© Antoine d’Agata - Magnum photos- Marseille, 1997 Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris
Si chacun des clichés d'Antoine D'Agata percute sans recourir à l'onguent du discours, sa nouvelle exposition au BAL interroge. Du 24 janvier au 14 avril, c'est vingt années d'images qui se structurent autour du titre Anticorps et prennent possession de la galerie. Deux. C'est le nombre de salles que se sont imposé, comme un défi, les commissaires d'exposition Fannie Escoulen et Bernard Marcadé avec la directrice du Bal Diane Dufour, pour mettre en scène cette œuvre aussi dense que déroutante.
© Antoine d’Agata - Magnum photos - Nuevo Laredo, 2005 Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris
Dès le seuil, la première pièce laisse perplexe. Seule une vidéo- des voix féminines entremêlées, un texte défilant, un fond noir, hypnotique- habille le quatrième mur d'une salle blanche. Des colonnes de papiers, égales, industrielles, jonchent une partie du sol. Textes et images s'y relaient. Ici, on ne reconnaît ni la pression charnelle, ni le langage organique, ni le chaos accidentel de d'Agata. Ici, la violence chuchote. Elle quitte l'enveloppe de l'image pour se distiller dans le son des paroles ou la forme de l'écriture.
http://www.dailymotion.com/embed/video/xx76mt" par http://www.dailymotion.com/embed/video/xx76mt"
En contre-bas, s'ouvre le second espace, saturé d'images. La sobriété du précédent rend d'autant plus violente notre rencontre avec celui-ci. La rigidité froide des premiers murs y est balayée par un flux continu de photographies aux dimensions diverses et au relief variable. Certaines s'affranchissent de leur support tandis que d'autres se confondent avec un papier-peint. Les différentes séries du photographe s'y côtoient sans ordre apparent, sans narrativité pour orienter le regard du spectateur. Seuls l'accident, le hasard, la brutalité. De Mala Noche à Ice, les images incarnent la violence du monde dans ses différents visages et traversent plus que les murs, les spectateurs. Les photographies mises en avant, sont autant de pointes qui sculptent le flot de clichés et attisent une douleur lancinante.
La scénographie n'est pas le fruit du hasard, essentiel dans l'oeuvre photographique, mais celui des efforts conjoints des commissaires d'exposition et de l'artiste. En souhaitant échapper aux codes de la rétrospective, ils ont véritablement conçu une œuvre, composite et percutante à la mesure de la sensibilité de d'Agata.
© Antoine d’Agata - Magnum photos- Sao Paulo, 2006 Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris
L'exposition Anticorps trouve sa puissance dans la dualité de sa mise en scène et la mutation des espaces. Le lieu traditionnel d'exposition se meut en un sanctuaire au cœur duquel le spectateur doit trouver sa place ou se laisser submerger.
© Antoine d’Agata - Magnum photos - Sangatte, 2004 Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris
© Antoine d’Agata - Magnum photos- Tokyo, 2008 Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris
La rédaction d'Actuphoto
Images et vignette © Antoine d'Agata