Kai Wiedenhoofer connait bien le conflit israélo- palestinien, il s’y consacre depuis plus de vingt ans. Pendant toutes ces années, il a articulé son travail autour de recherches documentaires pour pénétrer au cœur du problème et rendre compte le plus justement possible d’un conflit inextricable qui déchire le Moyen- Orient depuis plus de soixante ans. Il parle couramment l’arabe. Par son œil de photojournaliste aguerri, il interroge le réel avec une sensibilité et une humanité particulière. Il se place donc dans la lignée des photojournalistes humanistes.
Pour traiter ce sujet complexe, il a choisit plutôt un angle économique et social. Il adopte aussi une photographie réflexive. Dans cette série de photo consacrée à Gaza il s’intéresse aux conséquences humaines et matérielles des différentes offensives israéliennes en territoire palestinien. Il s’est surtout évertué à montrer les conséquences du siège de Gaza sur la population gazaouite lors de l’opération «plomb durci» perpétrée en janvier 2009. Sans jamais verser ni dans l’excès ni dans la caricature, il a su saisir la réalité dans toute sa complexité. Chaque photographie présentée est agrémentée d’un petit texte journalistique qui explique le contexte de chaque cliché. Cette mise en contexte renvoie à la violence du conflit.
Un certain nombre de ces clichés montrent des jeunes blessés, mutilés, marqués à vie tout simplement parce qu’il se trouvait souvent au mauvais endroit au mauvais moment. Quand ils ne sont pas tués sur le coup, la vie de ces personnes ne sera plus jamais la même. Certains ont perdu, leurs jambes, leurs bras ou sont défigurés par les obus.
La violence réside non pas dans le choc provoqué par le conflit mais dans ses conséquences humaines qui demeurent incompréhensibles. Ce reportage renvoie à l’absurdité et à l’injustice du conflit qui touche en premier lieu des civils innocents.
Bien que l’on soit habitué à voir des images violentes dans les journaux télévisés, ces photographies peuvent mettent mal à l’aise peut-être parce que se sont des images fixes. Tout au long de ce reportage Kai Wiedenhofer cherche à nous montrer toute la violence de ce conflit sans jamais tomber dans l’exagération.
Le prix Carmaignac Gestion du photojournalisme qui lui a été décerné récompense un engagement et un dévouement quotidien pour rendre compte d’un conflit difficile à traiter. Il salue aussi un travail effectué sur le long terme.
Cette reconnaissance lui permet d’être exposé au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris jusqu’au 5 décembre 2010. Ainsi le grand public peut découvrir ce travail de longue haleine qui mérite d’être vu.
Jessica Staffe / Actuphoto