©Christian Lutz
C'est à l'occasion de l'exposition de Christian Lutz présentée jusqu'au 9 septembre au musée de Bagne que la structure propose une édition de l'ensemble de ses œuvres. Intitulée « Aux dépens du réel», elle revient sur les voyages du photographe de VU, effectués entre 1995 et 2011. Classées par continents et régions, les séries de clichés sont précédées de commentaires de Christian Lutz lui-même sur le rapport qu'il entretient à son métier et à ses sujets photographiques.
Du Brésil aux Balkans en passant par le Sénégal et bien d'autres pays, le photographe capture des scènes d'extérieur et d'intérieur comme les éléments d'un tout, d'un système. Les sujets des photographies interviennent comme les témoins et les victimes à la fois d'un siècle peu soucieux de son engeance. Des visages marqués, des regards accusateurs, des expressions soucieuses, des silhouettes courbées, l'ouvrage ne fait pas dans l'ensemble un inventaire heureux des natures humaines.
©Christian Lutz, extraite de la série «Balkans»
©Christian Lutz, extraite de la série «Mourides»
Les clichés n'ont aucune légende. Les rues, les routes, les immeubles peuvent être n'importe où. On peut y voir le désir de présenter comme universel le malaise d'un siècle dit postmoderne. Sociologique, technocratique et économique, ce malaise sème des expressions similaires d'une page à l'autre, dans des scènes de rue, lors de réunions de grandes entreprises et dans la misère elle-même.
©Christian Lutz, extraite de la série «Bahia»
©Christian Lutz, extraite de la série «Outwest»
Aucune mise en scène n'est opérée, la recherche esthétique est quasiment absente : sans regard complaisant aucun, Christian Lutz fait le choix de saisir le brut de la réalité. Il fait de ses photographies le réquisitoire non-verbal d'un système presque dément. C'est par cette démarche qu'il se définit comme une personne «engagée» . Inutile de chercher de l'exotisme car le livre ne détient du genre que la variété des couleurs de peau, et toutes portent le même mal que Christian Lutz dénonce.
©Christian Lutz, extraite de la série «Tropical Gift»
Axelle Deconinck