« Décors ultra-kitsh, chevelures blondes ou rouges explosives, courbes affirmées, maquillages outranciers et bien sûr costumes provocants », Stan Guigui a suivi la troupe du cabaret New Burlesque pendant leur tournée de deux mois à Paris, du théâtre de la Cité à leur nomination aux César 2011 pour le film Tournée de Mathieu Amalric.
Membre de l'agence VU, le travail de Stan Guigui se situe entre l'art contemporain et le photojournalisme. « Intéressé par les thématiques sociales de l'exclusion et des mondes marginaux, s'est un artiste anticonformiste et engagé. Son univers est peuplé de personnages baroques et Felliniens. Très marquées par l'oeuvre de Victor Hugo qui sublime la misère, la colère et la révolte, ses photographies sont un hommage à la bohème et aux bohémiens ».
C'est fin décembre 2010 que le photographe rejoint la troupe du Cabaret New Burlesque, composée de cinq femmes et un homme « qui s'effeuillent pour mieux dévoiler l'outrance des sociétés formatées, mettre en lumière leur combat féministe et rappeler dans un rire et un déhanchement que la différence est une richesse ». Un sujet hors-norme, décalé et plein d'humour, que Stan Guigui maîtrise à la perfection. Il photographie les coulisses, les loges, le spectacle et dresse les portraits de Julie Atlas Muz, Dirty Martini, Roxy Roulette, l'unique garçon de la troupe, Evie Lovelle, « visage de princesse au corps de diablesse », Kitten on the Keys, la maîtresse de cérémonie qui présente chaque numéro et Mimi Le Meaux, californienne à la poitrine généreuse. Pleines d'énergie, fières de leurs rondeurs et de leur défauts, « elles sont les créatures gargantuesques du spectacle le plus excessif de l'année 2010 ». Après avoir capturé des « instants de vie » de la troupe, le photographe a également voulu faire des images plus posées, loin du stress des représentations. « Je voulais jouer avec ces modèles hors normes, faire une séance plus intime. L'hôtel Fouquet's à Paris nous a prêté une suite que nous avons pu transformer en studio et la séance s'est terminée avec toute la troupe à moitié nue, posant au milieu des Champs-Elysées ». Loin de l'émotion survoltée des coulisses du spectacle, c'est avec humour cocasse et décalé que la troupe pose dans cette suite. La photo de Roxy Roquette dans un bain moussant, santiags aux pieds, lunettes de soleil, casquette et foulard avec à côté de lui Julie Atlas Muz, nue qui fume un cigare est absolument loufoque et drôle. Rien n'est vulgaire, rien ne dérange tout est capturé dans une parfaite et juste mesure.
© Stan Guigui
Stan Guigui ne prend pas de recul sur ce qu'il photographie, il y va franco, « il s'y plaque, s'y colle, s'écorche, mord et embrasse. Il revendique la subjectivité de son objectif ». Le noir et blanc est omniprésent ce qui crée une ambiance mystique, onirique et mystérieuse. Le flou et le grain y sont pour quelque chose, rien n'est tout à fait net, ci-bien qu'on ne sait plus trop si on est plongé dans la réalité ou dans un univers irréel.
© Stan Guigui
Sans aucune vulgarité Stan Guigui photographie ces corps en pleine préparation. Maquillage, paillettes, faux cils, vernis, bigoudis, grosses poitrines et caches tétons rythment les pages de ce livre. On y prend du plaisir et on rit. La joie de vivre de la troupe y transparaît, de quoi nous remonter le moral par ces temps moroses. « C'est laid et c'est superbe, c'est d'un goût outrageant et exquis, c'est incomplet comme une chose qui serait vraiment belle ! » Huysmans, Croquis parisiens, « Les folies Bergère en 1879 »
Alexandra Lambrechts, 2 décembre 2011.
Editions du Chêne
120 pages
25 euros
Disponible depuis octobre 2011.