
L'Union des photographes professionnels (UPP) met la profession en alerte en proposant un manifeste adressé il y a quelques mois au ministère de la culture et de la communication. (http://actuphoto.com/22635-l-union-des-photographes-professionnels-propose-un-manifeste-pour-aider-la-photographie.html">Pour)
La lecture de ce manifeste n'est pas toujours évidente, puisque s'enchaînent termes juridiques et rappels d'anciennes mesures déjà proposées. Mais grâce à l'éclairage de Jorge Alvarez, secrétaire adjoint aux affaires juridiques de l'UPP, et Nolwenn Bescher, juriste de l'UPP, Actuphoto vous propose de mieux comprendre l'enjeu de ce manifeste, et surtout, son importance.
Ce texte proposé par l'UPP contient huit propositions pour la photographie. L'enjeu de ce manifeste est clair, pour Jorge Alvarez : «Le but était de sensibiliser les candidats à la présidence, et les futurs législateurs. Lors du dernier quinquennat, sous la gouvernance culturelle de Frédéric Mitterrand, nous avons uniquement pu faire voter un article de loi au Sénat sur les œuvres visuelles orphelines, rien de plus. Ce n'est pas encore suffisant pour aider une profession en chute libre».
C'est alors plein d'espoir et toujours concerné, que l'UPP, représenté notamment par son président Philippe Schlienger, a rencontré récemment Kim Pham, du cabinet de la ministre de la culture et de la communication Aurélie Filippetti, en charge de l'audiovisuel et du cinéma. « Nous avons été reçu rapidement, ce qui est une première. Il nous a assuré que nous travaillerions ensemble, mais que les discussions budgétaires était pour le moment bloquées, et ce depuis plusieurs mois. Mais à partir de maintenant, il semblerait que la situation ait évolué et que nous puissions nous mettre au travail ».
Au milieu de ces huit propositions pour la photographie, Jorge Alvarez en met surtout une en avant, essentielle, celle de la valeur économique.
Voici cette proposition contenue dans le manifeste : « Plusieurs pratiques nées dans le contexte du développement de l'Internet participent à la perte de valeur financière de la photographie. Paradoxalement, cet outil qui semblait présenter des perspectives économiques pour les photographes professionnels est devenu la principale source de dérégulation du marché de la photographie. Le développement d'une offre de photographies gratuites par des sites communautaires (tel Flick'r ou Wikimedia) ou low cost (0,14 cents l'image) par des banques d'images appelées « microstocks » (tel Fotolia) a eu des effets catastrophiques sur le marché de la photographie professionnelle. Fondées sur des effets logiques de contributions d'amateurs (crowdsourcing), ces offres déloyales à l'égard des photographes professionnels ont crée une aubaine dont profitent un nombre croissant d'utilisateurs professionnels.
Nous souhaitons que soit réalisée d'urgence sous l'égide du Ministère de la culture et de la communication une étude économique portant sur les rémunérations des photographes auteurs, sur la valeur des droits d'auteur et sur la mutation des marchés depuis l'apparition des microstocks.
Nous sommes favorables à une modification de Code de la propriété intellectuelle prévoyant que l'usage professionnel d'oeuvres photographiques est présumé avoir un caractère onéreux.
Nous demandons également, dans la logique de l'exception culturelle, la mise en place de barèmes minimums de prix pour les cessions de droit sur les œuvres photographiques. »
En effet, pour Jorge Alvarez, « l'idée de la valeur économique a aujourd'hui pratiquement disparu. Les autres points du manifeste sont très importants, mais contextuels. A l'heure actuelle, des contrats sont réalisés à tout va pour tout, et 9 fois sur 10 ce sont des contrats abusifs. Le talent des photographes doit avoir une valeur, pour qu'ils puissent avoir la reconnaissance qu'ils méritent ».
Ce dernier ajoute un élément important, qu'est la question budgétaire : « La majorité des choses que l'on demande n'a aucune conséquence sur le budget de l'administration... C'est une question politique et de justice sociale » …
Une affaire à suivre de près, donc, en espérant que l'énergie que dépense l'UPP pour faire avancer les choses ne sera pas vaine …
Claire Mayer