© Massimo Berruti, Prix Photo AFD/Polka
En 2014, Massimo Berruti a remporté le grand prix AFD /Polka du meilleur projet de reportage photo pour « Drops. Water crisis in Gaza and the West Bank ». Du 12 novembre au 17 janvier, la MEP ouvre les portes au jeune photo-reporter, dans le cadre de la première biennale du monde arabe contemporain. Ses photographies, criantes de vérité, nous ont touchés par leur justesse et leur beauté, malgré un sujet dur et délicat à aborder.
© Massimo Berruti, Prix Photo AFD/Polka
Au coeur de l'actualité
Les photographies exposées dans « Gaza : Eau miracle » sont très actuelles et constituent un témoignage important sur une situtation complexe. Au Moyen-Orient, l'eau se fait de plus en plus rare. Beaucoup de personnes sont privées d'eau potable. Et les nombreux conflits qui sévissent dans cette zone sensible n'arrangent rien. Au mois de juillet 2014, l'offensive militaire israélienne « Protective Edge » (« Bordure protectrice ») a causé des dégâts difficilement réparables. Depuis, la distribution d'eau se fait encore plus difficilement et les installations électriques ont été endommagées. Les égouts ont été abîmés eux aussi, et les eaux usées se mélangent à l'eau potable. La situation devient vraiment critique à Gaza et le sujet très ciblé de Massimo Berruti fait sens. Les clichés sont mis en rapport avec l'actualité, de façon à ce que le spectateur puisse comprendre l'enjeu du reportage, sans être nécessairement un spécialiste du conflit israélo-palestinien. Dès l'entrée, une carte est présentée, avec la situation géographique de la zone à risque. On découvre aussi un extrait de journal télévisé à propos de Gaza.
Tous mobilisés
Les photographies ne nous laissent plus de doutes sur la situation de la région, devenue un immense champ de bataille. Les familles sont photographiées dans des habitations qui n'en sont plus, des taudis bombardés par l'ennemi. Le rapport avec l'eau est constamment présent dans les photographies. Tous les sujets sont mobilisés pour apporter l'eau dans la famille. Une photographie montre des habitants en train de réparer une canalisation d'eaux usées qui relie leurs maisons au système d'épuration. Une autre, présente un livreur d'eau potable qui se rend chez une famille. On voit aussi un garçon transportant un bidon d'eau potable pour sa famille. Cette exposition nous fait prendre conscience de l'importance de l'eau, notion qui coule de source pour nous. Sur l'une des images, un homme fait ses ablutions avant la prière, à l'aide d'une bouteille d'eau, peut-être même non potable.
© Massimo Berruti, Prix Photo AFD/Polka
Apocalyptique Gaza
A travers les pierres en ruines, des draps qui pendent, des enfants qui jouent, des femmes qui prient. C'est un peu comme si le but était de s'adapter à cette nouvelle Apocalypse. La vie humaine qui continue d'exister dans cette ville aux allures fantomatiques modernes, c'est cela qui nous frappe lorsque l'on regarde les photographies de Massimo Berruti. Une photographie présente un chat momifié au bord de la rivière de Gaza. Une autre exhibe un égout à ciel ouvert, une marée remplie de déchets. On est inquiets pour ces enfants qui jouent dans dans des rues chaotiques, envahies de déchets et d'éclats de goudron. L'une des photographies, présentée en grand format, montre une petite fille entraînant son frère vers un point de ravitaillement d'eau. Les deux silhouettes ressortent et se perdent en même temps dans l'étendue d'un immeuble en ruine. Au-dessus d'eux, un escalier sur le point de s'effondrer. Pourtant, dans cette apocalypse actuelle, les deux enfants, pieds nus, continuent à avancer.
© Massimo Berruti, Prix Photo AFD/Polka
© Massimo Berruti, Prix Photo AFD/Polka
Les photographies d'enfants sont particulièrement poignantes. Elles sont omniprésentes et au coeur de la série du photographe. Massimo Berruti aurait-il voulu nous sensibiliser davantage avec ces petites bouilles qui jouent avec des cagettes et des chaises dans des endroits sales et délabrés ? Sans doute pas. Il illustre simplement l'implacable réalité : la moitié des gens vivant à Gaza ont moins de 18 ans. L'effet contrasté des photographies noir et blanc se marie parfaitement avec l'esprit du reportage. De l'espoir dans un monde très noir. Le cliché des deux garçons debout sur un rocher, au bord de la mer, pourrait parfaitement illustrer cette inquiétude mêlé à l'espoir intrinsèque à l'enfance. L'un des deux enfants pose sa main gauche sur l'épaule de son ami, tandis que son bras droit montre le large. On en sort bouleversés.
© Massimo Berruti, Prix Photo AFD/Polka