©Turnauer - TsaaTan âgée de 78 ans. North Mongolia - 2012
©Christine Turnauer - Grandmother and Grandson
Au cours de ses long voyages, Turnauer tente de capturer ces moments de présence absolue dans ses photographies. Chacun de ses touchants portraits en noir et blanc représente une rencontre inoubliable. De temps en temps, on peut également voir l'arrière du cou d'une personne, une partie du corps qui signale une sorte de vulnérabilité. Ses portraits évoquent une grande confiance et une inconditionnelle forme de respect. Chaque cliché a une histoire. A la fin de l'ouvrage, Christine Turnauer donne de la vie à ses portraits en relatant des anecdotes au sujet des personnes photographiées.
©Christine Turnauer - Rani
Vagabonder entre les mondes
Depuis son jeune âge, Christine est fascinée par les « gens ». Elle vivait à Vienne dans les années 50, à l'époque occupée par les Alliés. La culture l'a aidé à comprendre les interconnections dans le monde. Franck, son associé de longue date, lui a apporté la générosité, le partage et sa vaste connaissance du monde. Il était comme un professeur pour elle.
La photographe a beaucoup voyagé pour faire le portait de toutes ces personnes ayant des cultures différentes. Turnauer pointe son objectif de la Mongolie à l'Amérique du Nord, en passant par la Turquie, Israel, la Grèce, l'Éthiopie, la République Centre Africaine, le Japon puis l'Inde.
Ses portraits viennent d'une idée, d'une intuition. L'artiste mène une quête pour trouver les êtres humains qui l'inspirent. Parmi eux, un berger grec de 89 ans lui confie « Je n'ai jamais été malade dans ma vie. Chaque jour, je les ai passé là-bas ». Sur la page d'en face, une bergère de 88 ans, également de Grèce, lui livre son secret de longévité : « La santé, le pain et l'huile d'olive ». Des réponses sans questions, Turnauer met seulement en lumière ce qu'elle photographie et ce qu'ils disent. Les personnes qu'elle prend en photo sont des perles rares, intéressantes et bienveillantes.
©Christine Turnauer - Abil
D'ailleurs, ses inspirations viennent de diverses cultures : les geishas, les religieux indiens, les tribus de Mongolie et même les Pygmées. Avant de trouver ces derniers, elle a dû voyager pendant des jours à dos d'un cheval. Christine Turnauer cherchait des visages avec des caractéristiques et des expressions marquées par le temps, par un passé archaïque et inchangé depuis des milliers d'années.
Pour l'Inde, elle cherchait cinq personnes de ces cinq religions : Bouddhisme, Jaïnisme, Hindouisme, Sikhisme et l'Islam. Après de longues recherches, elle tomba sur un homme vêtu d'un habit traditionnel se trouvant à la mosquée Jama Masjid (dans le vieux Delhi). Elle voulait prendre un portrait de lui, expliquant qu'elle voulait un religieux musulman. Ce à quoi il a répondu « Je ne suis pas musulman, mais je viens dans ce lieu paisible où je peux être moi-même. Nous avons tous le même Dieu. Nous devons juste le trouver en nous-même ».
©Christine Turnauer - Awookoo
Techniques minimaliste pour d'intenses portraits
Turnauer utilise pour ses portraits, la lumière du jour avec un fond neutre pour ne pas avoir de distraction. Il y a très peu d'écart entre elle et la personne qu'elle photographie, seulement quelques centimètres les séparent. « C'est presque du face-à-face » ajoute-t-elle.
« Des flocons de neige »
La couverture de son livre est un portrait de Punzle, âgée de 78 ans, elle vient du nord de la Mongolie. Punzle est nomade et éleveuse de rennes, la légende de cette photographie nous informe qu'elle a « Sept enfants de sept hommes différents. » Cette dame photographiée, fume une cigarette jusqu'au filtre tenu par sa main, portant une bague légèrement de travers. Un regard qui en dit long sur son vécu, un visage tracé, sculpté décrivant tout l'effort parcouru de cette nomade. Turnauer semble avoir choisit « son flocon de neige », au premier regard, ce portrait dégage une présence.
©Christine Turnauer - Ablaikhan
Le portrait d'Elisabeth Maria 80 ans fermière en Australie (Atteressee) est montrée d'abord de face puis de dos. De derrière, on peut remarquer la technicité du chignon de la fermière. C'est une manière de connaître les coutumes de la personne, ici, de sa coiffure traditionnelle.
Christine Turnauer ne fait pas seulement des portraits d'êtres humains, mais aussi d'animaux, notamment, le faucon d'Australie et un harfang des neiges. Ses clichés d'animaux peuvent apporter du fond et donner plus de détails sur la situation géographique des personnes photographiées.
Au fil de « la lecture », on s'aperçoit qu'il y a une âme dans ses portraits, une histoire est racontée, un message est passé. Christine Turnauer capture la PRESENCE de la personne en face d'elle, pas juste une simple représentation de cette dernière.
Shéhérazade Hamidi
Christine Turnauer
Presence
Texts by Frank Horvat, Christine Turnauer, graphic design by Andreas Platzgummer
German, English, French
2014. 188 pp., 182 ills. in duotone
29.80 x 37.10 cm
hardcover