Pilotis, Unité d’habitation de Nantes-Rezé, Le Corbusier architecte, 1954 © J. Paul Getty Trust, The Getty Research Institute, Los Angeles © ADAGP / Fondation Le Corbusier
Il serait faux de vouloir résumer l'oeuvre de Lucien Hervé à la seule photographie d'architecture. Il est également le photographe de la solitude, le photographe de l'homme seul ; l'homme seul à l'instar d'un Giacometti et de son Homme qui marche.
L'homme seul dans son anonymat et donc dans son universalité. L'homme seul qui jamais ne regarde l'objectif. Comme si la particularité de son regard l'identifiant le dénonçait, lui faisant ainsi perdre de son universalité. Par exemple pour l'« Accusateur », Lucien Hervé obscurcit volontairement la partie supérieure du visage, lui retirant toute possibilité d'anecdote. Mais ce faisant, il découpe son visage comme l'ombre vient découper la pierre.
Olivier Beer, introduction de l'ouvrage Lucien Hervé collection PhotoPoche éditions Actes Sud.
Ces propos d'Olivier Beer résument avec clarté l'art photographique de Lucien Hervé. De son vrai nom László Elkán, il fut prisonnier de guerre à Hohenstein (Prusse-Orientale) en 1940, s'y évade en 1941, rejoint l'armée secrète à Grenoble, et prend le nom de Lucien Hervé. A l'époque, il réalise déjà des images, pour Marianne Magazine.
Tour Eiffel, Paris, 1945 © Succession Lucien Hervé
PSQF (Paris Sans Quitter ma Fenêtre), Paris, 1947 © Succession Lucien Hervé
C'est à partir de 1950 qu'il commencera à photographier pour Le Corbusier, et de nombreux autres architectes et créateurs comme Alvar Aalto, Marcel Breuer, Kenzo Tange, Oscar Niemeyer... Ainsi se fera son entrée dans l'univers de l'architecture, qui le suivra tout au long de sa carrière.
Pourtant, même si les images d'architecture de Lucien Hervé en ont fait sa renommée, c'est une belle rétrospective de son travail que propose l'ouvrage de la collection Photo Poche. Des photographies en noir et blanc, dont de nombreuses issues de sa série « Paris Sans Quitter ma fenêtre » se mêlent à ses déambulations en Inde, à Marseille, Nice, Nantes... De l'architecture, et de la solitude, l'homme seul comme en errance.
La Haute Cour de justice, Chandigarh, Inde, Le Corbusier architecte, 1955
© J. Paul Getty Trust, The Getty Research Institute, Los Angeles
© ADAGP / Fondation Le Corbusier
Gérone, Espagne, 1953 © Succession Lucien Hervé
Cathédrale de Brasilia, Brésil, 1961 (architecte : Oscar Niemeyer) © Succession Lucien Hervé
L'ouvrage proposé par Actes Sud propose une belle rétrospective du travail de Lucien Hervé, tout en noir et blanc, 69 photographies d'un monde qui lui est propre, à mi-chemin entre la dureté de la pierre et la douceur de l'Homme.
Lucien Hervé
Collection Photo Poche par Actes Sud
69 photographies reproduites en duotone, notices biographiques et bibliographiques
Format 12,5 x19 / 155 pages
13 euros
Claire Mayer