Le musée d'art moderne de la ville de Paris présente en étroite collaboration avec Larry Clark, la première rétrospective française de l'oeuvre de l'artiste. Dès son ouverture le 8 octobre 2010, l'exposition a créé une polémique. En effet l'entrée est interdite aux mineurs. Pourquoi cette censure? Certaines de ses photographies ont été jugées choquantes voire obscènes par ses détracteurs.
A travers ses divers travaux, Larry Clark s'attache à dévoiler les dérives, les excès voire les conduites à risques d'une jeunesse dépourvue de repères. Il pointe du doigt ce que l'Amérique ne veut pas voir. Il ne propose donc pas une vision édulcorée de la société où tout serait rose. Par son objectif il capte le quotidien d'adolescents perdus, paumés qui se droguent et qui s'adonnent parfois à des pratiques sexuelles douteuses. Mais l'adolescence n'est pas une partie de la vie où chacun se cherche, cherche son identité?
Cette quête perpétuelle peut parfois les amener à adopter des conduites excessives voire extrènes en rupture avec la morale habituelle. Leur attitude repose sur la transgression de certaines règles préétablies.
L'adolescence correspond à une période charnière: l'adolescent n'est plus considéré comme un enfant mais il continue à se construire pour devenir adulte. Ce moment peut s'avérer délicat surtout si les adolescents en question manquent déjà de repères. Si ces photographies peuvent troubler, choquer ou encore déstabiliser elle renvoient à la réalité.
L'un des rôles du photographe n'est-il pas de bousculer les esprits et de dévoiler une part de la réalité qui n'est pas forcément connue de tous? Lorsqu'elle est est connue, certains préfèrent l'ignorer. Ainsi, les photographes et les artistes en général peuvent permettre à la société de prendre conscience de ses problèmes.
Par le reportage Larry Clark aborde l'adolescence sans détours et sans tabous. C'est pour ces raisons que ses photographies dérangent. Ils montrent ce que certains n'osent pas montrer sans pour autant tomber dans le voyeurisme. Après on peut se demander quelle est la part de mise en scène dans ces travaux. Dans tous les cas qu'on apprécie ou pas la démarche artistique de ce photographe, celle-ci ne laisse personne indifférent. Aujourd'hui Larry Clark demeure un artiste incontournable dans la culture américaine lorsqu'il s'agit de parler de l'adolescence. Il a joué et réalisé des films qui traitent aussi de cette thématique.
A l'instar de Blake Nelson (auteur de Paranoid Park), de Bret Easton Ellis, de Gus Van Sant (Réalisateur de paranoid park et de Elephant)ou encore Sam Mendès (réalisateur de American Beauty), il participe au développement de la culture underground. Par cette posture qui s'avère peut-être scandaleuse pour certains, il cherche simplement à faire réagir la société en pointant du doigt son côté obscur. Au delà de l'incongruité de certains clichés, ceux-ci nous ouvrent les yeux sur des problèmes de société qui sont souvent délaissés ou mal traités par les politiques.
D'autres pourrait dire que ces travaux photographiques n'ont rien d'artistique. A ces personnes, il faut alors demander ce qu'il entendre par art.
Quoi qu'on en pense ou qu'on en dise cette exposition mérite d'être vue. Après selon son vécu on peut apprécier ou non cette exposition. Mais avant d'émettre un jugement quelconque il faut la voir. Je peux comprendre l'interdiction mais en même si on part du principe que la photographie est un art, interdire cette exposition revient à limiter l'accès à l'art aux adolescents. D'ailleurs, un adolescent curieux qui aurait entendu parler de la polémique peut toujours avoir accès aux photographies de Larry Clark en un clic de souris. Ainsi la découverte d'images violentes ou scandaleuses n'est-elle pas plus dangereuse sur internet qu'au détour d'une exposition?
Cette censure qu'elle soit ou non justifiée aura au moins fait une publicité importante pour cette première rétrospective de l'oeuvre de Larry Clark. Souvent les polémiques amènent du monde. Cette exposition va surement continuer à faire parler d'elle au moins jusqu'à la prochaine polémique. Larry Clark se souviendra longtemps de sa première rétrospective française.
Jessica Staffe / Actuphoto