Avant de devenir un membre du groupe AES+F, Vladimir Fridkes passe par tout les genres : du photo-journalisme, à la photographie publicitaire en passant par la photographie contemporaine. A travers cette interview, ce polyvalent de nature nous explique les différents aspects de son travail, plus particulièrement dans le monde de la mode.
Pouvez-vous nous parler un peu de vous ?
Comme la plupart des gens, j'ai eu mon premier appareil photo comme un cadeau pendant mon enfance. Depuis ce temps, je prends des photos. A la fin des années 1980, j'ai essayé de faire un shoot publicitaire mais à cette époque, l'Union Soviétique était un peu étrange. J'ai vite perdu mon intérêt dans ce genre de business et je suis devenu photo journaliste. J'ai travaillé pendant quelques années pour « Politiken » un journal Danois, et pour l'agence « PolFoto ». Vers 1994, le premier magazine de mode a été publié et j'ai commencé à collaborer avec. Plus tard, il y en avait de plus en plus, comme ELLE, Bazaar, Vogue... Petit à petit j'ai commencé a faire mes propres projets. En 1995, j'ai rencontré le groupe AES, et depuis je travaille avec eux et nous sommes devenus AES+F.
Comment êtes-vous devenu photographe de mode ?
Comme j'ai pu le dire auparavant, j'étais photo journaliste mais je voulais toujours plus. J'ai toujours aimé la photo de mise en scène. En 1994, le magazine « Imperial » a été publié et il y avait de jeunes gens talentueux qui travaillaient. Ils m'ont offert un boulot. Voilà comment tout a commencé.
Quelle est la pire et la meilleure partie dans votre métier ?
La pire partie, ce sont les compromis et les limites que l'on doit accepter. La plupart du temps, on ne peut pas finir un travail tout de suite comme on le voudrait. Quand on est commissionné, tout ne dépend pas de nous. Par exemple, notre point de vue ne correspond pas forcément à celui du client et on est obligé de chercher une autre solution. Ou alors, le budget n'est pas assez élevé et c'est dommage car l'idée est géniale. Il peut y avoir de nombreux désavantages mais ce sont les règles du jeu, on est obligé de les accepter. En contre partie, j'ai une vie active et palpitante, je rencontre de nouveaux gens tout les jours. Offrir ses idées et voir le résultat dans de grandes éditions, c'est toujours satisfaisant.
Qu'est ce qui vous donne des idées et vous inspire pour créer de telles images ?
Les idées viennent toute seules. La plupart du temps, l'idée existe déjà et l'on attend l'offre de la rendre réel. Parfois le styliste, tel un scénariste, arrive avec une idée et c'est passionnant de créer une solution visuelle pour lui.
Comment décririez-vous votre style de photographie ?
Pour moi, il est un peu étrange de parler de « mon propre style ». Je crois qu'une vision lointaine, une certaine froideur, et du suspense pourrait le décrire au mieux.
En tant que photographe, quel est votre objectif quand vous vous préparez à prendre une photo ? Que voulez-vous voir à la fin ?
Je pense que le but de chaque artiste, et dans ce cas du photographe, est de donner de l'émotion au public. Dans le cas de la photographie de mode, c'est travailler avec une forme particulière, je veux dire le format magazine, le style, le tissu... Vous devez vous soumettre à tout ça et obtenir la mise en œuvre visuelle de votre idée à la fin. En fait, ces expérimentations sont toujours très intéressantes.
Dans vos photographie de mode, on remarque qu'il y a beaucoup de cadres, à l'intérieur du cadrage. (fenêtres, télévisions, carrés, écrans d'ordinateur...). Quelle était l'idée de la série de photos avec ces cadres ? Parlez nous de cette photo en particulier.
De manière général, j'aime beaucoup jouer avec l'espace, la perspective et la forme. Pour ce projet là, nous voulions faire une histoire en rapport avec les nouveaux gadgets, ensuite l'idée a été transformée. Nous avons shooté l'histoire de la fille qui rêve de palmiers, d'eau cristalline, de plage de sable fin, mais qui habite dans un motel pas cher et voit ses propres rêves accrochés au mur ou sur les écrans d'ordinateur. Les écrans de télévisions, et les cadres servent à créer une réalité virtuelle. Elle finit, d'une façon ou d'une autre, à l'intérieur de son rêve.
Quelle est votre photo favorite prise récemment ? Pourquoi ?
Voici deux photos que j'ai pris et que je préfère :
Il est difficile de dire pourquoi je les aime. Plus le temps passe, plus votre attitude envers votre travail change. Disons que ces photos ont passé l'«examen du temps.»
L'éclairage est parfait sur chacune de vos photos. Travaillez vous avez de l'argentique ou du numérique ? Et pourquoi ?
Avant j'utilisais des pellicules et maintenant j'utilise le numérique. Dans les créations avec le groupe AES+F on utilise la technique du collage, donc le numérique est plus adapté et surtout plus efficace.
Vous participez aux nombreux projets de AES+F. Comment est-ce différent de votre travail de mode et de pub ?
Si l'on parle directement du tournage, alors pour moi, le processus est très palpitant dans les deux cas.
Si l'on parle du travail en général, comme je l'ai dis auparavant, dans la photographie de mode il y a beaucoup de compromis mais dans les projets personnels il n'y en a pas : vous avez l'idée et la motivation, il ne vous reste plus qu'à trouver la façon de rendre l'idée réelle et en finir. Dans le cas du groupe AES+F, le résultat est l'invention de l'esprit collectif. On décide tout ensemble du début jusqu'à la fin. Nous définissons nous même ce que l'on va faire et de quelle manière nous allons procéder.
C'est l'année France Russie. Qui est le premier photographe Français qui vous vient à l'esprit ? Quelle image avez vous de la photographie Française ?
Guy Burdin. J'ai été époustouflé par ses photos. La France a donné au monde de nombreux grand photographes comme Henry Clark, Jean Loup Sieff, Henry-Cartier Bresson, Cécile Beaton, Felix Nadar. Leurs travaux sont des modèles pour les photographes contemporains.
En quoi pensez vous que la photographie de mode Russe et Française est différente ?
C'est comme comparer un adolescent avec un homme adulte. Il faut garder en tête que le «Vogue» russe et d'autres magazines de mode sont apparues au milieu des années 1990. De plus ils ont beaucoup travaillé avec les photographes occidentaux, donc tout a commencé il n'y a pas si longtemps. Disons que la photographie Russe commence tout juste.
Quel conseil donneriez-vous à un jeune passionné par la photographie de mode ?
Dans la mesure du possible, faites ce qu'il vous intéresse le plus et défendez votre point de vue.
Rachel Thomas