© The London Stereoscopic Company 2013
Un processus complexe
Les Diableries relèvaient de plusieurs processus. D'abord, des figurines d'à peu près 30 cm de haut étaient fabriquées dans de l'argile. Placées les unes à côté des autres, ou en dessous des autres selon le rendu souhaité, elles formaient de petites scènes ; comme des tableaux. Ceux-ci étaient ensuite photographiés en relief grâce à un appareil possédant deux objectifs prenant plusieurs clichés : l'un décalé vers la droite, l'autre vers la gauche. Enfin, pour apprécier tout leur intérêt, il fallait regarder ces photographies avec un stéréoscope, ou visionneuse. En somme, ces appareils étaient les lunettes 3D d'aujourd'hui. La lumière a un grand impact sur ces images stéréoscopique qui, éclairées par devant, apparaissent en divers nuances de sépia mais qui, éclairées par l'arrière, se parent de vives couleurs.
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Ces saynètes avaient pour premier objectif d'illustrer des moments religieux. Plus tard, avec la censure imposé par Napoléon Bonaparte en 1852, elles sont devenues de véritables caricatures du pouvoir. De natures sociales ou politiques, ces railleries étaient commentées dans des cercles bourgeois. Ainsi, souvent, Napoléon apparaît avec sa petite moustache et son bouc. Pierre Adolphe Hennetier et Louis Alfred Habert sont les représentants de cette forme de photographie qui fera fureur de 1860 jusqu'au milieu des années 1890, dates de création des Diableries. Elle touchera aussi grandement le public anglais, admiratif des images stéréoscopiques.
Les aventures de Satan
Qui dit Diableries, dit Satan et ses acolytes. Mais là ou le démon, dans ses représentations habituelles, fait peur, ici il est plutôt amusant. Il est la représentation du régime de Napoléon ou l'empereur lui-même. L'homme en prend pour son grade. C'est dire l'amour que lui portaient Hennetier et Habert. Il faut également savoir que les opposants au régime n'avaient guère d'autres choix que de passer par les Diableries, puisque la censure était imposée. Cela leur permettait d'exprimer leur mécontentement sans se faire remarquer. En effet, ces Diableries sont très subtiles dans leurs caricatures. Certaines ont un sens très vaste de sorte à ce que le sujet de leurs attaques ne soient pas réellement identifié. Par exemple, « La révolte aux enfers » d'Hennetier peut être interprété, si l'on y prête peu attention, comme une simple révolution dans le royaume des morts alors qu'elle est une attaque directe contre Napoléon III. Cette diablerie commémore ainsi les tueries qui se produisirent après le coup d'état du prince-président et la mort du député Baudin.
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Ces critiques ont l'avantage de vouloir nous faire découvrir, si ce n'est déjà fait, le prince-président et le second empire. Pour autant, sans connaissance exacte du contexte, et malgré les explications fournies pour chaque Diablerie, il est difficile parfois de pleinement apprécier l'aspect caricatural de ces aventures stéréoscopiques en enfer.
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Celles-ci requièrent de la patience. En effet, pour les apprécier pleinement, Brian May a construit lui-même un petit stéréoscope. Ce gadget est pourtant plus qu'un simple jouet. Placé correctement sur les images, il crée un rendu 3D. Voilà probablement tout l'intérêt du livre. Mais attention ! Il faudra s'y essayer à deux fois avant de voir ces squelettes prendre vie. Alors, soyez patient !
Caroline Vincent