Photo Facebook Cédric Herrou
Cédric Herrou a arrêté de se poser la question il y a déjà quelques mois. Il a fait. Sans se poser de question, sans même reprendre le shot de trop. L'agriculteur a pris son camion bleu qui lui servait à livrer des œufs et y a mis les femmes, les hommes et les enfants qui transitent par la vallée de la Roya, entre Nice et l’Italie, point de passage pour les migrants bloqués à la frontière. « Je le fais parce qu'il y a des gens qui ont un problème, je le fais parce qu'il faut le faire (…) », a-t-il déclaré devant le tribunal de correctionnel de Nice. Le procureur a requis à son encontre huit mois de prison avec sursis mise à l'épreuve et la confiscation de son véhicule, ainsi qu'un usage limité de son permis de conduire aux besoins de sa profession. Le délibéré doit être rendu le 10 février.
D'un coup, l'homme est sorti du cadre. Il a repoussé, tous à la fois, ceux de la loi, de la morale ou de l'action. Il assumera ses responsabilités face à la première, pour les deux autres, c'est déjà gagné. Car bizarrement, en sortant du cadre, Cédric Herrou est entré dans la photo. La sienne bien sûr, qui circule déjà partout, sorte d'icône - sans doute réductrice - d'un justicier à lunettes. Une autre aussi, prise en plan large, d'une vallée verdoyante où des gens vivent et s'entraident. Cette image-là n'a pas l' « exotisme » du pays lointain. Elle montre ce voisin, ce héros ordinaire, ce mec qui conduit son camion et offre le petit-déjeuner, sous les rayons du soleil provençal, à ceux qui ont tout perdu.
Début novembre 2016, pour le http://fr.actuphoto.com/36460-aris-messinis-quand-je-travaille-j-essaie-d-etre-sans-emotions-.html", le photographe Pierre Terdjman en collaboration avec le journaliste Adam Nossiter avaient déjà proposé un récit sur son action dans la vallée de la Roya. A la fin novembre, c'était Laurent Carré qui captait pour Libération les images de la « http://fr.actuphoto.com/36460-aris-messinis-quand-je-travaille-j-essaie-d-etre-sans-emotions-.html"». Tout comme Marco Bertorello en décembre, photographe freelance pour l'AFP, qui était lui aussi allé voir ce qu'il s'y passait. Chacun d'eux choisissant de cadrer cet instant plus que décisif.