Dans une approche documentaire architecturale, Bombed présente les zones portuaires reconstruites du Nord-Ouest de l’Europe, au contact de la rue et de ses passants. Dans les villes de Saint-Nazaire, Lorient, Brest, Le Havre, Dunkerque, Anvers, Rotterdam et Hambourg, Laëtitia Donval photographie les villes en mutation. Ces villes sont aussi marquées par l’histoire. Elle s’interroge sur l’appartenance à la communauté humaine et la filiation à la mémoire commune. De l’automne 2011 au printemps 2012, l’artiste prend des clichés de « cette profonde humanité, avant que tout ne soit balayé par des projets urbains et architecturaux ».
Les 25 photographies couleur et noir et blanc tissent les symboles d’un monde maritime, délaissé à une vision plus ouverte sur le développement d'une ville industrielle.
Laëtitia Donval vit et travaille à Brest. Diplômée à l’Ecole National Supérieure de la Photographie d’Arles en 2007, elle fonde un collectif photographique « Smoke Collective » : d’une production très variée, aux styles ou esthétiques différents. La jeune artiste utilise la photographie comme moyen de se confronter à soi-même et s'interroge sur l’environnement, prolongement infini de la relation à l'existence. Elle défend l’idée d'une photographie documentaire d'auteur avec un ancrage personnel fort. Laëtitia Donval partage sa vision de la photo et rend à l'image sa force émotionnelle.
Le livre au format 21 x 26 cm met en valeur les photos dans un enchaînement sans description et donne au spectateur une certaine réflexion sur la vie dans les régions presque abandonnées. Celui-ci est placé au centre d’un questionnement : à quel point la mondialisation peut-elle transformer un paysage naturel et historique ?
© Laëtitia Donval
© Laëtitia Donval
Son approche documentaire présente des zones en contact étroit avec l'aspect sauvage de l'océan, opposés aux milieux urbains : un paysage de grues et de hangars. L’atmosphère contrastée propre aux lieux marque sensibilité et rigueur. « Ce qui m'intéresse, c'est d'observer les mutations des villes portuaires, explique la jeune photographe. Elles ont une âme particulière et elles se transforment vite. Il y a des entrepôts qui disparaissent... »
Dans un paysage parfois sordide, Laëtitia dévoile la souffrance et la solitude des habitants de ces villes reconstruites. Avec fragilité, elle associe des images d’archives de la vie nocturne brestoise et de ses bistrots. « On touche ici à une vision plus organique, plus brute, une sorte d’album de famille », ajoute l’artiste. En retranscrivant la mémoire d’une ville qui change, elle montre l’ambiance particulière caractérisée par un fort passé maritime et la sensibilité de ses individus. Une galerie de portraits en noir et blanc ou en couleurs, nettes ou floues, qui rassemble une communauté humaine.
© Laëtitia Donval
Entière et vivante, Laëtitia Donval prend des clichés avec spontanéité, comme dans l’urgence. Hormis les portraits contrastés de la jeune génération face aux personnes âgées qu’elle rencontre, la Brestoise oppose en parallèle les paysages maritimes du passé à ceux de la reconstruction des villes portuaires après la Seconde Guerre Mondiale. D’un regard singulier, elle témoigne de l’histoire et photographie des épaves de bateaux datant de l’époque d’Halifax, bombardier britannique.
© Laëtitia Donval
Derrière ce paysage maritime se construisent effectivement de plus en plus de bâtiments, preuve du changement lié à la mondialisation. « J’ai voulu axer mon travail sur des images collectives portuaires où règne une atmosphère de bout du monde, vouée à une mutation imposée par la mondialisation », explique Laëtitia Donval. L'artiste réussit à mettre en évidence un contraste, entre authenticité et renouveau.
© Laëtitia Donval
Laëtitia Donval, « Bombed »
Editions Filigranes
Format 21 x 26 cm
48 pages
25 euros
Nathalie Keosouvanh