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Quand un photographe normand rencontre un auteur normand : « Barbey d'Aurevilly - Un cotentin Romanesque » du photographe Bruno Mercier

Mercredi 28 Novembre 2012 12:40:56 par actuphoto dans Livres Chroniques

 

Artiste dans l'âme, Bruno Mercier est initié dès son plus jeune âge à la photographie par son père. Il se tourne pourtant rapidement vers l'illustration. Passionné par le travail des graveurs du XIXe siècle, il noircit de nombreux carnets avec des paysages tortueux, travaillant sur les lignes et les formes pour créer un atmosphère fantasmagorique.  

Comme une continuité à ce travail de dessinateur, il revient peu à peu à la photographie : « J'ai troqué un pinceau de lumière pour un autre, un pinceau différent qui me permet d'aller encore plus loin dans l'approche que j'ai de l'image ». Tout naturellement, il photographie sa Normandie natale, époustouflé par les mouvements de la nature qui lui permettent de laisser libre court à son imagination. 

 
 
Bruno Mercier n'est pas le seul artiste natif du Cotentin, pays normand du massif armoricain situé entre l'estuaire de la Vire et la baie du mont Saint-Michel. Près de 150 ans avant lui, l'auteur Barbey d'Aurevilly y était né et avait déjà mis en avant la richesse de cette région dans ses romans, nouvelles et poèmes. 
 
A partir de ce fait, une idée originale germe dans l'esprit de Bruno Mercier : proposer ses clichés comme une continuité des écrits tranchants de l'univers romantique et enchanteur de Barbey d'Aurevilly. Le résultat : l'ouvrage Barbey d'Aurevilly, Un Cotentin Romanesque, sorti en librairie en septembre 2012. 
 
 
 
 
© Bruno Mercier.
 
 
 
En ouvrant le livre, le lecteur/spectateur accepte d'entrer dans un monde totalement subjectif, et qui s'assume comme tel. Ce n'est qu'approchant de la quarantaine que Barbey d'Aurevilly place ses narrations en Normandie : il est alors parisien, et ne recrée ce monde qu'à partir d'une « projection mémorielle ». Bien sûr, Bruno Mercier n'a pas pu faire de même : il a besoin de parcourir l'espace Cotentin pour pouvoir le photographier. Pourtant, il est conscient de ne pas faire un travail d'historien : il s'agit de faire découvrir la région à travers ses propres yeux, ce qui signifie forcément des choix. 
 
 
 
 
© Bruno Mercier.
 
 
 
Le travail plus exhaustif, c'est Julien Deshayes qui le fournit dans ses textes qui ouvrent l'ouvrage. Avant de pouvoir comprendre le travail proposé par le photographe, un rappel de l'oeuvre de Barbey d'Aurevilly, de sa visée et de sa portée était nécessaire. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cette exigence est relevée haut la main : les textes sont très complets, très bien écrits et très intéressants. 
 
On y perçoit parfaitement tout l'univers aurévillien, ce qui permet malheureusement de voir à quel point Bruno Mercier passe à côté de tout un pan de l'auteur du XIXe siècle. Le photographe s'était lancé un défi de taille : parvenir, par un médium uniquement visuel, à faire suggérer et faire voyager le spectateur comme Barbey d'Aurevilly parvenait à le faire par son support écrit. L'une des forces de l'écrivain était de jouer sur les mots afin de personnifier des lieux inanimés. Bruno Mercier, lui, s'attarde parfois trop sur des édifices fixes qui ne parviennent pas à entraîner le public. 
 
 
 
 
© Bruno Mercier.
 
 
 
C'est dommage, dans la mesure où certaines photographies sont très intéressantes. Le but de Bruno Mercier est non pas « de décrire (son) environnement, (sa) région, mais plutôt de suggérer, d'inviter le spectateur à pénétrer au cœur de l'image et à la faire sienne, ouvrant ainsi une porte sur l’imaginaire et à ressentir à son tour les éléments ». Quand il photographie la nature, cette visée se perçoit particulièrement. 
 
C'est lorsqu'il joue avec la perception du public que les photographies de Bruno Mercier sont le plus réussies : floutant l'arrière plan, ou même certaines éléments du premier plan, le photographe parvient à intriguer le spectateur, qui quitte son monde terre-à-terre pour se laisser entraîner vers d'autres horizons. La nature, qui permet un jeu de cache-cache et un travail sur les ombres, happe le spectateur-rêveur.
 
Le noir et blanc opère pour renforcer ce mysticisme, « la magie secrète du noir et blanc » s'est d'ailleurs imposée à Bruno Mercier. Il n'est pas possible d'imaginer autrement le monde romantique et fantastique de Barbey d'Aurevilly, proche notamment de l'univers sombre d'un Edgar Allan Poe.
 
 
 
 
© Bruno Mercier.
 
 
 
Tout le côté subversif de l'écrivain, qui lui a notamment valu d'être accusé d'immoralisme après la publication de son recueil de nouvelles Les Diaboliques, est totalement évacué. Aucun cliché qui dérange dans Le Cotentin Romantique. Or, l'insolite et la transgression présents dans les œuvres de Barbey d'Aurevilly permettent également aux lecteurs de se plonger dans un univers ambigu : il est dommage que ce côté équivoque ne se retrouve pas dans les clichés de Bruno Mercier, laissant le spectateur dans ses certitudes, et ne parvenant donc pas à l'entraîner dans un nouvel univers. 
 
 
 
 
© Bruno Mercier.
 
 
 
 
Le critique littéraire Sainte-Beuve immortalisa le génie de Barbey d'Aurevilly en affirmant qu'il avait « une plume de laquelle on peut dire sans flatterie qu'elle ressemble à une épée ». Si Bruno Mercier parvient parfois à transpercer le cœur du spectateur en l'entraînant dans sa Normandie mystifiée, il n'a pas assez aiguisé l'arme qu'est son appareil photo pour emmener le spectateur en croisade à ses côtés. 
 
 
 
 
 
Barbey d’Aurevilly, un Cotentin romanesque – Photos de Bruno MERCIER ; Textes de Julien DESHAYES
 
160 pages - Format 24 x 31 cm
 
Les Editions du Cotentin
 
Prix : 39 euros
 
 
 
 
Claire BARBUTI

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