Il y a dix ans, Noémie Goudal arrivait à Londres. D'abord étudiante à la Saint Martin's School en « graphic design », elle étudie également la photographie, une discipline qui l'intéresse de près depuis son adolescence. Elle travaille alors d'arrache-pied afin de réaliser un portfolio conséquent pour intégrer le Royal College of Art. Sa formation achevée il y a 3 ans, elle est rapidement immergée dans le monde de l'art grâce à ses rencontres avec des galeristes. Elle découvre alors une jeune galerie, Edel Assanti, qui est désormais celle qui la représente. « Cette galerie est jeune mais a déjà beaucoup de succès. Les galeristes sont très dynamiques et chaleureux, et grâce à eux j'ai eu plusieurs expositions dans des musées. » Depuis qu'elle a remporté le Prix HSBC pour la photographie 2013, elle est également représentée à Paris par la galerie Les Filles du Calvaire.
Rencontre avec la jeune lauréate, tout autant ambitieuse que talentueuse.
Cascade © Noémie Goudal
Pourquoi la photographie ?
J'ai commencé la photographie jeune, mais je ne pensais pas devenir un jour photographe. C'est arrivé dans ma vie de manière organique, progressivement. J'aime l'idée de maîtriser quelque chose, et le fait d'expérimenter un médium.
La photographie ouvre un champ important des possibles : elle me permet de photographier les sculptures que je réalise, de voyager, de faire des rencontres...
En juillet 2014, je réaliserai une exposition au Warsall New Art Gallery dans un espace de 400 m2, dans laquelle je créerais des installations, des images stéréoscopiques, des installations sur plaques de verre... Mais tout cela à partir de l'image. Elle permet de réaliser multitude de choses incroyables.
Well © Noémie Goudal
Pourquoi avoir participé au Prix HSCB pour la photographie 2013 ?
Il y a 6 mois, je me suis interrogée sur un possible retour en France. Je vis depuis 10 ans maintenant en Angleterre, et je n'avais jamais présenté mon travail en France, donc j'ai voulu participer à cette compétition. Je connaissais bien évidemment le Prix, mais je n'avais jamais concouru car je n'avais pas assez d'images à présenter, pas assez de matière.
Ce concours m'a donc permis de réunir mes travaux, de faire le point sur ce que j'avais réalisé jusqu'à présent, ce qui a été vraiment très intéressant. Cela a donné une nouvelle perspective à mon travail.
Cavity © Noémie Goudal
Parlez-nous des images que vous avez présenté dans le cadre du Prix
J'ai présenté deux séries, « Haven her body was » et « les amants ». Pour ces deux séries, j'ai étudié la même chose, à savoir l'importance du dialogue entre ce qui est fait par l'homme et la nature, la relation qui unit les deux. L'étendue de la nature dans ce qui est fait par l'homme, la façon dont chacun se bat pour son territoire.
Dans « Haven her body was », il s'agit des lieux isolés, ce sont surtout les îles et les grottes qui me fascinaient car ce sont des hétérotopies (d'après Michel Foucault, les hétérotopies sont des lieux placés entre un lieu qui existe géographiquement et un lieu inventé dans l'imaginaire. les hétérotopies comme une localisation physique de l'utopie. « Ce sont des espaces concrets qui hébergent l'imaginaire, comme une cabane d'enfant ou un théâtre. Ils sont utilisés aussi pour la mise à l'écart, comme avec les maisons de retraite, les asiles ou les cimetières. Ce sont donc des lieux à l'intérieur d'une société qui en constituent le négatif, ou sont pour le moins en marge » ndlr).
Ainsi, j'ai distingué deux lieux, les grottes qui sont recluse dans le cœur, le ventre de la terre, et les îles, éloignées de tous, physiquement séparés.
J'ai lu beaucoup de textes, réalisé beaucoup d'études avant de créer ces images.
Jetée © Noémie Goudal
Remporter le Prix HSBC pour la photographie, que cela représente-t-il pour vous ?
Cela a été une véritable opportunité de remettre à plat mon travail, rassembler les photographies et voir quel en était le cheminement. C'était vraiment très intéressant.
J'ai également découvert le fait de travailler dans un autre pays, et enfin cela m'a permis de décider mon retour en France, que j'espérais.
Combat © Noémie Goudal
Est-ce la première fois que vous remportez un prix ?
Aussi prestigieux, oui.
Mais j'ai remporté plusieurs prix auparavant : le D&AD, Student of the year en 2006, The Fujifilm Merit Student Award 2007, The Leica Prize, Shortlisted for the Exhibition, 2010, j'ai été choisie pour une résidence à Londres en 2012 pour l'hôtel Corinthia... En 2012, j'ai été finaliste du prix du Musée FOAM à Amsterdam, je ne l'ai pas remporté mais on a parlé de mon travail car le choix a apparemment été difficile, et cela a été très valorisant.
Iceberg © Noémie Goudal
Qu'est-ce que le Prix HSCB permet de faire ?
Il ouvre beaucoup de portes, il permet de rencontrer beaucoup de gens. Je suis vraiment au cœur du sujet, en contact avec les imprimeurs, les encadreurs... C'est vraiment très intéressant.
C'est la première fois que l'on parle de moi en tant que photographe, car en Grande-Bretagne je suis considérée comme une artiste plasticienne qui travaille avec la photographie. Je ne tiens pas vraiment à être placée dans une catégorie précise, mais je vais pouvoir faire connaître mon largement mon travail, ce qui permettra au public de découvrir l'ensemble de mes projets.
Creus © Noémie Goudal
Propos recueillis par Claire Mayer