L'affaire a beau être annexe à l'actualité de la photographie, elle concerne un de ses représentants français les plus tapageurs : François Marie Banier.
Le photographe-romancier-acteur, auteur notamment d'ouvrages de photographies publiés chez Steidl et de romans chez Gallimard, est connu pour avoir photographié de nombreuses personnalités (Nathalie Sarraute, Samuel Beckett, Madeleine Castaing, Vladimir Horowitz, Johnny Depp..) dont il a parfois partagé la vie, mais aussi des anonymes dans ses ouvrages plus "personnels", plusieurs fois récompensés. Il a déjà été exposé au Centre Pompidou (1991) et à la Maison Européenne de la Photographie (2003) entre autres, et continue de travailler à Paris.
Grand amateur de rencontres, riche collectionneur, le photographe fait parler de lui depuis bientôt deux ans (décembre 2008) pour la relation particulière qu'il entretient avec Liliane Bettencourt, héritière de L'Oréal dont la fortune personnelle est estimée à une quinzaine de milliards d'euros. Celle-ci lui aurait transmis, sous la forme de chèques, d'assurances vies et d'oeuvres d'art, près d'un milliard d'euros…A priori, pas d'inconvénient à ce que la femme la plus riche du monde assure le fastueux train de vie de son compagnon. Sauf ci, comme le clame la fille de l'héritière, celui-ci profite de la "faiblesse" de Mme Bettencourt, âgée de 87 ans, pour lui extorquer des dons.
L'enquête, lancée en 2008, s'avère riche en rebondissements : on y découvre l'existence d'une petite communauté d'artistes, François-Marie Banier, son "compagnon" Martin d'Orgeval et le comédien Pascal Greggory entre autres, entretenus par la généreuse mécène dans un hôtel particulier parisien, et parfois soutenus par L'Oréal pour leurs projets artistiques, qui distraient et fascinent la riche femme d'affaire.
Mais au delà du pittoresque de la situation, le noeud du conflit semble bien plus être la relation empoisonnée entre Mme Bettencourt et sa fille, et son coeur, la fortune personnelle de l'héritière L'Oréal en vue de son futur héritage. "Il faudrait tout de même que ma fille se rende compte que je suis une femme libre", clame la milliardaire, qui s'est toujours refusée à une expertise médicale prouvant qu'elle est diminuée mentalement, et dont François-Marie Banier ne cesse de répéter la lucidité : "je ne suis pas le seul à avoir bénéficié de ses dons, loin de là. Et c'est cela qui dérange : qu'une femme de cette caste brise les convenances".
L'a-t-elle fait en toute conscience ? Seul prévenu du procès, François-Marie Banier y assiste pour l'instant en spectateur, la lutte se situant entre les avocats de Mme Bettencourt et de sa fille. Peut-être trouvera-t-il dans ce spectacle au parfum de scandale de quoi nourrir ses prochaines productions…
Antoine Soubrier