© Kourtney Roy
Pour la quatrième année, le BAL, lieu d'exposition parisien, et le PMU, entreprise de paris hippiques, ont lancé un appel à candidature, tel un « tremplin » pour la jeune création. Ainsi, 6 finalistes ont été retenus sur 62 dossiers, le but final étant la production d'une série sur le monde des jeux et des paris, aidé par une dotation de 20 000 euros. Cette carte blanche donne lieu à la publication d'un ouvrage aux Editions Filigranes, ainsi qu'à une exposition.
Kourtney Roy, photographe canadienne de 32 ans, a remporté l'appel à candidature 2014. Cette dernière a l'habitude de se mettre en scène dans un univers dérangeant et décalé, qui joue avec les codes de la photographie de mode et de l'autoportrait. Selon les mots de la directrice du BAL, Diane Dufour, la jeune femme a bénéficié de trois mois pour « orienter son écriture vers un autre horizon ». Pourtant, les mondes de la mode et de la figuration semblent toujours omniprésents dans ces photographies lisses, où il est parfois difficile de faire le lien avec le thème initial.
© Kourtney Roy
© Kourtney Roy
Certes, le spectateur reconnaît dans la mise en scène des éléments mondains des jeux de course, les papiers sur lesquels sont notés les pronostics, les parties de poker qui donnent lieu à des jeux d'argent, mais sans que cela mène à une réflexion véritable.
Ces photographies sont mises en valeur de façon remarquable, dans un espace carré et vaste, éclairé d'une lumière blanche. Les formats diffèrent, certains étant vraiment impressionnants par leur taille, tandis que quelques œuvres ont bénéficié d'un collage à même le mur, à la manière d'un sticker géant, donnant une impression de mise en abyme, d'immersion plutôt réussie.
© Kourtney Roy
© Kourtney Roy
Pour le jury, Kourtney Roy a saisi, par ses photographies, des « moments poétiques entre rêve et réalité » sur l’univers du jeu. L'abondance des couleurs primaires ou bien encore l'idée de l'anonymat, illustré par des visages enfouis dans la végétation, parfois méconnaissables et invisibles présentent des qualités évidentes, tandis que la notion de dédoublement fait sens avec ces jeux qui peuvent rendre fous. Pourtant, cette série ne séduit pas entièrement. Il lui manque une touche de sincérité et de sensibilité pour embarquer le public.
Le livre de l'exposition, Ils pensent déjà que je suis folle ( Editions Filigranes) est le premier ouvrage de l'artiste. Il contient une nouvelle de Thomas Clerc, « Intérieur », qui mêle les souvenirs de famille d'un homme dont le grand-père travaillait dans un hippodrome à des personnages fictifs fréquentant les jeux de course, semblant tout droit sorti du Cluedo. Ces souvenirs d'endroits vides, presque hostiles, font écho aux images de Kourtney Roy. Il écrit : « L'hippodrome étant pour moi un lieu vide et l'émanation même de ces quartiers déserts du 16ème arrondissement , je n'en saisissais guère la réalité, sinon sous la forme d'un espace interminable et inutile ».
Dans un univers où plantes et escalators font partie du décor au même titre que les personnages des photographies, aussi fixes et immobiles que des statues, la jeune artiste a tenté de saisir les coulisses des jeux de courses. Si le pari n'est pas toujours réussi, il faut tout de même lui accorder le mérite de l'originalité, puisqu'elle donne ici à voir l'envers du décor.
© Kourtney Roy
Ils pensent déjà que je suis folle, Kourntey Roy
Du 30 avril au 11 mai 2014
Le BAL
6, Impasse de la Défense
75018 Paris
Livre de l'exposition : 25euros
Adèle Binaisse