Cutlog © Adèle Latour
Une visite de Cutlog : une découverte de l'art contemporain international
Cette quatrième édition de Cutlog semble être une réussite à y voir le monde qui s'y bousculait dés le soir du vernissage. Présentant des stands modernes et épurés, mais située dans un bâtiment prestigieux (la bourse de commerce), la foire confronte deux styles qui laissent ainsi place à une atmosphère propice à l'exposition de l'art contemporain.
Les visiteurs curieux semblent aussi hétérogènes que les artistes présentés. La foire se caractérise d'ailleurs par une large internationalité. C'est donc dans une ambiance conviviale que Cutlog se déroule.
Cutlog © Adèle Latour
Si les galeristes sont présents et entièrement dédiés à la défense des œuvres qu'ils présentent, l'on regrette parfois l'absence des artistes pour qui l'on aurait mille questions. En effet, l'art contemporain n'est pas évident et se caractérise beaucoup par des sens cachés et subtils que le spectateur ne parvient pas toujours à saisir. Si les galeristes se rendent capables de nombreuses explications, celles de l'artiste ont un autre sens et un autre intérêt.
Les œuvres présentées sont variées, que ce soit concernant le style ou les supports choisis. Cutlog présente aussi bien des peintures que des photographies, des sculptures, et même des performances. Qu'elles soient teintées d'humour, de noirceur, ou d'étrangeté, nombreuses sont les œuvres qui interpellent et provoquent un sentiment chez le spectateur. Ce dernier sent bien que la volonté des artistes n'est pas toujours de créer du beau tel que le grand public le conçoit. Leur souhait semble plus être celui d'interpeller, de questionner, voire de provoquer ou de dénoncer. Il n'est pas pour autant certain que les artistes soient engagés et aient tous un véritable message, mais leur but est probablement de ne laisser personne indifférent et de marquer, de quelque manière que ce soit, chaque visiteur qui s'arrête devant leurs œuvres.
Le domaine de la photo est très bien représentée au sein de Cutlog. De nombreux photographes y sont exposés et l'on retrouve souvent le travail de la photo comme base de réflexion pour les artistes. Evidemment, les photographes exposés sont pour la plupart très représentatifs d'un art contemporain parfois très abstrait. Ainsi, ceux présents dans Cutlog n'hésitent pas à jouer des techniques de retouches et de trucages afin de créer des images artificielles et irréelles. Le but est aussi souvent de bousculer les codes classiques de la photographie, et de produire une image dérangeante et perturbante.
Citons quelques exemples:
Chan Hyo Bae, de la galerie MC2, présente une série de photos réalisées avec des hommes et des femmes asiatiques posant dans des costumes d'époque traditionnels européens. Il revisite ainsi les contes pour enfant tels que Cendrillon, Blanche-neige, ou encore la Belle et la Bête. Le photographe mélange alors les identités et les cultures. Il cherche sans doute à provoquer le spectateur pour qui ces contes sont au cœur d'un imaginaire enfantin et occidental. Peut-être l'artiste cherche-t-il également à questionner l'intégration des asiatiques dans nos sociétés occidentales.
Cutlog © Chan Hyo Bae
Giuseppe Mastromatteo, de la galerie Fabrica Eos, présente quant à lui des portraits d'hommes et femmes dont les corps connaissent une anomalie fictive. C'est ainsi qu'une femme possède un corps blanc pour un visage noir, ou qu'un œil apparaît sur un bras, justement censé caché cet œil. Le photographe perturbe ainsi le spectateur qui ne parvient pas toujours à trouver du premier coup d'oeil l'objet de sa gêne.
Adèle Latour
Cutlog © Giuseppe Mastromatteo
La Bourse ou la vie artistique : le bilan de Cutlog
La quatrième édition de Cutlog vient de s'achever. Temps forts, points faibles, bons moments … Que retenir de cette nouvelle édition ?
Le très convoité prix ARTE/Cutlog 2012 a été décerné à l'artiste britannique Olivier Bragg, exposé dans la galerie E.G.P. Plein d'humour et d'ironie, il crée des œuvres cherchant à faire réfléchir sur l'étrangeté de la condition de l'homme dans une société de plus en plus individualiste et oppressante. Cette distinction récompense son originalité, sa cohérence et sa potentialité d'évolution de son travail sur la scène artistique. Cette dernière est indéniable : lors du vernissage, tout le monde se bousculait à son stand, de tous les âges et de toutes les nationalités.
© Olivier Bragg.
S'il y avait moins de monde devant la Galerie l'Atelier et son artiste Stefania Angelini, elles ont pourtant reçu le prix Cutlog Gallery, remis pour la première fois par la banque Pictet qui s'engage à sponsoriser l'Atelier. Une grande distinction pour cette galerie considérée comme « la plus audacieuse, la plus indépendante et la plus originale », et qui remporte en prime un beau chèque de 5000 euros.
De façon plus originale et inattendue, Seymour a lancé une initiative interactive avec les visiteurs : chacun était invité à écrire le mot qui lui venait à l'esprit face à un dessin pour le moins novateur de Dan Miller. Si le but était d'encourager à imaginer plus loin que la simple œuvre, à approcher l'art par une perspective différente, le résultat est sans équivoque : le mot le plus cité est « gribouillage ». Cette opération fut un vrai succès, 233 personnes s'étant amusées à écrire le mot qui leur passait par l'esprit : Cutlog apparaît comme une vrai réussite dans l'échange qui s'est tissé entre les artistes et le public.
Son directeur, Bruno Hadjadj, confie : « Ce qui m'intéresse, c'est de sensibiliser à la fois les collectionneurs, mais aussi le grand public ». Cutlog a une nouvelle fois permis cette année de partager autour de l'art : en déambulant dans les allées circulaires, on ne comprend qu'un mot sur deux aux conversations tant les langues sont diverses, mais chacun tente de faire percevoir à l'autre son point de vue sur telle ou telle œuvre. L'abstrait qui caractérise l'art contemporain aide à ce partage.
Cutlog © Adèle Latour.
Cutlog a réussi son pari : résolument tournée vers l'international, la foire d'art contemporain a su donner la parole à des artistes venus d'univers différents, qui questionnent sur des sujets contemporains (liberté d'expression, condition de la femme, ...), même si c'est parfois de façon abstraite. Il s'impose comme un rendez-vous complémentaire de la FIAC. « Cutlog is both an alternative and a complement to the other art fairs » peut-on lire sur leur site internet.
Et ce n'est que le début : à vos agendas ! Dans une volonté de repousser toujours plus loin les frontières de l'art contemporain, Cutlog donne rendez-vous du 10 au 13 mai 2013 pour l'édition new-yorkaise, avant de revenir l'automne prochain sous la coupole de la Bourse du commerce.
Claire Barbuti