© Bruce Gilden
La photographie de Bruce Gilden fait partie de l'univers qu'il s'est crée. A mi-chemin entre la streetphotography et le reportage social, celle-ci est avant tout le témoin d'une époque. Les éditions Actes Sud lui consacrent un opus de la fameuse collection PhotoPoche. 82 photographies en noir et blanc, mais aussi en couleurs, qui balaient le travail de l'artiste au fil du temps.
© Bruce Gilden
Né en 1946 à Brooklyn, Bruce Gilden étudie à la Penn State University de New York, et début sa carrière de photographe en 1967. Son premier sujet photographique marquant sera celui de Coney Island. Ancienne île devenue péninsule et située à l'extrême sud de l'arrondissement de Brooklyn, dans la ville de New York, Coney Island a vécu plusieurs époques, plusieurs vies. A la fin du XIXe siècle, l'endroit devient un complexe de loisirs, une station balnéaire réputée avant l'arrivée des climatiseurs, mais aussi un parc d'attractions. Des courses hippiques y seront même organisées. Pourtant, Coney Island déclinera après la Seconde Guerre Mondiale, avec l'arrivée de l'air conditionné dans les appartements, mais surtout le développement d'autres grands centres de loisirs. Le lieu devient beaucoup moins bien fréquenté, les bandes y trainent, les jeunes déambulent. Cet endroit curieux attire l'intérêt de photographes comme Diane Arbus, Bruce Davidson, ou encore Léon Levinstein. Bruce Gilden, quant à lui, s'y rend pour la première fois en 1969, et ira régulièrement jusqu'au milieu des années 1980. Hans-Michael Koetzle, auteur de la préface de l'ouvrage, l'explicite ainsi : « Quand Gilden commence ses tournées, il n'y a plus de ces parades de monstres humains et le front de mer a beaucoup perdu de son attractivité. Toutefois, au moins dans les fins de semaine, les plages et le parc d'attraction sont toujours assez peuplés pour donne de la matière à un photographe intéressé par les phénomènes sociaux. »
© Bruce Gilden
© Bruce Gilden
En effet, la photographie de Bruce Gilden capte les curiosités du genre humain, ses imperfections. Il se passionne pour les scènes de vie, de rue les plus incongrues, celles que le passant voit sans regarder. Son terrain de chasse est la réalité d'une existence qu'il partage dans ses images empreintes de réalisme. New York, bien sûr, mais aussi l'Espagne, la France, ou encore Tokyo, qu'il photographiera grâce à une bourse de la villa Médicis, obtenue en 1995. Hans-Michael Koetzle l'écrit avec brio, « Mais il est aussi question, ici, de human interest : il faut bien comprendre que ce photographe-là s'intéresse d'une façon toute particulière aux êtres humains. Que tout n'est pas jeune, propre, beau et sain ; qu'il y a des faibles à côté des bien portants. Que la vie peut être injuste et même brutale, et qu'on a vite fait de vaciller et de tomber »
© Bruce Gilden
© Bruce Gilden
Ainsi, l'ouvrage publié chez Actes Sud retrace une carrière encore vivante, à travers des photographies poignantes disséminées. Pas de chronologie, pas de thèmes, d'organisation particulière, pour un photographe inclassable. « Cependant, dit-il, 'vivre sans risques ce n'est pas gratifiant'. Et d'ajouter, 'quand on a pas une vie facile, ça vous endurcit'. »
Claire Mayer
Bruce Gilden, collection Photo Poche N° 148 chez Actes Sud
Format 12,5 x 19 cm
144 pages
13 euros