
La Biennale de Dakar est née de la volonté de l’Etat du Sénégal et des artistes du pays qui, depuis les années 70, organisent régulièrement des salons d’Art qui mettent à jour les différentes phases de l’évolution de la création artistique contemporaine.
A l'occasion de la 11e édition de la Biennale de Dakar, rencontre avec Babacar Mbaye Diop, directeur de l'évènement depuis février 2013.
Comment et pourquoi la Biennale de Dakar a-t-elle été créée ?
Ses origines remontent à 1990 avec une Biennale des Lettres qui avait réservé une place importante aux arts plastiques. En 1992, elle sera consacrée à l'art contemporain en général. C'est à partir de 1996, autour de la thématique Création artistique africaine et marché international de l'art, qu'elle fut définitivement consacrée à la création africaine contemporaine. A cette époque, les artistes africains n'avaient pas beaucoup de visibilité sur le plan international et c'est pourquoi l'Etat sénégalais voulait d'abord promouvoir les artistes africains. La Biennale de Dakar, encore appelée Dak'Art, rassemble une sélection des « meilleurs » artistes africains. Elle a été créée pour :
- Soutenir et favoriser la créativité, la promotion et la diffusion des arts visuels en Afrique
- Promouvoir les artistes plasticiens africains sur la scène internationale
- Favoriser le renforcement de la présence de l'Art africain contemporain sur le marché international de l'Art
- Contribuer au développement de la critique d'Art en Afrique et des publications sur l'Art et les artistes africains contemporains.
Selon quel processus et quels critères les artistes sont-ils sélectionnés ?
Il faut d'abord nommer un commissaire et ses assistants ou un collège de commissaires. Faire ensuite un appel à candidatures pour les artistes. La sélection des artistes pour l'exposition internationale est assurée par les commissaires connus pour leur expérience dans le domaine des arts visuels. En plus de la sélection des dossiers d'artistes, les commissaires ont aussi la responsabilité de nous proposer des artistes (8 artistes chacun pour cette édition 2014) avec leur dossier complet.
En tant que directeur depuis un an, aviez-vous des changements particuliers que vous souhaitiez apporter à ce projet ?
Cette année, je pense qu'il y a eu beaucoup de changements. D'abord, pour l'exposition internationale, il n'y a eu que des artistes qui venaient pour la première fois à la biennale de Dakar. Nous avons aussi augmenté le nombre d'artistes invités. Intitulée « Diversité culturelle », cette exposition a réuni 33 artistes de divers horizons : des africains, des asiatiques, des occidentaux.... C'est la première fois que cette exposition invite autant d'artistes non-africains. Aujourd'hui, après 24 ans d'existence, il est important d'ouvrir la Biennale aux artistes du monde entier et d'éviter de s'enfermer entre africains. Il s'agit de conserver l'exposition internationale réservée aux artistes africains et de la diaspora, tout en ouvrant l'exposition d'artistes invités à d'autres continents. Cela ne fera que donner plus de visibilité à la Biennale de Dakar sur le plan international. Dak'art au campus a été aussi une innovation. Cette exposition a attiré beaucoup d'étudiants de l'Université de Dakar (qui compte plus de 80 000 étudiants). Ils ont été sensibilisés à l'art et l'environnement.
Quelle place la photographie tient-elle dans la Biennale de Dakar ?
Dak'art est une biennale des arts visuels. La photographie, comme la peinture, la sculpture, les installations numériques, etc... y occupe une place très importante. Cette année, par exemple, il y a eu le prix de la meilleure photo décernée à l'artiste sud-africaine Nomusa Makhubu par le Studio national des arts contemporains de Fresnoy, France.
Est-il vrai que des expositions portant sur l'homosexualité ont été censuré ?
Personnellement, je n'ai pas reçu l'ordre de censurer des expositions. Il y a eu plus de 270 expositions OFF et 5 expositions IN. Parmi elles, seules quatre je crois sont incriminées. Il y en a eu 268 autres, beaucoup plus intéressantes parfois. Est ce que les gens qui critiquent sont allés voir ces expositions? Vouloir réduire les expositions OFF à celles liées à l'homosexualité, c'est vraiment ignorer tout ce qu'il y a eu de plus beau et de plus magnifique dans les autres expositions. Respectons les artistes.
Un mot sur l'édition 2014 qui vient de se terminer ?
Dans l'ensemble, nous avons fait une très bonne biennale. Certains habitués m'ont même dit que c'était la meilleure édition de la biennale de Dakar. Dak'art 2014, c'est 5 sites d'expositions IN avec plus de 120 artistes, 270 expositions OFF, une dizaine de conférences avec des experts et des professionnels de l'art venus de partout. Le public, venu nombreux, a beaucoup apprécié. Il y avait presque toute la presse africaine, mais aussi RFI, CNN, TV5, Canal Plus, The Guardian, Le Monde, Al Jazeera, BBC et surtout beaucoup de magazines d'art. Je crois que nous n'avons jamais eu une couverture de la presse internationale aussi importante.
Propos reccueilis par Capucine Michelet
DAK'ART 2014 / Biennale de l'art africain contemporain