© Thierry Ehrmann Bachar al-Assad grafitti - Saint-Romain-au-Mont-d'Or, Rhône-Alpes, France
César était photographe en Syrie. Pas de ceux qui immortalisent les mariages ou les heureux événements. En Syrie, cela fait bien longtemps qu'il n'y en a plus, d'heureux événements. Pas de ceux non plus qui sont tombés sous les éclats d’obus, les balles ou les bombardements, en voulant montrer au monde l'horreur de la guerre. Gilles, Marie, Rémi, Olivier ou James… 47 journalistes tués depuis mars 2011 selon Reporters Sans Frontières.
Non, César était photographe scientifique au service de la police militaire. 13 ans de bons et loyaux services. Son job ? Prendre des clichés des scènes de crime. Une sorte de Grissom syrien. Et puis, la guerre aidant, le job a changé. Radicalement. On lui a demandé de photographier les détenus tués par le régime. Bachar voulait-il soudain avoir quelques photos souvenirs de la torture de masse initiée par lui ? De quoi se faire des cadres dans son salon ? Les raisons sont beaucoup plus cyniques. Il s'agissait de pouvoir fournir un certificat de décès sans que les familles ne demandent à voir le corps et de confirmer l'exécution des ordres. Très organisé et bureaucrate le Bachar.
50 corps par jour pour 15 à 30 minutes de travail. César et son équipe n'en finissent pas de prendre en photo ce qu'il reste d'un corps quand on l'affame, qu'on le torture et qu'on le tue. 50 corps par jour, ça en fait des photos ! César en a ramené http://fr.actuphoto.com/31403-syrie-les-photos-de-l-horreur-exposees-dans-le-hall-des-nations-unies.html". Car l'homme a refusé de continuer à participer au massacre. En 2013, il a déserté son pays, des preuves dans son sac, pour montrer la réalité des geôles syriennes.
Ce sont précisément ces 55 000 images de 11 000 personnes torturées et tuées par le régime syrien depuis 2011, qui ont permis au parquet de Paris d'ouvrir une enquête préliminaire pour crimes contre l'humanité. On appréciera cette décision aussi courageuse que tardive. Sur César et son histoire, un livre sortira également le 7 octobre. Opération César, de Garance Le Caisne. On appréciera ici le bon goût du vocabulaire journalistique. Pourquoi pas Opération Corned-Beef ? Christian Clavier l'avait déjà prise. Mince.
A l'heure où les puissances internationales semblent être rentrées dans le jeu d'une guerre qui ne fait que commencer, il faut lire ou relire http://fr.actuphoto.com/31403-syrie-les-photos-de-l-horreur-exposees-dans-le-hall-des-nations-unies.html" et s'attarder sur ces photographies insoutenables. Il faut le faire pour se souvenir de ce qu'il se passe. Pour se dire que ces images nous en rappellent d'autres. Pour se dire que « plus jamais ça » est une expression, sans doute vaine, mais qu'elle est celle d'une humanité qui ne s'oublie pas.