© Daniel Nassoy
Photographe reconverti depuis quelques années, Daniel Nassoy a participé à l'exposition « Rubans » qui s'est tenue au Viaduc des Arts. Il a exposé une de ses œuvres parmi d'autres artistes présentés. Cette exposition a été organisée dans le cadre de la journée mondiale de la lutte contre le sida. A l'origine informaticien, Daniel Nassoy a suivi une formation de photographe en cours du soir à Paris. Après avoir passé plus de quinze ans dans le même boîte et s'être fait refuser une formation parallèle dans le multimédia, il a voulu quitter cet environnement fermé pour se lancer dans un autre domaine plus créatif, plus expressif. Il a commencé la photo il y a maintenant 10 ans. Ses amis lui ont fait trouver ses premiers clients, puis il a décroché un contrat avec une grosse entreprise, qui aujourd'hui ne travaille plus avec lui à cause de la crise. En ce moment, Daniel Nassoy se retrouve un peu au point de départ...
Pourquoi vos photos sont en noir et blanc ? Que représente cette touche de rouge sur les photos ?
À la base j’étais très attiré par les photos de Boubat, qui faisait des photos en noir et blanc. Cela vient de là. Le rouge est la couleur qui tranche le plus avec le noir et blanc. C'est la couleur de la passion.
Avez vous un domaine de photo particulier ?
En fait, j'étais enfermé pendant 20 ans dans l'informatique, donc je ne voulais pas me retrouver enfermé dans un domaine particulier. Mais bon en général, pour avoir les mêmes clients, il faut être enfermé en quelque sorte dans un certain domaine, produire un peu les mêmes images.
J'explore les phénomènes. J'ai quand même deux domaines particuliers : le portrait et le nu. Mais j'ai perdu mon gros client, qui me faisait vivre, (en fait ils ont arrêté au moment de la crise un certain nombre de chose) et ce client avait un site vitrine auquel je travaillais. Donc, depuis 2 ans, j'essaie de développer une activité qui ne démarre pas très facilement. J'accompagne les touristes dans Paris et je leur propose des tours photos. C'est surtout pour un couple, en général, ou une famille. J'ai crée un site qui s'appelle « My portraits in Paris », pour les touristes étrangers, plutôt haut de gamme en fait. Donc j’essaye de contacter des concierges, d'avoir des contacts avec des agences à Paris qui reçoivent des étrangers et comme ça j'ai quelques clients.
Avez-vous été inspiré par un photographe en particulier ?
Boubat, Doisneau, Mapplethorpe. Joel Peter Witkin, qui est assez trash et décalé.
Comment avez-vous participé au projet du Viaduc des Arts ?
En fait c'est un ami de l'association des Artistes à la Bastille qui participait avec une photo, qui m'a proposé de participer car ils recherchaient des artistes. Donc j'ai envoyé une photo, qui a d'abord été refusée. C’était un homme nu qui posait avec un chapeau. Puis j'ai compris pourquoi. Le Viaduc des Arts c'est le 12eme arrondissement, c'est très bourgeois, ce sont des artisans hauts de gamme. Comme c’était la première fois que l'association faisait ce type d'exposition, il fallait rester relativement « soft » pour exposer. En fait, les artisans n'ont pas vraiment joué le jeu. Ils devaient mettre un ruban, et pour le vernissage ils devaient rester ouvert. Le début du vernissage était à 18h30 et à 19h tout était fermé. Ca m'a déçu particulièrement. Bon j'avais qu'une seule photo mais j'étais obligé de faire l'aller retour là où était ma photo, pour la montrer aux publics.
En fait, j'en ai parlé avec les organisateurs, et on m'a dit que c'était très difficile de faire bouger les commerçants.
© Daniel Nassoy
Comment avez-vous décidé de faire la photo ?
Tout d'abord j'ai mal pris le fait que me première photo ait été refusée. Et puis l'ami qui m'a contacté m'a dit que j'avais pleins d'autres photos à proposer. En fait, cette photo se constitue de plusieurs photo et j'en ai fait un mix, un montage en mélangeant des photos de la même personne dans des attitudes différentes. Mais j'ai pas fait de photo spécialement pour l'évènement en fait, j'avais pas le temps. Je suis resté dans le noir et blanc, avec la touche de rouge. Je n'ai pas mis de rubans mais ce sont des chaussettes rouges qui sortent des poches du pantalon. Cela donne un montage dynamique, un peu hip-hop.
Aviez-vous une attente particulière par rapport à cette journée mondiale du sida ?
J'aurais aimé qu'il y ait plus de monde. Pourtant l'association et la Mairie de Paris avaient fait beaucoup de communication autour du projet, donc j'ai l'impression que c'est plus les galeries qui n'ont pas suivi.
Est-ce plus percutant de contacter les artistes pour ce genre de cause ?
Je pense oui car du coup les artistes communiquent beaucoup plus.
Aviez-vous déjà participé a une cause de ce genre ?
Pas de cette manière là, mais je suis dans le milieu gay et on parle beaucoup de ça. La maladie apparemment recule, mais chez les gay elle augmente. Donc en ce moment, il y a un collectif qui s'est crée, et qui veut remettre la prévention, l'histoire de la capote sur le devant de la scène. Il y a un discours montrant en quelque sorte que la maladie se soigne, alors que pas du tout. Du coup, il y a un relâchement. Je suis dans ce collectif aussi, donc on va certainement essayé d'organiser un événement sur le thème de la capote. Ce collectif, pendant 6 mois, va se réunir et discuter. C'est presque devenu une sorte de routine pour des gens qui sont salariés d'être dans une association, il n'y a plus d'opération vraiment. On pense que le message de prévention n'est pas suivi. Des gens sur le terrain essayent de réfléchir, et dans 6 mois, vont écrire un compte rendu de diffusion pour voir comment on peut traiter cela. Le collectif s'appelle « Parlons Q ». Il va y avoir des réunions thématiques qui se tiendront au centre LGBT, qui soutient l'opération.
Ils ont décidé l'année prochaine de plus communiquer sur la prévention. Donc je vais participer déjà à ce collectif, mais je ne suis pas dans les gros groupes genre Act Up ou Sidaction.
Propos recueillis par Eloïse Rey