Le début du vingtième siècle est marqué par une série d'innovations qui ont changé la vie des Parisiens et le visage de la ville. L'ouvrage en noir et blanc Visages du Paris 1900 cherche à retracer la Belle Epoque, période débutant à la fin du dix-neuvième siècle, et marquée par le renouveau des arts tout autant que par les luttes sociales.
La gageure de la photographie d'être considérée comme un Art, et non seulement comme un outil technique, est illustré par le courant pictorialiste. Le lecteur découvre ici certaines œuvres de Constant Puyo, chef de file de ce courant, qui utilise le flou pour se rapprocher de la peinture.
De l'année 1900 dans la capitale française, l'Histoire a retenu de nombreux évènements marquants : l'arrivée du métro à Paris, l'Exposition Universelle, ainsi qu'un grande effervescence artistique et intellectuelle. C'est également l'époque d'une valse insouciante joyeuse, bien qu’éphémère puisqu'elle se termine en 1914, avec la Première Guerre Mondiale.
Albert Harlingue, Un vendeur de lait de chèvre avec son troupeau dans les rues du 7ème arrondissement © Albert Harlingue Roger-Viollet
Anonyme, une fête costumée offerte par le couturier Paul Poiret dans son hôtel particulier
Les divertissements sont aussi variés qu'esthétiques : des cancans du Moulin Rouge aux concours d'Aerostats saisis pas les Frères Neurdein, en passant par les montagnes russes de Luna Park. Cette société des loisirs est aussi l'ère de l'apogée du monde ouvrier, qui lutte pour de meilleurs conditions de travail. Des photographies de Maurice-Louis Branger illustrent les combats populaires, en immortalisant une manifestation de syndicats de locataires, ou des postiers en grève place de Clichy. Au début du vingtième siècle, la bourgeoisie émerge et se distingue par des classes moins aisées. Les frères Neurdein photographient un groupe de chiffonniers qui s'apprêtent à fouiller les poubelles, tandis que des baraques situées non loin de la butte Montmartre démontrent la présence de la pauvreté aux côtés du faste et du luxe.
Anonyme, Cols bleus et cols blancs attablés à la terrasse d'un café du boulevard Garibaldi
Les travaux d'Haussmann, débutés au milieu du dix-neuvième siècle, ont véritablement transformé l'allure de la ville, avec l'aménagement de grands boulevards, de places et de jardins. Il reste néanmoins quelques traces de ce à quoi ressemblait Paris avant les grands travaux, comme la cour du Dragon, qui est décrite comme « une enclave hors du temps appréciée par les amateurs du Vieux Paris ».
L'ouvrage propose également des clichés de femmes célèbres de cette époque, qui ont contribué à la transformation des mœurs rigides et conservatrices. Tel est le cas de Mata Hari, qui pose nue, sans voile ni collant, ce qui était choquant dans cette société pudibonde de l'avant-guerre. Une cocotte célèbre, Caroline Otéro, ou bien encore des artistes reconnues et admirées, comme Colette et Sarah Bernhardt, posent devant les objectifs de photographes anonymes, dont le nom s'est perdu au fil des années.
© Ministère de la Culture – Médiathèque du Patrimoine, Dist. RMN-Grand Palais Frères Séeberger
© Roger-Viollet
Le sport a lui aussi sa place dans ce livre, grâce aux photographies du tour de France 1908 par Maurice-Louis Branger, ou bien encore des Jeux Olympiques d'été 1900.
Visages du Paris 1900 se feuillette agréablement, et permet de découvrir le Paris d'une époque mythique. Malgré tout, son manque de pertinence quant à l'ordre des photographies pourra lui être reproché. Bien qu'il existe un lien évident entre toutes ces œuvres, un classement et quelques textes explicatifs supplémentaires les mettrait davantage en valeur et y ajouterait un intérêt historique.
Adèle Binaisse
Visages du Paris 1900, éditions Parigramme
27,8 x 20 x 1,6 cm / 144 pages
9,90 euros