© Régis Colombo
Etant en premier lieu dessinateur-architecte, Colombo n'a eu de cesse de se réinventer. Né en 1969, il étudie le dessin, s'essaye à la peinture pour multiplier les points de vue, et voir : il sait faire. Amateur de photos, il peaufine sa technique chez des professionnels avant de franchir lui même le pas. Perdu dans ses aller-retours entre la Suisse et le reste de la planète il expérimente tout le temps. Cet ouvrage est une sélection des clichés et peintures qu'il a réalisés depuis 1993, date de son premier grand photo-reportage pendant plus d'un an en Asie.
© Régis Colombo - "Jumping cat" Lac Inle, Brimanie (1993)
Un livre inclassable
Régis Colombo ne rentre dans aucune case. Nous mettons au défi la personne qui arrivera à caractériser ses œuvres tant sa palette est variée. Des portraits d'Asie, d'Afrique aux photomontages digitaux, il y a un monde. Un grand écart assumé entre ses portraits en noir et blanc issus du street reportage et sa réinterprétation pornographique de Mona Lisa.
© Régis Colombo - Vietnam, port d'Hô-Chi-Minh (1993)
© Régis Colombo - "La face cachée de Mona Lisa", composée de 2000 images pornographiques, 2010
Certaines images sont provocantes (Philippines/Pampelune), mais ne sont certainement pas gratuites. Régis Colombo photographie ce qu'il voit. Entrez dans le monde de la photo furtive ! Cette technique, en constante évolution chez le photographe suisse, nous fait apprécier la diversité des choses et des êtres.
En vingt ans, la photographie a beaucoup évolué. Techniquement d'abord avec la révolution numérique mais aussi artistiquement avec l'explosion des champs d'expérimentation et des connections avec d'autres supports, d'autres formes d'expressions visuelles. Colombo épouse ces transformations. Il s'amuse avec les images et nous aussi. Il portraitise des grands de ce monde comme le Dalaï Lama, des banquiers suisses, des travailleurs lambda, des Tanzaniens sur l'île de Zanzibar... mais toujours avec originalité, un regard neuf, de l'humour parfois.
© Régis Colombo - Le Dalaï-Lama à Lausanne, Suisse (2009)
© Régis Colombo - Bangkok, chef de la police thaïlandaise (1993)
© Régis Colombo - Les brigands du Jorat, Suisse (2011)
Régis Colombo est inclassable et surprend à chaque photo. Il fait du graphisme, réalise plus de 80 couvertures pour l'hebdomadaire suisse L'Hebdo, il fait des photos à l'esthétique léchée pour la publicité (série « Les brigands du Jorat »). Dans sa série « Search » il use de photomontages pour créer des portraits à partir de centaine de clichés. Warhol, Picasso... sont représentés à partir de toutes les images trouvées sur Google avec le mot clef correspondant. Cette série contraste immédiatement avec la série qui suit : « Storm ». Les clichés aériens en noir et blanc de masses de nuages et de tempêtes sont très beaux et montrent l'étendue du talent du photographe du canton de Vaud.
© Régis Colombo - Zanzibar (2005)
© Régis Colombo - "Kepler 8", Storm (2014)
© Régis Colombo - "2469 mètres" (2014)
« Lumière, tu es la lumière et resteras lumière »
Cette phrase, issue du nouveau testament ou d'un sketch des Inconnus, je ne sais plus, colle parfaitement à Régis Colombo. Il est certes né à Montreux mais il passe son enfance dans le village viticole de Cully dont les coteaux sont classés au patrimoine mondial de l'humanité (UNESCO). « Le plus beau paysage du monde ! » dixit Colombo. Les couchers de soleil, les reflets du Lac Léman ont bercé et orienté le futur photographe vers la lumière.
© Régis Colombo - L'escalier, New-York (2010)
Il se joue d'elle. Les lumières intenses qu'il semble privilégier s'opposent avec force à la profondeur des images en noir et blanc. Une utilisation des spectres lumineux comme il est rare d'en voir. Avec Colombo, le noir n'est plus synonyme d'absence de lumière grâce aux séries « Sous le soleil » et « Réflexions ». Cette dernière est au cœur de son travail et vous attirera comme le consommateur est attiré par les néons d'une enseigne. Les couleurs sont souvent vives et sautent aux yeux. Il recherche l'insolite, il joue avec l'architecture et applique une vraie réflexion à ses cadres rendant unique chaque cliché. On n'a qu'une envie, tourner la page pour être à nouveau surpris, éblouis.
La maîtrise de la lumière est impressionnante, c'est « un hommage à la beauté intérieure des êtres et à la lumière scintillante des lieux » selon Mathieu Ricard, célèbre interprète du Dalaï Lama.
© Régis Colombo - "Sous le soleil", Madrid (2014)
© Régis Colombo - "Sous le soleil", Madrid (2004)
L'ouvrage se termine par la séries « Transparencies », débutée en 2004. Le principe est simple, assembler des dizaines voire des centaines d'images pour n'en constituer qu'une. Entre le collage et la mosaïque, les images se superposent, s'assemblent. Des millions de pixels se heurtent comme des héritiers digitaux du Pop Art. Jean-Blaise Besançon ajoute : « différentes à chaque fois que le regard s'y plonge, les images de Colombo transportent celui qui s'y arrête à l'autre bout du monde, tout en lui donnant la liberté du plus fabuleux des voyages, celui de l'imaginaire. »
© Régis Colombo -Zanzibar (tirage sur Diasec et LED)
© Régis Colombo - Hommage à Magritte, Bruxelles (tirage sur Diasec et LED)
Régis Colombo n'est pas un adepte des loopers, ces boucles musicales appréciées des DJ et des scratcheurs. Il ne tourne pas en rond lui, il crée.
Une grande liberté s'échappe de ses photos, une sensation d'épanouissement intemporel lié à ce qu'elles dégagent. De l'humour, des images chocs, des images d'une grande beauté mais où vous pourrez toujours déceler de l'intelligence et de l'originalité.
Regis Colombo : 20 years photo
Jean-Blaise Besençon, Gianni Haver, Laurent Delahoye, Pierre Starobinski
Édition Favre
157 pages
ISBN : 978-2-8289-1448-6
Prix : 33 euros
Guillaume Reuge