H. Seymour Squyer, 1848 - 18 Dec 1905 — National Portrait Gallery
Harriet Tubman. Née esclave vers 1820 dans le Maryland. Quoi de pire ? A part « Né réfugié en 2016 » ou « Né Finkielkraut sur la place de la République », on voit pas. (Note pour plus tard Alain : va plutôt te balader au dîner en blanc, t'auras moins de problèmes). « Araminta Ross », c'est le nom qu'on lui donne à sa naissance. Un patronyme de servitude, celle-là même qu'elle refusera en s'échappant une première fois dès l'âge de sept ans. A quinze, elle manquera de se faire tuer par un contremaître qu'elle avait défié. Sa rage et sa révolte n'en sortiront que renforcées. Après avoir épousé John Tubman, elle s'échappe à Philadelphie et reprend sa liberté en se donnant le prénom de sa mère, Harriet. Son mari refuse de la rejoindre, soit. Elle fera sans lui. Dès lors, Harriet Tubman aidera les esclaves à s'échapper du sud via le « chemin de fer clandestin ». Pas moins de 19 voyages. Lorsqu'éclatera la guerre de Sécession, en 1861, elle servira d'éclaireuse aux troupes nordistes.
H.B. Lindsley. Library of Congress
« Infirmière, espionne et éclaireuse ». Les trois mots, écrits au bas d'un des clichés la représentant, ont le mérite de poser les choses. Le regard perçant vient ajouter aux qualificatifs la force et la détermination. Malgré cette robe qui semble inconfortable et boutonnée de trop près. Malgré cette pose si peu naturelle, les deux mains posées sur le velours d'un fauteuil où elle aurait oublié son chapeau et sa veste. Malgré tout cela, l'oeil d'Harriet touche au cœur, à la colère. Il est le même sur toutes les photographies. Rarement souriante, elle porte sur son visage le combat d'une femme née esclave, féministe avant l'heure, libre, insoumise.
Pour la petite histoire d'ailleurs, Harriet fut sous-payée par l'armée pendant la guerre et a dû vendre des « root beers » pour survivre. Même après le conflit, elle n'a jamais été remboursée et s'est vue refuser une pension militaire. Elle a fini par l'avoir en tant que veuve d'un soldat, son second mari.
En plus d'être symbolique, le visage d'Harriet Tubman sur ce billet de 20 dollars ne manque pas d'une cruelle ironie.