© Nadav Kander
En découvrant la une du Time, les lecteurs du magazine américain se sont enflammés. La troisième lettre du titre, un imposant M rouge, vient se poser sur la tête du milliardaire. Pour les partisans de Trump comme pour ses opposants, il est évident que le magazine a volontairement donné une paire de corne au futur président des Etats-Unis. Les anti-Trump applaudissent ce « choix » du maquettiste, les pro-Trump le dénoncent. Pour mettre fin à la polémique, Time a rappelé qu’il avait déjà été accusé de la même chose plusieurs fois dans le passé : les têtes des époux Clinton, celles des trois derniers papes, ou encore celle de l'actrice Jodie Foster avaient elles aussi rencontré http://time.com/3742509/donald-trump-time-person-of-the-year-horns/?iid=sr-link1". Pour être sûr d’être compris, le magazine ajoute : « Toute ressemblance avec des chats, chauves-souris ou diables ne saurait être que fortuite ».
Pour comprendre cette couverture, mieux vaut lire http://time.com/3742509/donald-trump-time-person-of-the-year-horns/?iid=sr-link1". Le journaliste Jake Romm, dans une jolie démonstration en trois parties, explique « Pourquoi la couverture du Time est une subversive oeuvre d’art politique ». Peu intéressé par les « cornes rouges » de Trump, Romm s’attarde sur trois éléments : les couleurs, la pose et le fauteuil.
Les couleurs choisies, presque délavées, renvoient au passé. Le chromatisme ancien serait alors le reflet d’une campagne nourrie par la nostalgie, le désir d’un retour à une Amérique d’autrefois. La pose choisie par le photographe du Time joue avec les codes traditionnels du pouvoir. La position assise est généralement celle des rois ou des empereurs. Ici, Trump n’est pas pris de face, mais de trois-quarts. Symboliquement, il se détourne de son public pour se retourner vers les coulisses du show-politique, comme si l’harangue du populiste laissait maintenant place à la confidence du stratège. Clin d’oeil à House of Cards ? Dans la série américaine, le personnage Frank Underwood – lui aussi président des Etats-Unis - ne cesse de s'adresser en aparté au téléspectateur. Dans la série comme pour le magazine, nous sommes bien dans les coulisses du pouvoir.
Le fauteuil, enfin. Identifié comme une Bergère style Louis XV, il apparaît d’abord comme un symbole de la richesse. Mais une analyse plus attentive montre les imperfections du fauteuil : la tapisserie à l’arrière du dossier se déchire. En plaçant Trump et son fauteuil de trois-quarts, le photographe nous montre volontairement l'envers du décor. Ce dossier abimé, c'est l'envers du rêve promis aux électeurs. Pour le journaliste d'Haaretz, le but du Time était « que l’illusion de grandeur s’effondre ». « Cette couverture est moins l’image d’un homme au pouvoir que l’arrêt sur image d’un leader et son pays, en pleine désagrégation » conclut-il.
Sources : http://time.com/3742509/donald-trump-time-person-of-the-year-horns/?iid=sr-link1"