Le 4 Juillet, Brooklyn, New York, 2010 © Peter Van Agtmael
Connu et récompensé pour ses photos de guerres, Peter Van Agtamael nous présente ici un tout autre décor. A domicile, de l'autre côté de l'océan, le reporter ne photographie plus des conflits armés. Et pourtant, il réside toujours une certaine violence dans ses photos. Ce sont des moments pris sur le vif, souvent de nuit, éclairés par un flash agressif. Les Etats-Unis qui nous sont montrés sont mis à nu. Ce n'est pas le rêve américain qui y est capturé, c'est la vérité crue des classes moyennes et des quartiers défavorisés.
Réfugiés irakiens dans une résidence pour personne à faible revenu, Portland, Oregon, 2015 © Peter Van Agtmael
Des paysages, des scènes de rue ou d'intérieur, des angles frontaux ou pris du ciel. Les photos s'enchaînent sans unité ni ordre apparent sur des doubles pages. Elles montrent tantôt des fêtes arrosées sur le bord de la route, tantôt ces familles entassées dans une pièce qui tentent de tuer le temps. Il faut attendre la fin du livre pour avoir accès aux légendes des images, comme si ce n'était pas vraiment l'explication qui comptait, mais l'instant saisi. Parfois un texte vient interrompre l'enchaînement des clichés. Ils éclairent sur la vie du photographe. Jamais très réjouissantes, ces histoires rajoutent au réalisme étourdissant de la série. Peter raconte qu'enfant, il a été moqué par ses camarades avec une telle méchanceté qu'il a été rejeté et mis à l'écart. Cette marginalité l'a exclu de la vie sociale, il n'en était plus que le spectateur. A posteriori, Peter Van Agtamael relie cette posture marginale à sa prédilection pour la photographie. Il est un observateur.
Un observateur qui persiste, comme l'oiseau à la fenêtre qui continue de cogner son bec contre la vitre, malgré les gestes des humains pour le faire fuir. C'est de là que vient le titre du livre, Buzzing at the sill, expression tirée du poème «In a Dark Time» de Theodore Roethke, artiste torturé du 20e siècle. A l'origine, l'expression décrivait les mouvements d'une mouche qui « bourdonne sur le seuil », n'étant autre que la métaphore de l'âme du poète. Mais Peter Van Agtmael l'associe librement à sa propre métaphore : celle du corbeau de la première de couverture.
Chasse de lapins avec armes à air comprimé, A la périphérie de la Nouvelle-Orléans, Louisiane, 2009 © Peter van Agtmael
En somme, le regard du reporter de guerre ne quitte pas le photographe : c'est une vision pessimiste, au mieux mélancolique et inquiète, qui nous est donnée des Etats-Unis. Après avoir gratté le vernis du rêve et de l'opulence, Peter Van Agtamael rend compte du quotidien de ses concitoyens après les attentats du http://fr.actuphoto.com/hashtag/EtatsUnis">Etats-Unis.. Le photographe conclut avant ses remerciements en disant : « En Amérique, nous nous sentons hors de danger en quelque sorte, mais dans tous les pays en guerre, la première chose qu'ils te diront c'est qu'ils ne pensaient pas que cela aurait pu arriver chez eux. »
http://fr.actuphoto.com/hashtag/EtatsUnis">Etats-Unis.
Peter Van Agtmael
Kehrer Verlag
39,90 €