Itamar, Cisjordanie, juin 2005 Jeune volontaire venu travailler bénévolement dans la ferme du colon extrémiste, Avri Han.© Julien Chatelin
Julien Chatelin est né en 1968 et est devenu photographe indépendant en 1992.
Il couvre l'actualité sociale en France et réalise ses premiers reportages en ex- URSS. Il part sur de nombreux terrains de conflits (Asie Centrale, Moyen-Orient, les Balkans) et s'intéresse au sort des nations sans Etats, le Tibet notamment où il réalise un travail sur Lhassa (Lhassa : l'Âme perdue du Tibet.)
En 2008, il publie Israël Borderline.
« Israël est sans doute le pays le plus médiatisé au monde. Paradoxalement, la société israélienne demeure l'une des plus méconnues. Etat en gestation, société protéiforme façonnée par plus de 60 ans de conflits et par l’arrivée de vagues d’immigrations successives en provenance d'Europe, d'Afrique du nord, d'Ethiopie puis de l'ex-Union soviétique. »
La Galerie François Mansart a décidé de consacrer une exposition au photographe, tirée des clichés du livre de Julien Chatelin. A cette occasion, nous avons rencontré le photographe.
Tel-Aviv, octobre 2004
Love Parade sur la route du front de mer de Tel-Aviv. Des chars aux couleurs des boîtes nuit défilent musique hurlante sur quelques kilomètres © Julien Chatelin
Pouvez-vous me raconter votre parcours?
Je suis né en France, et j'ai décidé de partir faire mes études à l'université de New York (NYU). Je faisais un cursus photo et science politiques.
J'avais déjà une idée de ce que je voulais faire, j'étais intéressé par les reportages et par les gens. Je suis ensuite rentré en Europe parce que quand on est aux Etats-Unis, on est centré sur ce qu'il s'y passe et on en oublie le reste du monde.
Quels sont les photographes qui vont inspirés?
J'ai pris 10 ans à trouver le livre du photographe Chris Killip, In Flagrante, sur les années 80, à l'époque du thatchérisme au Royaume-Uni. Ce livre est une référence par son contenu, sa forme... Je l'ai trouvé il y a seulement deux ans et il y a une nouvelle édition qui vient de sortir !
J’ai d’abord été inspire par les photographes de rue américain Lee Friedlander, Garry Winogrand, ou Joël Meyerowitz, mais aussi par toute l’école Bressonienne. Ensuite il y a une quinzaine, année j’ai découvert Chris Killips ( ….) qui a une exposition au Bal en ce moment.
Tel-Aviv, avril 2004, Pacha Club au Dolphinarium de Tel-Aviv,
le jour de la fête de l’indépendance le 26 Avril 2004. © Julien Chatelin
Vous êtes partis sur de nombreux terrains de conflits, qu'est-ce qui vous y attire?
Sur une zone de conflit, l'histoire se déroule devant vos yeux. Il y a quelque chose de fort lorsqu’on se retrouve au coeur d’évènement historique. La complexité consiste à garder la bonne distance pour comprendre et décoder ce qui est entrain de se dérouler
Est-ce cela qui vous a poussé à partir en Israël?
J’ai beaucoup travailler sur le sort des nations sans Etats, et qui se battait pour une reconnaissance internationale. Ca m ‘a amené en Tchétchénie, au Tibet, au Kosovo, au Sahara occidental. Forcement je me suis intéresse a la question palestinienne.
Je me suis beaucoup documente sur la question, et j’ai réalise que malgré la quantité d’information disponible, je connaissais très mal la société israélienne. Les medias, à cette époque ne traitait pas, ou très peu le conflit sous cet angle. Apres un premier voyage a Tel Aviv en 2004, j'ai commence a m’intéresser aux antagonismes propre a la société israélienne. Le rapport entre laïque et religieux par exemple.
Motsa Illit, juin 2005 La journée du béret (“Massa kumta”)
Marche de 72 km d’un régiment de parachutiste qui clôture la période de classe et à l’issue de laquelle les jeunes recrues obtiendront leur béret de parachutiste. © Julien Chatelin
Comment en êtes vous venu à en faire ce livre?
Un ami qui s'occupait des éditions « Avoir 20 ans » m'a proposé de faire un livre, « Avoir 20 ans à Tel Aviv » mais, cette ville est à part dans ce pays, alors je lui ai proposé de faire « Avoir 20 ans en Israël ».
C'est devenu un projet qui devenait beaucoup trop important ; il y avait énormément de champs possible.
Il y a une convergence pour le livre. J'étais intéressé par la jeunesse et d'en percevoir en elle la société israélienne de demain.
Finalement, le travail m'a pris trois ans et j'ai sorti le livre avec un autre éditeur.
Saint-Jean d’Acres, août 2005 Des Arabes israéliens plongent des remparts de la cité médiévale. © Julien Chatelin
Comment le livre a – t – il été perçu par les Israéliens ?
Le livre a généralement été très bien reçu. Ils retrouvaient leur pays dans l'ouvrage, je pense que c'est un travail honnête dans ses diversités.
Quel est le "message" que vous avez voulu faire passer?
Voir Israël autrement que part le conflit avec ses voisins, même si on ne peut pas y échapper. L’idée c’était de montrer qu’Israël, n’est pas un bloc monolithique. C’est une société complexe, ou il y a des courant très divers, avec des politiques parfois complètement antagonistes.
Jérusalem, octobre 2004 Mitsvah du « Pidyon Haben ». © Julien Chatelin
Vous êtes actuellement aux USA, travaillez-vous sur un nouveau projet?
J'ai effectue un travail de paysage en Egypte, sur l’occupation du désert. Pour faire face a la croissance et a la pression démographique l ‘Egypte a entreprit depuis 40 ans un vaste programme d’urbanisation et de colonisation du désert. L’Egypte est un territoire en transition, et qui cherche à se réinventer. Dans cet espace de transition, Il se crée une tension entre l’homme et la nature, qui mené à l’étrange, au surréalisme. C’est cet espace la qui m’intéresse.
Detroit qui a subit de plein fouet la crise industrielle, et plus tard celle des subprimes, a été déserte par plus d’un quart de sa population en moins de 10 ans. C’est aussi un espace en transition, ou la nature recouvre progressivement les espaces délaissés par l’homme.
Jerusalem, Avril 2006; Yad Vachem, memoriale pour l’holocauste. © Julien Chatelin
Photos et Vignette © Julien Chatelin
Propos receuillis par Lara Aim