Né en 1922, Jean Ribière débute sa carrière au service photo du journal L'Indépendant des Pyrénées Orientales en 1940. Passionné de photographie, il crée, avec sa femme journaliste Micheline Vialle, une agence de presse, « Ribière Presse ». Celle-ci remporte immédiatement un grand succès : ils sillonnent la France, puis très vite aussi l'étranger, pour fournir photos et reportages à la presse mondiale.
En 1947, Jean Ribière procède à son premier voyage en Aveyron, département français situé dans le sud-ouest de la France. Il en tombe sous le charme, si bien qu'il y reviendra régulièrement durant plus de 10 ans : 1 300 photographies ont ainsi été prises dans les années 1950-60.
Depuis le décès de Jean Ribière en 1989, c'est sa fille, Hélène Tabes, qui gère son œuvre. Après le livre 1945-1955 par Jean Ribière, reporter-photographe paru en 2007, elle a fait appel à Marie-Claude Dupin-Valaison, conservatrice et historienne qui connait très bien la région : ensemble, elles proposent 120 des plus belles photographies de Jean Ribière sur la vie des aveyronnais dans l'ouvrage Aveyron, le temps de la terre, 1950-1960, en librairie depuis le 3 octobre dernier.
© Jean Ribière.
Faire un choix dans un si large panel de photographies n'a pas été chose facile. Un travail exhaustif n'était pas possible, puisque comme le note Marie-Claude Dupin-Valaison, « Jean Ribière n'avait pas le désir de réaliser un documentaire sur la vie dans la totalité du département de l'Aveyron (…) il n'est pas allé partout ! ». Les 120 photographies sélectionnées permettent cependant au spectateur de pouvoir se représenter assez globalement la vie d'un aveyronnais de ces années-là.
Après une introduction, le livre est divisé en 4 grands chapitres : « le temps des campagnes », qui montre l'Aveyron paysan, « le temps des foires et des marchés », qui met en avant les échanges entre la population, « le temps de l'artisanat et de l'industrie », et enfin « le temps de la fête et de la foi », car il ne faut pas oublier que Jean Ribière a collaboré pour des magazines religieux.
© Jean Ribière.
Un désir d'être le plus clair possible est indéniable, et surtout indispensable ! En effet, tenter de rendre vivant et d'intéresser par un sujet aussi lointain n'est pas des plus évidents.
Tout d'abord, à cause de l'éloignement géographique : tout le monde n'habite pas en Aveyron, il faut donc parvenir à rendre ce département intéressant pour que le public s'y projette. Même si l'amour du photographe pour la terre, la population, et même les bêtes, se dégage des clichés de Jean Ribière, il n'est pas toujours aisé pour le spectateur d'entrer dans l'univers proposé par l'ouvrage.
Ensuite, car les photos paraissent datées d'un autre temps, que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître … L'Aveyron, en ce temps là, était bien différent d'aujourd'hui, notamment parce que les grands bouleversements modernes des années 1960 n'étaient pas encore passés par là. Les photos elles-mêmes prouvent leur ancrage dans le passé : le noir et blanc, mais également le format carré qui semble tout droit tiré d'un vieil appareil photo.
Pourtant, on peut noter une touche de modernité de la part de Jean Ribière dans son choix de cadrage, toujours très intéressant. Si, à première vue, certaines photos semblent sans intérêt, en regardant de plus près on perçoit des détails amusants, des personnages cachés dans un coin qui donnent un sens à l'ensemble.
Jean Ribière et sa moto, 1946 © Jean Ribière.
Il faut souligner le travail toujours très pertinent de Marie-Claude Dupin-Valaison, qui tente de rendre ludique et actuel ces clichés figés. Elle appose une légende à l'ensemble – ou presque – des photographies, proposant ses interprétations aux spectateurs, jouant avec lui pour partager ses connaissance et le tenir en éveil.
Malheureusement, cela ne suffit pas toujours … Si vous êtes historien, habitant ou passionné de l'Aveyron, courez acheter cet ouvrage. Sinon, ce livre risque de vous laisser indifférent.
© Jean Ribière.
Aveyron, le temps de la terre, 1950-1960 - Photographies de Jean Ribière – Textes de Marie-Claude Dupin-Valaison et Hélène Tabès
19 x 24 – 160 pages
Editions Le Rouergue
25 euros
Claire Barbuti
Facteur © Jean Ribière.