speech Movement à Berkeley et de la grève de l'Université d'État de San Francisco. C'est aussi l'époque où la population afro-américaine se soulève dans certains Etats pour protester contre le racisme présent dans la société de l'époque.
© Kenneth Graves
C'est après son inscription au Art Institute de San Fransisco qu'il découvre la photographie. Ce qu'il aime dans cet art ? Ce qu'il appelle « l'élément de surprise ». Cet inattendu qui surgit au bon moment pour que la bonne photo soit prise.
Pour faire ses photos, Ken Graves marche dans les rues de San Francisco, va à des foires de comté, des spectacles aériens, à la recherche de la petite chose qui pourrait être l'objet d'une bonne photo. Et cette petite chose, il l'a trouve souvent. L'appareil photo devient alors un outil servant à faire surgir le surréalisme du quotidien.
L'amour de la bizarrerie est donc ici bien montré dans ce petit ouvrage, lui-même singulier. Les photos sont soit présentées par deux, horizontalement l'une sur l'autre, soit toutes seules, verticalement. Design inhabituel qui rajoute à l'étrangeté des images.
Deux textes accompagnent l'oeuvre de Kenneth Graves. Une courte étude du travail du photographe, signée Sandra Philips, du musée d'Art moderne de San Francisco, et un calendrier détaillé qui s'étale de 1963 à 1974, l'époque à laquelle furent prises ces photos.
© Kenneth Graves
http://mackbooks.co.uk/books/1072-.html"
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