© Marc Asnin
Marc Asnin s'est très vite passionné pour la photographie. « A 12 ans, j'ai décidé que je voulais devenir photographe. Plus tôt, quand j'étais plus jeune, mon père était photographe publicitaire, et il avait un studio à Manhattan. (…) Je ne faisais pas de bonnes photos au départ, mais j'ai appris la technique, et j'ai surtout compris que c'était un métier de patience. Je suis allé dans une école d'art, pendant 4 ans, où je me suis rendu compte que je voulais devenir photographe documentaire, car j'aime l'actualité et l'histoire, ce sont les seules choses que j'aimais à l'école. » Ainsi, vers 18 ans, Marc Asnin commence à photographier son oncle Charlie, un personnage haut en couleurs, mais surtout en marge d'une société à laquelle il a beaucoup de difficultés à adhérer.
© Marc Asnin
© Marc Asnin
C'est ainsi, pendant 30 ans, que le photographe immortalisera la vie de son oncle, une vie faite d'insécurité, de blessures et d'embarras, tant matérielles que mentales. « Le photographier m'a fait découvrir une histoire beaucoup plus compliquée que je ne le pensais. Les mots écrits dans le livre sont les siens, c'est important car j'ai appris la façon dont il se connaissait, et non la façon dont il montrait qui il était. Pendant 30 ans, je l'ai photographié, nous avons retranscrit ses propos, j'en ai parlé avec l'éditeur, et nous avons crée la trame narrative. Au départ, ça tournait plutôt autour de la pauvreté, de sa maladie mentale. « Don't judge the book by its cover » dit un dicton américain. Il se donnait l'air dur, mais il était surtout peu sûr de lui, il avait un fort sentiment d'insécurité. » C'est en effet un homme aux traits coriaces et aux tatouages, un univers qui paraît lourd et oppressant que nous renvoient les images de Marc Asnin. Des photographies en noir et blanc, qui, outre leur dureté, confèrent une atmosphère pesante inévitable mais essentielle à l'ouvrage.
© Marc Asnin
© Marc Asnin
Au fur et à mesure des années, comme au fil des pages de l'ouvrage, la vie d'Oncle Charlie se dévoile, et c'est avec authenticité et émotion que le lecteur apprend lui aussi à connaître un homme marquant. Les images se succèdent, de manière chronologique. Des clichés de son enfance tout d'abord, le contexte, sa famille, sa vie. Les années se suivent, les images défilent. Mais au milieu de toutes ces photographies, prises par Marc Asnin comme les images d'archives de la famille, des mots, beaucoup de mots. Ce sont ceux d'Oncle Charlie qui raconte, décrit, selon son mode de pensée. Des mots en majuscule, en italique, des paragraphes, aucune linéarité. Mais c'est le jeu, la règle est de s'immiscer dans sa pensée. Les mots volent à travers les pages, et les images en noir et blanc témoignent. Les troubles mentaux d'Oncle Charlie semblent croître non seulement au fil des pages, mais aussi des années.
© Marc Asnin
© Marc Asnin
Ainsi, Uncle Charlie, au-delà d'être une biographie photographique, explore des époques, des milieux, des comportements. Mais aussi et surtout l'échec, la solitude, la pauvreté, la mort, l'amour... Autant de thèmes traversés pendant 30 ans par les deux hommes, l'arroseur et l'arrosé, qui confèrent à cet ouvrage, au-delà d'une qualité photographique exceptionnelle, un message émouvant et captivant.
© Marc Asnin
Uncle Charlie de Marc Asnin
22,1 x 3,8 x 29,7 cm
Contrasto editions
48 euros
Claire Mayer
« People often ask me what Uncle Charlie is about. After thirty years, one would think I would be able to easily sum it up. But this book is life, raw unintelligible life ; the life of one man, my uncle, and as in life, there are no easy answers or summaries. It's about broken dreams, disappointment, and having the resiliency to find slivers of happiness in an oppressed existence. It's about consequences, missed opportunities, delusions and loss. It's about having the guts to look intensely at the familiar and process what's in front of you, taking an account of your family, your society and what is said about both. It's about a relationship between two men, from two generations, living very different lives, bound by family. It's a collaboration of shorts : his words and my images. It's my dance with my godfather » Marc Asnin